Il s'agissait de construire deux villes entièrement nouvelles sur la rive gauche de la Garonne : Le Mirail, quartier excentrique à vocation rurale, et Colomiers, situé à 8 km du cœur historique de Toulouse. Certes, 1973 n'a pas vu sortir de terre, d'un coup de baguette magique, les 12 000 logements neufs qui se dressent maintenant dans le périmètre de ces opérations ; mais cette année marque une étape capitale, celle d'une expérimentation concluante.

Aujourd'hui, les promoteurs du Mirail et de Colomiers ont la preuve d'avoir vu juste, car les conditions de vie offertes dans les deux nouvelles villes attirent travailleurs modestes et cadres plus fortunés.

La grande chance de Toulouse, capitale rose des pays d'oc, est de disposer d'un territoire communal aussi vaste que Paris (11 000 ha).

Utilisant cette richesse foncière, Louis Bazerque, maire de Toulouse de 1959 à 1971, fut le promoteur du Mirail, en lui affectant 750 ha situés dans la périphérie sud-ouest de la cité.

Maître d'œuvre de l'opération, l'architecte Georges Candilis s'attache à recréer le tissu urbain de la vieille ville. Puisque l'homme moderne se déplace en auto, il faut d'abord ouvrir de larges voies routières urbaines aboutissant à des parkings en sous-sol. À l'extérieur, sur une immense dalle réservée exclusivement aux piétons, se construit la cité proprement dite. Ainsi, la rue retrouve sa fonction originelle : un lieu d'échanges. À partir de là naissent toutes les activités urbaines : commerce, administration, écoles, universités, centres de culture et de loisirs. Des rues aériennes sont construites pour desservir les étages des immeubles verticaux.

De même, au niveau de la dalle du rez-de-chaussée, les architectes paysagistes aménagent des promenades ombragées sous d'anciennes futaies existantes dans lesquelles sont creusés des lacs artificiels. Enfin, pour éviter la pollution de l'air, le chauffage urbain équipe tous les logements.

Telles sont les lignes directrices de l'opération Mirail, qui comptera 23 000 logements et 100 000 habitants en 1985.

Cette cité-satellite sera réalisée en deux tranches dont la première est largement engagée. En effet, 20 000 personnes vivent déjà dans la nouvelle ville, face à la chaîne des Pyrénées.

Les 6 500 logements construits sont répartis en trois quartiers qui disposent de tous les équipements collectifs ; crèches, écoles, établissements d'enseignement secondaire et technique, université, hypermarchés, centres commerciaux, stades et terrains de jeux, maisons de jeunes, annexes de la mairie et de l'agence de l'emploi. Ces différents quartiers sont reliés entre eux par des voies routières à sens unique, articulées sur une rocade qui ceinturera complètement Toulouse d'ici 1978.

Pour éviter que Le Mirail soit une cité-dortoir, une zone réservée aux industries propres (140 ha) est incluse dans le périmètre urbain. Elle accueille déjà une dizaine de firmes à vocation électronique qui assurent 3 000 emplois.

Les sociologues ont tiré les premières conclusions de cette opération d'urbanisme ; elles sont favorables. Le Mirail est un lieu de rencontre entre Toulousains issus de milieux sociaux très divers, et une large majorité des habitants est satisfaite de ses conditions de vie.

Ce nouveau quartier autonome doit maintenant se trouver une âme. À cet effet, la deuxième tranche du Mirail, qui débutera bientôt sur l'initiative de Pierre Baudis, député-maire de Toulouse depuis 1971, accorde la priorité aux maisons individuelles de préférence aux collectifs verticaux.

L'année 1973 est également une charnière pour une autre grande initiative d'urbanisation, celle de Colomiers, porte de Toulouse ouverte sur la Gascogne.

En dix ans, cette bourgade de 300 foyers est devenue la deuxième ville de la Haute-Garonne. Elle compte aujourd'hui 20 000 habitants, qui n'ont pas l'impression de vivre dans une cité-dortoir comme il en existe souvent aux abords des grosses agglomérations.

Ce cap démographique étant franchi et les demandes de logements continuant d'affluer, Alex Raymond, député-maire, se fixe désormais comme objectif le chiffre de 35 000 habitants, qui devrait être atteint au cours de l'actuelle décennie.