Cependant, ce sont les forces armées, chargées de réprimer l'insurrection populaire de la province du Dhofar, qui absorbent la plus grande part du budget : plus de 500 millions de dollars. L'achat d'armement est onéreux : un seul contrat, conclu le 3 septembre 1974 avec la British Aircraft Corporation pour l'acquisition de douze avions de combat Jaguar, porte sur un montant de près de 100 millions de dollars. Le sultan Qabous paraît compromettre davantage les finances de l'État en décidant, le 23 février 1975, de déployer le long du détroit d'Ormuz des batteries des fusées britanniques sol-air Rapier dont l'installation ne sera terminée qu'en 1978.

Soutien

On apprend, début février, que l'Iran « avait garanti l'espace aérien » omanais en s'engageant à repousser tout appareil étranger qui survolerait, dans un but inamical, le sultanat. La protection ainsi offerte n'est pas désintéressée puisque le chah déclarait, dans une interview publiée fin juin 1974, que « le détroit d'Ormuz, la porte d'entrée du golfe Persique, est notre veine jugulaire ; pour nous, c'est une question de vie ou de mort que cette région soit aux mains d'un pays qui n'est pas notre ennemi ». Dès septembre 1974, une base aérienne est en voie d'aménagement près de Salalah, pour recevoir les chasseurs-bombardiers Phantom que le chah s'apprête à envoyer dans le sultanat.

Les États-Unis, eux aussi, s'intéressent de près à cette région riche en pétrole, à proximité de laquelle croisent des unités de la flotte soviétique. Invité à Washington en janvier 1975, le sultan est reçu successivement par le président Ford, le vice-président Rockefeller et Henry Kissinger. Ce dernier sollicite pour les forces aériennes américaines le droit d'utiliser la base britannique installée sur l'île de Massira.

Un accord secret a-t-il été conclu ? On l'ignore, mais les responsables du Front populaire de libération d'Oman (FPLO) assurent que, peu après la visite du sultan à Washington, le gouvernement omanais a procédé à l'agrandissement du camp de Badbad, proche de Mascate, pour abriter les militaires américains qui seraient chargés d'entraîner l'armée du sultanat. Les États-Unis installeraient dans ce camp des stations d'écoute et d'observation qui couvriraient la partie septentrionale de l'océan Indien. Selon l'agence Algérie Presse Service, Washington renforcerait ses positions dans le golfe, en prévision d'une intervention militaire qui serait rendue indispensable par le recours des Arabes à l'arme du pétrole.

La présence américaine et iranienne à Oman suscite la colère du colonel Kadhafi, lequel avait jusque-là soutenu le sultan Qabous contre la « subversion communiste » au Dhofar. Dans un message qu'il adresse le 28 février au souverain omanais, le chef de l'État libyen écrit : « Nous vous conjurons, pour la dernière fois, de demander le retrait immédiat des forces étrangères du sultanat, faute de quoi nous déclencherons une guerre dans laquelle vous serez du côté des conquérants étrangers, et nous du côté du peuple arabe (...), faute de quoi encore vous finirez comme un chameau galeux. »

Le roi Hussein vient aussitôt au secours du sultan Qabous. Pour bien montrer que ce dernier n'est pas isolé dans le monde arabe, le souverain jordanien révèle le 1er mars qu'il a fait don de 31 avions de type Hawker-Hunter au sultanat, où il a dépêché également un bataillon de commandos. Ce dernier, précise-t-on à Amman, est chargé d'assurer la protection de l'importante route qui relie, à travers les montagnes, Salalah, la capitale de la province du Dhofar, à Thamrit, base stratégique située dans le Nord. Cette route avait été dégagée en décembre 1973 (Journal de l'année 1973-74) par les troupes iraniennes, lesquelles ont été chargées depuis de combattre les maquisards à l'ouest de la ligne Salalah-Thamrit.

Dhofar

Les révolutionnaires du FPLO subissent plusieurs revers depuis l'automne de 1974. Le 18 novembre 1974, le sultan Qabous annonce que « la colonne vertébrale de la rébellion a été brisée ». En janvier, la situation paraît critique. Le 9, les forces iraniennes prennent la ville de Rakhyut, coupant ainsi les routes de ravitaillement entre les guérilleros et la République démocratique du Yémen, qui les soutient. Précédant l'offensive à proprement parler, des appareils britanniques, basés à Salalah et à Massira, et munis de bombes incendiaires, se sont acharnés contre les villages, les points d'eau, le cheptel, les champs et les pâturages dans l'intention manifeste de vider les montagnes de leurs habitants. Une grande opération héliportée, déclenchée le 4 février par les forces omanaises, atteint tous ses objectifs.