Mais les autorités ont mal apprécié les conséquences de son bannissement. Plusieurs dizaines d'écrivains, même quand ils ne partagent pas toutes les positions de W. Biermann, se déclarent solidaires de lui et critiquent les mesures administratives dont il est victime. Certains se rétracteront, d'autres perdront leurs postes à l'Union des écrivains, d'autres encore se réfugieront à l'Ouest.

La fronde des intellectuels inquiète d'autant plus le régime qu'elle coïncide avec le malaise de l'Église protestante. Le 20 août 1976, le pasteur Bruesewitz s'immole par le feu sur la place du marché de la petite ville de Zeitz, pour protester contre « l'anticléricalisme des autorités » et « l'oppression de la jeunesse par le parti communiste ». Ce suicide, considéré comme atypique par les protestants proches du régime, n'en met pas moins en lumière la difficulté pour les chrétiens à vivre leur foi tout en étant de bons socialistes.

Le fait que, quelques semaines auparavant, W. Biermann ait été invité par un pasteur à chanter dans une église de la banlieue de Berlin-Est a fait craindre aux autorités que le mécontentement ne se cristallise autour des églises protestantes. Pendant toute l'année 1976, en effet, des dizaines de milliers d'Allemands de l'Est demandent à émigrer à l'Ouest ; en se référant soit à l'acte final d'Helsinki, soit à la Constitution de la RDA, soit au communiqué de la conférence de Berlin des partis communistes européens. Ce courage nouveau que manifestent de simples citoyens explique a contrario le durcissement du régime, dont le meilleur indice est le retour de Willi Stoph à la présidence du Conseil.

Les élections à la Chambre du peuple du 17 octobre n'ont apporté aucune surprise. Les listes uniques du Front national, contrôlées par le parti socialiste unifié (SED), obtiennent 99,86 % des suffrages exprimés, alors que la participation atteint 98,58 %. Le 29 octobre, Erich Honecker, secrétaire général du SED, est porté à la présidence du Conseil d'État, l'instance suprême de la RDA. Horst Sindermann abandonne la présidence du Conseil des ministres au profit de Willi Stoph et devient président de la Chambre du peuple. W. Stoph, qui a été ministre de l'Intérieur au moment de la construction du mur, passe pour être un homme à poigne, capable de ramener l'ordre. L'affaire Biermann prouve que cette réputation n'est pas usurpée.

Berlin

Comme chaque fois qu'il a des difficultés intérieures, le régime cherche des dérivatifs à l'extérieur. Aussi la tension monte-t-elle à Berlin. À la fin de 1976, les autorités est-allemandes instituent un visa obligatoire pour les étrangers se rendant à Berlin-Est, elles suppriment les postes de contrôle placés entre Berlin-Est et la RDA, ainsi que le journal officiel de Berlin-Est, dans lequel les lois est-allemandes s'appliquant à la ville étaient publiées. Dans le même temps, elles créent un nouveau district urbain à cheval sur Berlin-Est et sur la RDA.

Le 1er mars 1977, elles instituent un nouveau droit de péage pour les automobilistes se rendant à Berlin-Est. Toutes ces mesures visent à intégrer dans la RDA le secteur oriental de la ville et à transformer la ligne de démarcation entre le secteur oriental et les secteurs occidentaux en véritable frontière d'État. À plusieurs reprises, les Allemands de l'Est, soutenus par les Soviétiques, déclarent que Berlin-Est est la « capitale de la RDA » et que les alliés occidentaux n'y ont aucun droit. Ceux-ci, forts de l'accord quadripartite du 3 juin 1972, affirment cependant le contraire.

Cette tension autour de Berlin s'accompagne d'une détérioration des relations interallemandes. Les incidents se multiplient à la frontière entre les deux États. Le 13 août 1976, les autorités est-allemandes interdisent (en violation flagrante de l'accord de transit de 1972) à des jeunes chrétiens-démocrates de se rendre à Berlin-Ouest en autobus pour commémorer l'anniversaire de la construction du mur.

Les négociations entre les deux États allemands sont dans une impasse. Günter Gaus, représentant permanent de Bonn à Berlin-Est, suggère, pour débloquer la situation, que la RFA reconnaisse le caractère international de la frontière séparant la RFA de la RDA et l'existence d'une citoyenneté est-allemande. Ces deux points constituent les revendications fondamentales de Berlin-Est ; mais G. Gaus est rappelé à l'ordre par le gouvernement de Bonn. Les Allemands de l'Ouest attendent d'une visite de L. Brejnev en RFA une amélioration de leurs relations avec les Allemands de l'Est, mais le secrétaire général du PCUS ne paraît pas pressé de se rendre sur les bords du Rhin.

Allemagne de l'Ouest

Bonn. 61 830 000. 248. – 0,2 %.
Économie. La prospérité économique se traduit encore par le traditionnel et confortable excédent de la balance commerciale qui permet aussi (malgré les exportations de capitaux et les devises abandonnées par les touristes ouest-allemands à l'étranger) un autre excédent plus réduit de la balance des paiements. L'inflation demeure à un taux faible. Cependant, beaucoup de productions ont stagné (électricité, construction automobile) ou marne franchement reculé (acier ; la crise, il est vrai, est internationale). La RFA, qui bien entendu est aussi tributaire de la demande extérieure, ne pourra demeurer indéfiniment un îlot de prospérité.
PIB (74) : 6 198. Production (74) : G 112 + A 122 + I 111. Énerg. (*74) : 5 689. C.E. (74) : 24 %.
Population active (76) 24 571 000 dont A : 7,2 % ; I : 45,8 % ; D : 47 %. PIB par secteur (75) A : 3 % ; I : 48 % ; D : 49 %. Prix à la consommation (évolution 76) : + 3,9 %. Balance commerciale (75) exp. : 90 MM $ ; imp. : 74,2 MM $. Balance des paiements (75) : excédent de 3,7 MM $. Les productions (75) : houille 92 Mt, pétrole importé 86 Mt, électricité 302 TWh, acier 40 Mt, automobiles 3,2 M d'unités.
Transports. (*74) : 40 568 M pass./km, 69 123 M t/km. (*74) : 16 879 100 + 1 100 000.  : 8 517 000 tjb. (74) : 11 005 M pass./km.
Information. (73) : 1 211 quotidiens ; tirage global : 18 667 000. (73) : 20 586 000. (73) : 18 486 000. (73) : 1 229 700 fauteuils ; fréquentation : 144,3 M. (74) : 18 767 000.
Santé. (73) : 116 768. Mté inf. (74) : 21,1.
Éducation. (73). Prim. : 6 499 824. Sec. et techn. : 5 076 139. Sup. : 729 707.
Institutions. République fédérale allemande, indépendante le 5 mai 1955. Constitution de 1949. Président de la République : Walter Scheel, élu le 15 mai 1974 ; succède à G. Heinemann. Chancelier : Helmut Schmidt, réélu le 15 décembre 1976.

Le chômage : problème pour H. Schmidt, vainqueur de justesse aux élections

La coalition libérale-socialiste réussit de justesse à sauver sa majorité aux élections législatives du 3 octobre 1976. Elle ne dispose plus que de 10 sièges d'avance sur la démocratie chrétienne, contre 46 en 1972 et 12 en 1969. Les débuts du nouveau gouvernement formé par H. Schmidt sont laborieux. Les échecs succèdent aux faux pas, les controverses aux démissions. L'usure du pouvoir n'est pas seule en cause. Car la démocratie chrétienne aussi fait les frais d'une méfiance de l'opinion publique vis-à-vis des partis politiques, attestée par les sondages et le succès des comités de citoyens.

Élections

Le parti social-démocrate a conçu toute sa campagne électorale autour de la personne d'H. Schmidt. « Le meilleur doit rester chancelier » affirme-t-il. L'Allemagne est présentée comme un modèle, pour le bon fonctionnement de ses institutions, sa paix sociale, ses réussites économiques. En face, la démocratie chrétienne est menée par H. Kohl, homme politique provincial qui fait pâle figure auprès du chancelier Schmidt. Mais H. Kohl, par sa bonhomie même, traduit bien les sentiments d'une grande partie de la population allemande, ses aspirations au calme, à la modération, à la simplicité.