Encouragé par ces défaites des derniers partisans de l'inégalité des sexes, le gouvernement helvétique a décidé de soumettre aux Chambres un projet d'arrêté visant à accorder les droits civiques aux femmes sur le plan confédéral. Si le vote est positif, la Suisse verra se lever la lourde hypothèque qui l'empêche de signer sans réserve la convention européenne des droits de l'homme.

Dans un autre domaine, l'opinion a été vivement agitée par une controverse au sujet de l'opportunité d'un projet de loi émanant d'un mouvement xénophobe du canton de Zurich. Ce mouvement, qui a réuni 70 000 signatures à l'initiative d'un député zurichois, Schwarzenbach, réclame une limitation draconienne de l'immigration des travailleurs étrangers. Elle veut réduire leur nombre de 30 %, ce qui revient à expulser 300 000 personnes. Après la plupart des formations politiques et les organisations patronales, l'Union syndicale suisse, qui groupe la majorité des syndicats, recommande aux travailleurs de rejeter ces mesures « inhumaines, antisociales et nocives pour l'économie ».

Un référendum a lieu le 7 juin. La participation au vote a été de 74 %, taux particulièrement élevé. 54 % des électeurs ont rejeté les propositions Schwarzenbach. Plus de 550 000 citoyens suisses se sont quand même prononcés pour une diminution de la population étrangère. Le gouvernement confédéral est obligé d'en tenir compte. La solution de rechange, préparée depuis des mois, est appliquée sans retard. L'immigration est désormais réduite à un contingent annuel de 40 000 travailleurs étrangers. Les Suisses espèrent que leur réputation d'hospitalité n'en souffrira pas trop.

Dans la vie économique, il a fallu faire face à une certaine surchauffe, due principalement à l'augmentation des exportations. Pour freiner celles-ci, le gouvernement institue un prélèvement provisoire de 5 % sur les exportations. Cette décision, venant quelques mois après le relèvement du taux d'escompte de 3/4 de point, indique un léger malaise. Elle est parfois interprétée comme un signe avant-coureur d'une réévaluation du franc suisse.

Tchécoslovaquie

14 418 000. 112. 0,6 %.
Économie. Production (66) : A 14 % + I 73 % + S 13 %. Énerg. (67) : 5 487.
Transports. (*67) : 19 750 M pass./km, 55 781 M t/km. (*67) : 521 200 + 165 200. (*67) : 753 774 000 pass./km.
Information. (67) : 28 quotidiens ; tirage global : 4 042 000. (67) : 3 844 000. (67) : 2 600 000. (67) : 1 054 000 fauteuils ; fréquentation : 118,8 M. (67) : 1 678 717.
Santé (66). 27 096. Mté inf. (67) : *22,9.
Éducation (66). Prim. : 2 164 432. Sec. et techn. : 398 183. Sup. : 139 059.
Institutions. État indépendant le 28 octobre 1918. République populaire en 1948. Fédération depuis le 1er janvier 1969. Constitution de 1960. Président de la République : le général Svoboda, élu le 30 mars 1968. Premier secrétaire du Parti : Gustav Husak. Premier ministre : Lubomir Strougal.

Une épuration décisive

Normalisation, consolidation, épuration. Ces trois phases du retour de la Tchécoslovaquie à la plus pure orthodoxie soviétique sont pratiquement terminées au début de l'été 1970.

Alexandre Dubcek est le dernier à plonger dans cet enfer auquel ont été voués tous les artisans du printemps libéral. Son exclusion du PC a fait l'objet d'âpres marchandages entre les réalistes qui, comme Gustav Husak, le chef du parti, ne veulent pas aller trop loin, et les ultras, comme Lubomir Strougal, chef du gouvernement, pour lesquels l'épuration n'est jamais satisfaisante si elle ne débouche pas sur des procès. « Nous ne nous abaisserons jamais à faire des procès fabriqués », répète inlassablement Husak, sans parvenir d'ailleurs à en convaincre la population.

Les libéraux ont été épurés en deux temps : d'une manière lente et circonspecte avant le 21 août 1969, d'une manière rapide et brutale après. Une fois de plus, en Tchécoslovaquie, ce sont les manifestations de leurs partisans qui ont précipité la chute des progressistes. Quelques jours avant le premier anniversaire de l'invasion soviétique, la grande peur de l'imprévisible domine déjà les réactions des hommes au pouvoir et de ceux de l'opposition. Le président Svoboda menace : « Les provocateurs recevront une réponse énergique. » Dubcek, qui est encore membre du présidium du parti, supplie : « Il serait tragique que certains citoyens fassent le jeu des aventuriers. » Ni l'un ni l'autre ne seront écoutés.