Il faut dire que l'opération est originale et séduisante : elle offre les avantages de la vie urbaine dans un cadre campagnard. Ici, les citadins ignorent par définition les buildings... Colomiers est une ville basse et très étendue.

Le maître d'œuvre René Viguier, architecte toulousain, dispose d'une superficie totale de 600 ha. Il a déjà construit 3 000 logements, répartis en cinq quartiers ayant chacun une vocation particulière.

Ils communiquent entre eux par un système de rues où les automobilistes ne rencontrent pas de feux de circulation.

Deux zones industrielles de 100 ha (3 500 emplois), des équipements collectifs, des centres commerciaux, cinq établissements scolaires, deux vastes terrains de sport permettent à la population de vivre sur place en circuit fermé. Elle évite ainsi de se jeter dans les embarras épuisants et quotidiens de la circulation.

Languedoc-Roussillon

Le marché foncier : mainmise sur les terres

Achetée de plus en plus par des citadins et, surtout, par des étrangers, le prix de la terre augmente. Le phénomène commence à être ressenti en 1972-1973 par les agriculteurs du Languedoc-Roussillon comme une menace. Le 26 août 1972, une dizaine de jeunes agriculteurs envahissent, à Marvejols (Lozère), l'étude d'un notaire pour protester contre la vente aux enchères de 10 ha de pâtures et de 3 ha de forêts.

Ces terres, que des agriculteurs étaient prêts à acheter, ont été adjugées 120 000 F au propriétaire d'un bar-tabac de Paris, émigré de Lozère. Il y a un an, leur prix n'avait pas dépassé 50 000 F !

C'est en 1971 que le marché foncier de cette région bascule du côté des non-agriculteurs : pour la première fois, leurs achats dépassent, en superficie, ceux des agriculteurs eux-mêmes. Le phénomène était depuis longtemps amorcé : le Pr Raymond Dugrand, de l'université Paul-Valéry, à Montpellier, avait révélé il y a dix ans l'ampleur des surfaces déjà détenues par les bourgeoisies de Montpellier, Nîmes, Béziers et Perpignan.

Au cours des huit dernières années, les étrangers ont acquis plus de 30 000 ha en Languedoc-Roussillon. Les huit dixièmes des terres achetées le sont par des Belges. Ainsi, dans les Pyrénées-Orientales, trois communes – Nantet, Py et Nyer – sont entièrement passées sous le contrôle de sociétés forestières agricoles belges. Dans cinq autres communes du Roussillon, la moitié du territoire appartient à des Belges.

Plusieurs raisons expliquent cet engouement des Belges pour la terre languedocienne et roussillonnaise :
– en Belgique, la terre est rare, étroite et chère. D'où l'attrait pour ces vastes espaces bon marché – pour quelque temps encore – qu'offre le Languedoc-Roussillon ;
– les propriétés méridionales, plus ou moins abandonnées, sont devenues des occasions de placement et, peut-être, de spéculation. Beaucoup d'achats sont le fait de sociétés à responsabilité limitée constituées entre avocats, médecins et industriels belges ;
– la vocation touristique assignée au littoral de la région par les pouvoirs publics, sous l'égide de la Mission interministérielle pour l'aménagement du littoral du Languedoc-Roussillon, gagne à présent l'arrière-pays sous l'impulsion de capitaux privés. Des réalisations immobilières à caractère touristique sont de plus en plus fréquemment lancées. Au nord de Montpellier, un promoteur belge, Alfred Ramon, a créé sur 500 ha de garrigue des communes d'Argellier et Viols-le-Fort un ensemble comprenant hôtel, restaurant, piscine, camping-caravaning.

Le courant d'acquisitions a été stimulé et amplifié par d'actifs agents immobiliers belges et français. Parfois les procédés n'ont pas toujours été des plus honnêtes. C'est ainsi que des maires ont été sollicités pour l'achat de biens communaux. Des clients ont été alléchés par des diapositives somptueuses. On montrait aux acheteurs en puissance de magnifiques villas entourées de bois et flanquées de piscines. Sur place ce n'étaient plus que causses caillouteux, dénudés, sans accès praticables.