Dictionnaire de l'économie 2000Éd. 2000
E

Entreprise (suite)

Royal Dutch - Shell (Pays-Bas et Grande-Bretagne) pétrole (138 274)

Wal-Mart (États-Unis) distribution (137 634)

Exxon (États-Unis) pétrole (117 772)

Mitsui (Japon) conglomérat (107 228)

Mitsubishi (Japon) conglomérat (105 082)

Itochu (Japon) conglomérat (102 010)

General Electric (États-Unis) conglomérat (100 469)

J.-C. D.

➙ Investissement, firmes multinationales, OPA

Environnement

Depuis une quinzaine d'années, la conscience écologique s'est installée comme une des principales structures mentales des sociétés modernes. Derrière les catastrophes qui se produisent à intervalles réguliers – marées noires, fuites de radioactivité, maladie de la « vache folle » –, l'opinion publique découvre l'ampleur des dégâts provoqués par notre mode de développement. Les grands équilibres de la biosphère sont rompus par l'action humaine : la couche d'ozone s'amincit, l'augmentation de l'effet de serre menace la planète d'un changement climatique, les milieux naturels sont détruits, la biodiversité se réduit. Les conditions de vie se dégradent du fait de la saturation des espaces par les productions humaines : les déchets s'accumulent, la pollution des eaux s'accroît, les embouteillages sont quotidiens, l'alimentation devient toxique.

La prise en compte de l'environnement est un puissant facteur de transformation de l'économie. Elle entraîne l'extension de secteurs spécialisés dans les techniques de dépollution, favorise l'apparition de nouveaux marchés, modifie les marchés traditionnels en impulsant de nouveaux modes de gestion.

La première façon dont l'environnement influence l'économie est de rendre nécessaire la réparation des dommages commis. Cela nourrit l'essor d'une branche industrielle prospère. Au début des années 1990, le marché mondial des biens et des services environnementaux était évalué à environ 250 milliards de dollars, soit plus de 1 500 milliards de francs, et se situait, en importance, entre l'industrie pharmaceutique et le secteur des technologies de l'information. Il se développe à un rythme de 5 % par an.

En obligeant les industriels et les États à modifier, notamment, la production d'énergie, la préoccupation écologiste joue aussi le rôle d'un promoteur du progrès technique, en poussant à élaborer des matériels moins consommateurs d'énergie, donc en renouvelant les procédés. Quoique à un degré moindre que dans l'énergie, on retrouve le même phénomène dans tous les secteurs d'activité : automobile, chimie, agroalimentaire, travaux publics, pétrochimie, etc. Ils sont obligés de se « verdir » en amont, dans les conditions de leur production, comme en aval, devant l'émergence de la nouvelle sensibilité des consommateurs. L'environnement constitue donc une donnée stratégique nouvelle de l'activité industrielle.

L'environnement peut-il entrer dans la sphère du calcul économique et de l'analyse coûts-avantages ?

Cependant, un problème majeur de l'analyse économique est que, pour une bonne partie, les phénomènes écologiques ne donnent pas lieu à des échanges marchands, et qu'aucun mécanisme économique ne s'oppose à la destruction de l'environnement : l'air pur et l'eau propre n'ont pas de valeur perceptible jusqu'à ce qu'ils se raréfient et deviennent un bien précieux.

Pour un grand nombre d'économistes, la solution de ce problème dépend de la valorisation de l'environnement en termes monétaires. Le problème de l'évaluation monétaire de l'environnement est formalisé par le concept de coût externe – sous-entendu : externe à la sphère économique définie par les échanges marchands. Le coût externe (appelé aussi externalité ou coût social) est celui d'un effet provoqué par l'activité d'un agent, mais qui n'est pas supporté par lui et n'entre pas dans le prix du produit de son activité. Le coût externe sera supporté soit par un autre agent, soit par la collectivité. Par exemple, une usine qui pollue une rivière reporte le coût de la dépollution sur une industrie située en aval, qui devra épurer l'eau pour s'en servir. Symétriquement, des « bénéfices exter-nes » ne sont pas payés par la col- lectivité : par exemple l'entretien des paysages, assumé gratuitement pendant des siècles par les agriculteurs.

Les externalités ont, du point de vue de la théorie économique dominante, un avan- tage qui justifie qu'on supporte les coûts qu'elles entraînent. Certaines d'entre elles permettent de faire entrer dans la sphère marchande des éléments qui ne lui appartiennent pas, et donc d'augmenter l'activité globale apparente (c'est-à-dire mesurée par la monnaie). La pollution de l'eau génère une activité de dépollution, la production d'emballages accroît la vente des objets qu'ils contiennent, l'élévation de la morbidité augmente la consommation médicamenteuse, la destruction de la nature favorise le développement de parcs de loisirs, etc. Tant que les coûts externes sont supportés directement par le consommateur, ils contribuent à alimenter le flux d'une nouvelle consommation. La destruction de l'environnement est donc un facteur de dynamisme économique ! C'est en partie pourquoi elle se poursuit avec efficacité, jusqu'à ce que l'importance des coûts externes impose d'y mettre un frein.

Les techniques de mesure des coûts externes visent à nourrir une analyse coûts-avantages, examinant si les bénéfices tirés de la réalisation d'un projet ayant des conséquences environnementales ne seront pas annulés par le coût écologique qu'il entraîne. L'évaluation contingente est la principale méthode utilisée : on demande aux personnes concernées par un projet combien elles sont prêtes à payer pour préserver le bien environnemental (un paysage intact, une eau pure, etc.) qu'il va altérer. Le marché est simulé : combien l'enquêté paierait-il si le marché de ce bien existait ? La moyenne des réponses fournit une évaluation du prix du bien non marchand. Les techniques de monétarisation appartiennent cependant encore au champ de la recherche économique, et peu de décisions économiques concrètes y recourent systématiquement.

Environnement et énergie