Le président de la République, le 22 mars, à Lyon, déclarait : « Les activités régionales apparaissent comme le ressort de la puissance économique de demain. » Cette affirmation semblait mettre en cause la tradition centralisatrice jacobine, dont on connaît la force dans ce pays.

La crise de mai, d'une certaine manière, semble rejoindre cette mise en cause. Le désir populaire de participer, dans tous les secteurs et à tous les échelons de la vie nationale pour mieux maîtriser son avenir, est apparu avec une vigueur insoupçonnée. Dès à présent, il semble que, dans le domaine de l'aménagement du territoire, on s'oriente vers une consultation plus large des organisations représentatives, et même vers de nouvelles institutions régionales plus libres vis-à-vis du pouvoir central.

Une véritable aventure est commencée. Nous en avons vu les prémices sur le littoral languedocien et dans le complexe scientifique et aérospatial de Toulouse. Dans le regard du mineur, comme dans l'âpre revendication du paysan breton.

Nord

De toutes les régions françaises, le Nord est celle qui pose les problèmes les plus redoutables : milieux gouvernementaux et milieux syndicaux en conviennent volontiers.

La région tout entière est en conversion, et celle-ci ne réussira que si des moyens d'une ampleur jusqu'ici inconnue sont employés. La fermeture de puits des Houillères du bassin du Nord et du Pas-de-Calais et la diminution de la production de charbon, les difficultés de la sidérurgie dans la vallée de la Sambre, la crise du textile à Valenciennes, Roubaix, Tourcoing, le redressement lent du littoral à Calais et à Boulogne conjuguent leurs effets pour créer une situation explosive.

Les perspectives à long terme ont été dessinées par le Livre blanc de l'OREAM, présenté à la fin du mois de mars. Les premières mesures d'urgence ont été prises lors du Comité interministériel du 13 mai.

Les orientations

Bien que ces mesures ne se situent pas sur le même plan que les conclusions des experts de l'OREAM, elles font partie d'un plan concerté dont on peut espérer qu'à terme il changera en profondeur les données de la situation du Nord. On n'a pas, cependant, l'impression qu'elles correspondent aux besoins de l'heure.

Le principe d'aménagement de la région est ainsi formulé par les experts de l'OREAM : « Organiser la région dans l'optique d'un grand carrefour européen, et, plus précisément, faire de ses principales zones de peuplement des points privilégiés de convergence et d'alimentation des voies économiques qui irrigueront l'Europe du Nord-Ouest. »

C'est donc la restructuration, la reconquête partielle ou même la réhabilitation quasi totale des agglomérations existantes qui constitueront les orientations majeures de l'aménagement urbain régional.

Mais un certain nombre de responsables régionaux pensent que les chances de développement de la région partent du littoral. C'est lui qu'il faut d'abord relier à son arrière-pays. Il faut utiliser au maximum, disent-ils, tout comme en Belgique ou en Hollande, la chance immense que représente une façade maritime, avec Calais, Boulogne et surtout Dunkerque.

En fait, la discussion tourne sur le rôle futur de la métropole Lille-Roubaix-Tourcoing, dont tous les responsables régionaux ne paraissent pas toujours reconnaître la nécessité et l'importance. L'unité de la région Nord reste à faire.

Plus ponctuelles, les mesures prises par le Comité interministériel du 13 mai constituent les prémices d'un véritable plan d'action, qui se situe dans le cadre établi par l'OREAM.

Deux types de mesures ont été prises : les premières concernent l'emploi, les secondes l'équipement de la région.

De nouvelles entreprises vont être implantées dans la région : une partie de l'Imprimerie nationale sera installée à Douai, permettant la création de 2 800 emplois en six ans. Les services de l'annuaire téléphonique et du dépôt central des Postes et télécommunications créeront pendant la même période 1 200 emplois. Enfin, Simca s'installera sur la zone industrielle de Douvrin-la-Bassée, en créant 1 200 emplois nouveaux en cinq ans.