loi

(latin lex, legis)

Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.
Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.

Prescription établie par l'autorité souveraine de l'État, applicable à tous, et définissant les droits et les devoirs de chacun.

DROIT

Nature de la loi

La loi comme expression de la volonté générale

Au sens large, la loi est l'ensemble des normes coutumières et écrites en vigueur dont le caractère contraignant permet d’assurer un minimum de cohésion sociale (la « loi » recouvre dans cette acception la notion de « droit »).

Longtemps la loi fut associée à l'idée de divinité : dans l'Antiquité, en Grèce ou dans la Rome des rois, c'était au nom des dieux que des individus édictaient des normes valables pour l'ensemble du corps social. « Droit et religion ne faisaient qu'un » affirme l’historien Fustel de Coulanges dans la Cité antique (1854). Jusqu'au xviiie s., l'Ancien Régime en France était une monarchie « de droit divin ». La conception de la loi comme expression de la volonté populaire est élaborée par Jean-Jacques Rousseau au siècle des Lumières. Elle devient à partir de la Révolution française l’un des principes fondamentaux de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen (1789), qui fonde un pan essentiel du droit français et des régimes démocratiques. L’article 6 de la Déclaration de 1789 stipule que « la loi est l’expression de la volonté générale », et ajoute que « tous les citoyens ont droit de concourir personnellement ou par leurs représentants à sa formation ». Dans son sens strict, la « loi » désigne donc les normes qui émanent du Parlement, qui est le représentant élu de l’ensemble du peuple.

Le même article fixe le caractère général et obligatoire de la loi : « elle doit être la même pour tous soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse ».

Le principe de légalité

La légalité est le principe fondamental sur lequel repose l'exercice du gouvernement dans les régimes démocratiques. Ce principe implique la subordination aux lois des décisions prises par le gouvernement et les autorités administratives : la loi est supérieure aux règlements qui émanent du pouvoir exécutif et de l'ensemble des pouvoirs publics. Cette supériorité de la loi vient du fait qu'elle est élaborée par les représentants élus des citoyens, et qu'elle est donc l'expression de la volonté générale.

D'autre part, le principe de légalité implique également dans certains États, comme la France, la subordination de la loi à la Constitution, considérée comme la loi suprême (en Allemagne, la Constitution est appelée « loi fondamentale »).

Le principe de la légalité implique donc la subordination de la loi à la Constitution et la subordination des actes gouvernementaux à la loi. Le premier degré de cette hiérarchie est sanctionné par le contrôle de la constitutionnalité des lois. Ce contrôle peut être juridictionnel, comme aux États-Unis et en Allemagne, où les citoyens peuvent soulever l'exception d'inconstitutionnalité devant les tribunaux. Il peut être constitutionnel, comme en France, où c'est au Conseil constitutionnel de trancher dans un différend éventuel entre le Parlement et le gouvernement.

Quant au contrôle de la légalité des actes gouvernementaux (second degré de la hiérarchie), il est assuré en France par un système très perfectionné de recours en annulation devant des juridictions administratives : Conseil d'État et tribunaux administratifs.

Domaine de la loi

Les matières réservées à la loi

La loi est en principe l'œuvre du Parlement qui la vote. Toutefois la Constitution française de 1958, qui régit la Ve République, encadre strictement les pouvoirs du Parlement (par le « parlementarisme rationalisé »). En premier lieu, elle énumère les matières qui relèvent du domaine de la loi et dans lesquelles le Parlement doit fixer les règles (article 34 de la Constitution). Toutes les matières ne relevant pas du domaine de la loi relèvent du pouvoir réglementaire du gouvernement (art. 37). Les matières réservées à la loi peuvent être classées en quatre rubriques :
– les lois fixant les règles qui concernent les droits civiques et les garanties fondamentales des citoyens, la nationalité, l'état et la capacité des personnes, la détermination des crimes et délits, la procédure pénale, l'amnistie, la création de juridiction et le statut des magistrats, l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions, le régime de la monnaie, les régimes électoraux, la création de catégories d'établissements publics, les garanties fondamentales accordées aux fonctionnaires civils et militaires de l'État, les nationalisations d'entreprises ;
– les lois fixant les principes fondamentaux de l'organisation générale de la défense nationale, de l'administration des collectivités locales, de l'enseignement, du régime de la propriété, du choix du travail, du droit syndical et de la Sécurité sociale ;
– les lois fixant les ressources et les charges de l'État ou lois de finances (loi de finances de l'année qui détermine le budget, lois rectificatives modifiant ce budget, lois de règlement pour approbation du budget de l'année précédente) ;
– les lois fixant les objectifs de l'action économique et sociale de l'État (lois d'orientation, lois programme, conçues notamment dans le cadre du plan et prévoyant généralement des engagements financiers à moyen ou à long terme).

Le Parlement peut en outre déléguer temporairement son pouvoir au gouvernement, en lui donnant l'autorisation de prendre, sous forme d'ordonnances, pour un temps limité et sous réserve d'une ratification ultérieure, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi (art. 38).

Les lois référendaires

En second lieu, la Constitution prévoit des lois référendaires votées par le peuple, qui légifère en dehors du Parlement, lequel en est simplement avisé. Les lois référendaires sont prévues par l'article 11 de la Constitution. L'initiative du référendum, procédure exceptionnelle, appartient au président de la République et au Parlement. Dans ce cas, il faut que la loi porte sur l'organisation des pouvoirs publics ou propose la ratification d'un traité qui, sans être contraire à la Constitution, a des incidences sur le fonctionnement des institutions. Le président de la République ne peut utiliser cette procédure que lorsque le Parlement est en session. Lorsque l'initiative de recourir au référendum vient du Parlement, la motion doit être votée conjointement par les deux assemblées et notifiée au président de la République.

Élaboration de la loi

L'initiative des lois

La liberté du Parlement en matière législative est également limitée par le fait que l'initiative des lois appartient tant au pouvoir législatif qu’au pouvoir exécutif. Ainsi, l'article 39 de la Constitution de 1958 l'attribue au Premier ministre et aux membres du Parlement (constitué de deux Chambres, l’Assemblée nationale et le Sénat). Lorsque les textes émanent du Parlement, on les appelle des propositions de loi, et, lorsqu'ils émanent du gouvernement, des projets de loi. Les projets gouvernementaux sont délibérés en Conseil des ministres, c'est-à-dire en présence du président de la République – en période de cohabitation, celui-ci ne peut empêcher la discussion d'un projet de loi, mais il peut exprimer son désaccord ; en période de concordance entre majorité présidentielle et majorité parlementaire, le président de la République peut susciter un projet de loi ou s'opposer à un projet gouvernemental.

La procédure d’adoption

La procédure d'élaboration d’une loi commence par le dépôt d'un texte (projet ou proposition de loi), qui est ensuite renvoyé devant une commission parlementaire spéciale (c'est-à-dire créée pour la circonstance) ou permanente : il en existe six dans chacune des deux Chambres, dont les principales sont la commission des Lois, celle des Finances et celle des Affaires étrangères. En commission, le texte est discuté et peut faire l'objet d'amendements. Vient ensuite son inscription à l'ordre du jour et sa discussion (générale et technique) en séance publique. Puis on procède au vote, article par article, amendement par amendement, le plus souvent à la majorité simple. Le texte est ensuite transmis à l'autre Assemblée qui doit l'adopter dans les mêmes termes. Si ce n'est pas le cas, le texte fera la « navette » entre les deux Chambres. Si un texte identique n'est pas adopté à l'issue de cette navette, une commission mixte paritaire, composée de députés et sénateurs en même nombre, se réunit pour mettre au point un texte commun. En cas d'échec et après décision du Premier ministre, le texte est ou bien réexaminé par l'Assemblée nationale, qui statue en dernier ressort, ou bien rejeté.

Dans le cadre du « parlementarisme rationalisé », c’est le gouvernement qui dispose essentiellement de l'ordre du jour au Parlement (art. 48) ; il peut ainsi préférer les projets de lois aux propositions de lois. Avec l’adoption d’une vaste réforme constitutionnelle en 2008 (loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la Ve République), qui vise notamment à renforcer le rôle du Parlement, l’ordre du jour est désormais partagé entre le gouvernement et le Parlement.

Promulgation et publication

Une fois la loi adoptée, sa promulgation et sa publication sont le fait de l'exécutif. Le président de la République doit promulguer la loi dans un délai de 15 jours. Pendant ce délai, il a la possibilité de demander une nouvelle délibération de la loi (François Mitterrand a usé de ce droit pour l'adoption de la loi sur le statut de la Nouvelle-Calédonie en 1985) ou d'en saisir le Conseil constitutionnel. Peuvent également le saisir avant promulgation le Premier ministre, les présidents des Assemblées et 60 députés ou 60 sénateurs.

La loi est publiée au Journal officiel, ce qui a pour effet de la rendre opposable à ses destinataires.

Vient ensuite l'application de la loi. Cette tâche incombe au gouvernement (art. 21), qui l'exerce par le biais des décrets d'application. Une loi ne peut s'appliquer telle quelle; des relais sont nécessaires entre le Parlement et les citoyens. L'exécutif peut donc être amené à retarder l'application concrète d'une loi, soit volontairement, soit sous la pression du public.

L’inflation législative

Dès 1991, le Conseil d'État pointe les risques liés à la croissance du nombre et de la longueur des lois caractérisant la France contemporaine. De fait, alors qu’environ 400 pages de lois étaient votées dans les années 1970, ce chiffre passe à 600 en 1990 ; entre le début et le milieu des années 2000, le volume des lois a doublé pour atteindre plus de 2 000 pages. Alors que selon l’adage « nul n’est censé ignorer la loi », cette inflation législative (qui peut être aussi étendue au nombre de décrets, également croissant), et le manque de cohérence générale qui en découle, crée selon les spécialistes du droit un état d’« insécurité juridique », notamment ressentie par les professionnels (juges, avocats, entreprises). Elle s’explique en partie par la nécessité de transposer dans le droit national les directives adoptées au niveau de l’Union européenne, ainsi que par l’apparition de nouveaux domaines d’intervention législative liée aux préoccupations environnementales, aux nouvelles technologies, à la mondialisation économique, etc. Mais cette inflation normative tient aussi à une certaine propension française à légiférer dès qu’un problème surgit, sans procéder au préalable à une étude du droit existant en la matière, et à vérifier s’il est appliqué ; elle répond en partie à la pression des médias et de l’opinion : les secteurs les plus touchés par ce phénomène d’inflation sont la sécurité et l’immigration, la politique de l’emploi, le droit du travail et la fiscalité.

Assemblée nationale française
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Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.
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Palais du Luxembourg
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