Des autres promus, il faut retenir le nom de Nikolaï Tokhonov, 73 ans, premier vice-président du conseil des ministres et d'Edouard Chevarnadzé, 51 ans, premier secrétaire du PC de Géorgie, élus tous deux membres suppléants du bureau politique, et de Mikhaïl Gorbatchev, 47 ans, élu secrétaire du Comité central. Trois hommes qui, à des titres divers, peuvent être considérés, eux aussi, comme des fidèles de Brejnev.

Ce dernier n'oublie d'ailleurs pas non plus sa famille : le 16 mars, le fils du secrétaire général du PC, Youri Brejnev, 45 ans, est nommé premier vice-ministre du commerce extérieur.

Limogeage et remaniement

Parallèlement à ces nominations, on assiste à des limogeages en série. Leonid Brejnev est mécontent des résultats économiques et, lors du plénum du 27 novembre, il ne mâche pas ses mots. Il dénonce les insuffisances du Gosplan et de l'administration, demande des sanctions contre toutes les « personnes coupables de négligence » et affirme la nécessité qu'il y a de poser « à temps et résolument le problème de la responsabilité personnelle des ministres et des dirigeants ».

Première victime de la charrette annoncée : Cyrille Mazourov, 65 ans, un des principaux responsables de l'économie. Donné longtemps comme successeur possible — mais non rival — d'Alexis Kossyguine à la tête du gouvernement, il est démis de son poste de membre du bureau politique et de ses fonctions de premier vice-président du gouvernement. Bien qu'officiellement ce soit « pour raisons de santé et à sa demande », il fait nul doute qu'il s'agit là d'un limogeage pur et simple. Promu sous Khrouchtchev, sa carrière ne devait rien à Brejnev. Ce qui ne pardonne pas. Alexandre Chelepine, Dimitri Polianski et Nicolaï Podgorny, grands limogés des dernières années, peuvent en témoigner : ils étaient atteints de la même tare !

De nombreux remaniements ont lieu à tous les niveaux, et notamment à la tête des organes régionaux du parti et de l'administration d'État, aussi bien en Ukraine qu'en Arménie, au Kazakhstan, dans les Républiques baltes, en Sibérie, en Kirghizie, en Géorgie, etc. Plusieurs dirigeants locaux ou régionaux du PC perdent leur poste.

Ces limogeages en chaîne ne manquent pas d'étonner, car, jusqu'à une date récente, Leonid Brejnev semblait avoir fondé son pouvoir sur la stabilité des cadres locaux du parti. Mais, comme l'écrit la Pravda, « l'orientation vers la stabilité ne veut pas dire du tout que l'on doive maintenir n'importe qui à son poste ». Les carences économiques — déjà constatées en 1977 — ont semblé trop importantes cette fois à Leonid Brejnev pour passer outre.

Carences économiques

Au cours du plénum du Comité central des 3 et 4 juillet et de fin novembre, il reproche longuement leur inefficacité aux organes économiques centraux, aux ministères, aux départements. En novembre, il déclare : « Le bureau politique a jugé nécessaire de faire contrôler plus strictement l'exécution des décisions prises. » Le 2 mars, dans son discours électoral prononcé à l'avant-veille du renouvellement du Soviet suprême, il stigmatise de nouveau « l'esprit formaliste et démocratique, la force routinière de l'inertie » et critique les insuffisances de la situation économique marquée seulement par une augmentation de 4 % de la production nationale par rapport à 1977.

Seul secteur relativement favorisé : l'agriculture. Excepté une mauvaise récolte de coton (8,5 millions de t, soit moins 3 %), la récolte 1978 de céréales est excellente. Avec 235 millions de t (contre 195,5 millions en 1977), elle dépasse largement le chiffre record de 1976 (224 millions). Les perspectives pour 1979 sont nettement moins bonnes : environ 190 millions de t.

Par ailleurs, des problèmes subsistent : retard dans la mise en œuvre des nouvelles technologies, gaspillage des combustibles, mauvaise utilisation des engrais qui se perdent, capacité de stockage insuffisante, manque de moyens de transport. Ce qui explique que, malgré cette récolte céréalière record, la croissance n'a été que de 4 % et que l'approvisionnement des consommateurs laisse toujours à désirer, surtout en province.