Le 5 décembre, le peuple accepte la prorogation de la surveillance des prix et rejette une initiative de trois mouvements d'extrême gauche qui proposaient de fixer la durée maximale du travail hebdomadaire à 40 heures.

Le 13 mars 1977, les mouvements xénophobes essuient un nouvel et grave échec. Ils présentaient trois initiatives : la première tendait, une fois de plus, à limiter le nombre des étrangers admis à résider en Suisse ; la deuxième, à restreindre la pratique des naturalisations ; la troisième, à soumettre tous les traités internationaux — y compris ceux que la Suisse avait déjà conclus ! — au référendum facultatif. Le peuple et les cantons disent trois fois non.

L'aspect le plus intéressant de cette consultation n'est pas, d'ailleurs, l'ampleur des majorités rejetantes, mais la faiblesse de la participation des citoyens au vote : 45 %. La présence des travailleurs étrangers, qui recule notablement, il faut bien le dire, à cause du tassement des affaires, ne passionne plus les électeurs.

Jura

Le 20 mars, les citoyens du futur canton du Jura, par 27 061 « oui » contre 5 749 « non », acceptent la Constitution que leurs députés leur ont préparée. Charte qui ressemble, sur beaucoup de points, à celles des autres États confédérés : on ne pouvait transgresser le droit fédéral, qui, dans tous les domaines, devient prioritaire. Mais les constituants ont imaginé quelques institutions d'un grand intérêt. Le Jura sera doté d'une Cour constitutionnelle et, dans chacun des trois districts, de cours administratives qui protégeront les particuliers contre l'arbitraire des bureaux. C'est, en Suisse, une importante innovation.

Le texte adopté contient, cependant, de l'avis du Conseil fédéral, un grain de beauté très gênant. Son article 138 prévoit que le 23e canton pourra, le cas échéant, s'agrandir des territoires voisins dont les habitants voudraient le rejoindre. En tout bien, tout droit, tout honneur : on ne peut rêver d'une disposition plus démocratique ni plus pacifique. Mais il s'agit quand même d'une allusion transparente aux districts jurassiens du Sud, qui ont choisi de demeurer dans le sein de l'Ours bernois, et dont on espère qu'ils changeront d'avis. Le canton de Berne et ses partisans ont très mal pris cet appel du pied. D'autant plus mal qu'à Moutier, ville charnière, les autonomistes et leurs adversaires sont constamment au bord de l'affrontement, que les incidents se multiplient, et qu'il a fallu mobiliser de très importantes forces de police — avec le concours de plusieurs autres cantons — pour empêcher une bataille sanglante. Le Jura divisé reste explosif.

Social

Le 18 avril, nouvelle alerte dans le domaine social : les typographes de Genève, qui revendiquent notamment la semaine de 40 heures immédiatement, se mettent en grève, et les quotidiens de la ville cessent de paraître pendant trois jours.

Les « mouvements divers », les tensions, les divisions politiques accentuées se reflètent évidemment dans le miroir parlementaire. Les difficultés financières de l'État central catalysent les oppositions, qui dressent — au sein même des groupes — les partisans du déficit (moyen de relance économique et de progrès social) contre les partisans de l'équilibre. Le gouvernement, à la recherche de ressources nouvelles, a beaucoup de peine à rallier ceux-là qui devraient le soutenir, et qui flairent, dans un scrutin populaire au sujet de la TVA, les risques d'une défaite retentissante. Finalement, les quatre grands partis s'entendent pour courir loyalement ces risques, et le rôle de l'opposition active échoit à deux formations de modeste importance, l'Alliance des indépendants à droite, les communistes à gauche.

D'autres blocages se produisent entre les Chambres et les partis. Conseil national et Conseil des États se renvoient, des mois durant, l'initiative pour la libéralisation de l'avortement (qui prévoit la solution pendant les douze premières semaines) et la réforme du Code pénal dans le même domaine (un assouplissement très timide des dispositions en vigueur) : le souverain tranchera. L'initiative dite « de Münchenstein », à savoir l'introduction d'un service civil, provoque de même une interminable navette parlementaire. Faut-il admettre, ou non, les objecteurs de conscience pour motifs politiques ? Le Conseil des États dit non. Le Conseil national dit oui... puis, de guerre lasse, se rallie.