Quelques nuages entre Jérusalem et la Maison-Blanche sont compensés par des approches de l'URSS, plus ou moins brouillée avec l'Égypte. En septembre 1975, à New York, Ygal Allon demande et obtient un long tête-à-tête avec son homologue soviétique Andrei Gromyko. Trois mois plus tard, il part incognito pour Zurich, où un mystérieux séjour de vingt-quatre heures lui permet d'autres contacts.

Indignation

Entre-temps, en octobre, une délégation israélienne comprenant un député du Mapam, parti gouvernemental, fait un séjour d'une semaine en URSS : rompues depuis 1967 seulement, au lendemain de la guerre de Six Jours, les relations Moscou-Jérusalem pourraient être renouées. En janvier 1976, le consul général d'Afrique du Sud devient ambassadeur, trois mois avant le séjour en Israël de son Premier ministre John Vorster, invité par son homologue Itzhak Rabin. À cette occasion, la Ligue arabe dénonce les deux régimes « fondés sur la discrimination raciale et l'usurpation des terres ». Nouvelle justification, à ses yeux, de la résolution votée en octobre 1975 par la commission sociale de l'Assemblée générale de l'ONU, assimilant le sionisme au racisme. Résolution qui provoque une vague d'indignation dans le monde et que condamne à l'unanimité, sauf les députés du parti communiste prosoviétique Rakah, l'Assemblée israélienne, la Knesset. D'où la réception plutôt fraîche réservée par Jérusalem, un mois plus tard, au secrétaire général de l'ONU, Kurt Waldheim, récusé comme médiateur.

Autre épreuve, l'OLP (Organisation de libération de la Palestine) étant admise à siéger au Conseil de sécurité de l'ONU, Israël refuse de participer à la séance du 12 janvier 1976 mais accepte pour celle du 22 mars, afin de ne pas être condamné sans, pouvoir se défendre. À nouveau, le 3 mai, l'Égypte demande la convocation du Conseil de sécurité pour examiner « la politique d'oppression et de terrorisme pratiquée par Israël contre le peuple palestinien en Cisjordanie et à Gaza ». La phrase vise une année de rapports avec les Arabes marquée par une paix toujours plus ou moins précaire à l'extérieur et par une contestation violente à l'intérieur et dans les territoires occupés : double affrontement avec les Cisjordaniens et, pour la première fois, avec les Arabes citoyens israéliens.

Un nouvel ambassadeur

Avant de laisser l'ambassade de Paris à Mordekhai Gazith, directeur de cabinet du Premier ministre, Asher Ben Natan affirme : « Les relations franco-israéliennes sont décrispées. » Il est vrai que 60 parlementaires et 5 membres du gouvernement étaient présents à sa soirée d'adieux. Quelques jours plus tard, à Noël 1975, le séjour en Israël du garde des Sceaux Jean Lecanuet semble lui donner raison. Alors on comprend mal que, le 2 mai 1976, un communiqué de Jérusalem annonce l'annulation de la visite privée à Paris du président israélien Katzir « en raison des circonstances » : il espérait un déjeuner à l'Élysée plutôt que la simple audience proposée par le président Giscard d'Estaing. Au même moment, le ministre de la Défense, le francophile Shimon Perès, affirme : « Franchement les relations avec la France ne sont pas bonnes. » Consolation, l'accord avec le Marché commun qui, à partir du printemps 1976, ouvre à Israël un marché de 300 millions de consommateurs.

Colonisation

Outre l'occupation qu'ils supportent de plus en plus mal depuis neuf ans, le principal grief des Cisjordaniens est la colonisation sauvage de leur pays par des sionistes activistes du Bloc de la foi. Malgré ses divisions, le gouvernement israélien finit par l'interdire, mais, une semaine après les élections municipales, une marche d'environ 30 000 manifestants israéliens traverse la Cisjordanie sur 36 km jusqu'à Jéricho, symboliquement.

En tête du cortège, un ministre du parti national religieux, Zvulun Hammer. Malgré son désaveu de ces colons sauvages, le Premier ministre Itzhak Rabin valide une autre colonisation officiellement planifiée. Il visite la vallée du Jourdain, « première ligne de défense... frontière vitale pour la sécurité d'Israël », où, depuis la fin de la guerre de Six Jours en 1967, se sont installés définitivement 16 kibboutzim, qui comptent 900 habitants et doivent s'agrandir de 230 habitations. À quoi s'ajouteront, en 1976, 5 nouveaux points de peuplement pour 400 familles.