De 1949 à 1976, tous les candidats chrétiens-démocrates à la chancellerie venaient des rangs de l'Union démocrate chrétienne (CDU) ; la branche bavaroise, l'Union chrétienne sociale (CSU), se contentait d'entériner les choix avec plus ou moins de bonne volonté. Le passage dans l'opposition au niveau fédéral de la CDU-CSU, en 1969, fit naître entre ces deux formations une longue querelle stratégique.

Alliance

La CDU, présidée par Helmut Kohl, considérait qu'il lui serait impossible de revenir au pouvoir à Bonn avec la majorité absolue. Il fallait donc s'entendre de nouveau avec le petit parti libéral FDP, l'ancien allié des années 50 et 60. Franz Josef Strauss, le chef de file de la CSU, prétendait au contraire que le FDP avait trouvé trop d'avantages à sa coalition avec le SPD pour revenir à l'ancienne alliance avec la CDU-CSU, du moins au niveau fédéral. Il en tirait la conclusion que la CDU-CSU devait s'assurer une majorité absolue par une campagne électorale très dure, y compris contre les libéraux, quitte à susciter la naissance d'un nouveau parti conservateur pour modifier les rapports de forces politiques en RFA, par exemple avec l'extension à l'ensemble du pays de la CSU, limitée à la seule Bavière.

Helmut Kohl, n'ayant pas réussi à détacher le FDP de son alliance avec le SPD, décide de ne pas se présenter une nouvelle fois à la candidature à la chancellerie, bien qu'il ait obtenu en 1976 un résultat très honorable (48,6 % des voix pour la CDU-CSU). Il pousse Ernst Albrecht, CDU, ministre-président de Basse-Saxe, à faire acte de candidature. Franz Josef Strauss annonce aussitôt la sienne.

Après plusieurs semaines de vives tensions, le groupe parlementaire CDU-CSU à Bonn porte finalement, le 2 juillet 1979, son choix sur Franz Josef Strauss par 135 voix contre 102 à Ernst Albrecht. Comme la CSU ne détient que 56 mandats, une bonne partie des députés CDU vote pour le rival de la petite CSU. C'est l'échec de la stratégie de Helmut Kohl et le triomphe de la ligne Strauss.

Conservatisme

Franz Josef Strauss est né à Munich en 1915, dans une famille aux origines modestes. Brillant élève, il fit des études de lettres et d'histoire pour devenir enseignant dans le secondaire. Député fédéral depuis 1949, ancien secrétaire général puis président inamovible de la CSU depuis 1961, il a été ministre dans les gouvernements Adenauer et Kiesinger. Il dirige le gouvernement de Bavière depuis 1978. Mêlé à plusieurs scandales, il se distingue aussi par des emportements oratoires parfois inquiétants. Il incarne un conservatisme dur, profondément anticommuniste et qui s'exprime par des prises de position très tranchées.

Il ne suffisait pas à Franz Josef Strauss de se faire désigner comme candidat à la chancellerie, encore fallait-il que ce choix soit accepté par les membres de la CDU-CSU et par les électeurs. Or, il faut bien reconnaître que la candidature Strauss n'a pas eu l'effet positif escompté. Le ministre-président catholique de Bavière mobilise l'électoral CSU bavarois, fier de son particularisme régional, et une bonne partie de l'électorat catholique conservateur du reste de l'Allemagne fédérale. Mais l'électorat protestant de la CDU, plus libéral, surtout dans la moitié nord du pays, reste très réservé, voire franchement hostile.

Les Verts

Les résultats des élections régionales de 1979-80 sont à cet égard significatifs. Les tendances enregistrées depuis 1978 (recul de la CDU-CSU et du FDP, montée du SPD) se sont nettement amplifiées avec la candidature Strauss. Aux élections de Brème (7 octobre), la CDU reste dans l'opposition et, avec 31,9 % des voix, elle recule de 1,8 %.

Dans le Bade-Wurtemberg (16 mars 1980), elle conserve sa majorité absolue (53,4 %), mais en concédant 3,3 % des voix. En Sarre (27 avril), elle tombe à 44 % (– 5,1 %) ; elle est dépassée pour la première fois par le SPD, mais elle reste au pouvoir grâce à son alliance avec le FDP, la seule sur le plan régional. Nouvel échec dans l'important Land de Rhénanie du Nord-Westphalie, le 11 mai, où elle recule de 3,3 % (CDU : 43,2 %, SPD : 48,4 %). Avec 4,9 % des voix, le FDP disparaît de la diète.