Les entreprises de deux secteurs — celui des constructions mécaniques et électriques, d'une part, et celui de la confection et de l'habillement, d'autre part — trouvent très difficilement la main-d'œuvre qualifiée qu'elles recherchent. Pour la mécanique et l'électricité, les difficultés ne semblent pas pouvoir être surmontées rapidement, en raison du peu de jeunes qui sont formés aux métiers correspondants, soit qu'ils répugnent à choisir un emploi industriel, soit (ce qui est plus souvent la raison) qu'ils aient été ou qu'ils soient mal orientés. Pour l'habillement et la confection, les difficultés sont apparemment passagères, les offres d'emploi ont crû en raison de l'excellente conjoncture qu'a connue ce secteur à partir des derniers mois de 1971 ; quant aux femmes — puisque c'est à elles qu'on proposait de préférence des emplois —, elles paraissent avoir opté pour des postes de travail dans des magasins à grande surface, car plusieurs d'entre eux se sont installés (ou ont développé leurs activités) en Picardie, en 1971 et 1972.

Le cas de l'Oise

L'évolution du marché du travail cache souvent une réalité plus claire. Le cas de l'Oise est exemplaire : proche de la capitale, il bénéficie au premier chef des retombées économiques de celle-ci et de leur effet d'entraînement.

Chaque année près de 2 000 à 2 500 emplois supplémentaires sont offerts, dont les sept dixièmes environ sont le fait de firmes étrangères qui se sont installées dans le département depuis le printemps 1971. Du canton de Noyon à celui de Creil, de Beauvais à Pont-Sainte-Maxence, tous les cantons urbanisés ont développé au cours des douze derniers mois leur patrimoine industriel. Deux exceptions cependant : Clermont et Méru, où créations et suppressions se sont succédé à un rythme rapide.

D'autre part, les migrations journalières de travailleurs entre Beauvais, Senlis ou Creil et Paris sont toujours nombreuses. Entre Creil et la capitale surtout : 7 000 Creillois environ quittent très tôt chaque matin les faubourgs de leur ville pour les retrouver très tard dans la soirée après avoir travaillé durant la journée à Paris.

Dans l'Oise, il est vrai, la situation du bassin de Creil est particulière. Jusqu'au début de 1972, en effet, les cinq cantons sud du département de l'Oise (dont celui de Creil) étaient considérés par les pouvoirs publics comme une zone nantie. Aussi, jusqu'à la fin de 1971, si une entreprise voulait, contre la volonté des pouvoirs publics, y investir si près de la capitale, elle devait acquitter une redevance calculée en fonction de la superficie de sa future usine. Sans qu'ait été rapportée cette mesure, elle n'est plus appliquée, du moins momentanément.

Haute-Normandie

Parallèlement à une augmentation sensible des demandes d'emploi non satisfaites en Haute-Normandie (de 5 823 en 1968 à 9 471 quatre ans plus tard), on note une progression également très sensible des offres non satisfaites (de 934 fin mars 1968 à 3 211 à la fin de mars 1972). On peut donc penser que les diverses crises de structure — fermeture des chantiers navals du Trait, dans la région rouennaise, difficultés de la pêche hauturière dans la région de Fécamp — se sont trouvées compensées par des possibilités d'emplois nouveaux.

Mais ces chiffres ne rendent pas compte d'un phénomène qui prend ici une ampleur exceptionnelle : les migrations journalières.

Chaque matin, des cars emmènent des ouvriers à 30, voire à 50 kilomètres de leur domicile, pour les ramener le soir. C'est particulièrement vrai pour l'usine de Renault-Sandouville, qui emploie une majorité de travailleurs venus soit du Havre, soit de la région d'Yvetot où aucune industrie nouvelle n'a été implantée. Ces hommes ne peuvent échapper au chômage qu'en acceptant d'ajouter à leur temps de travail deux ou trois heures de temps de transport, avec toutes les conséquences que cela peut entraîner pour la vie familiale.

Des facteurs inquiétants

L'examen plus détaillé des statistiques fait aussi apparaître d'autres facteurs pour les perspectives de l'emploi.