Les craintes des retombées de l'affaire Filbinger pour la CDU et les évolutions qui se dessinaient au sein du parti libéral et du mouvement écologiste transformèrent en véritable test national les élections régionales de Hesse du 8 octobre. Dans cette place forte traditionnelle de la social-démocratie, un échec du SPD et de son allié aurait eu des conséquences catastrophiques pour le gouvernement de Bonn. La partie semblait d'autant plus sérieuse que l'opposition, dirigée par l'homme choc de la CDU, Alfred Dregger, connaissait une ascension continue depuis quelques années. Or, surprise, les résultats révélèrent une étonnante stabilité : la coalition sortante maintenait ses positions avec 57 sièges (le SPD en gagne 1, le FDP en perd 1), la CDU ne progresse pas en sièges mais régresse en pourcentage de voix. Devenus suspects à cause de leurs divisions et de leur gauchisme, les écologistes ne dépassent pas 2 % des voix.

Le gouvernement fédéral sortait consolidé de cette épreuve et la démocratie chrétienne découvrait que la phase de son expansion s'achevait. Une semaine plus tard, aux élections de Bavière, la CSU conservait certes sa forte majorité absolue (59,1 % des voix), mais en perdant trois points, pendant que le SPD (+ 1,2 %) et le FDP (+ 1 %) progressaient. Ces élections apportèrent un changement intéressant au sein du personnel politique. Considérant sans doute que la CDU-CSU aurait peu de chances de revenir au pouvoir à Bonn, l'ancien ministre fédéral Franz Josef Strauss, le bouillant président de la CSU bavaroise, décida de succéder à A. Goppel à la direction du gouvernement de Bavière. L'étroite imbrication entre politique fédérale et politique régionale était démontrée une fois de plus.

Aucun changement notable n'était attendu des élections du 18 mars 1979. Le SPD et le FDP continuent de gouverner à Berlin-Ouest : les sociaux-démocrates ont obtenu le même résultat que quatre ans plus tôt et le FDP progresse d'un point. Malgré un engagement intensif, la CDU n'augmente que de 0,5 % (44,4 % des voix). Après l'éclipse de l'automne, les écologistes réapparaissent avec 3,7 % des voix. Les résultats de Rhénanie-Palatinat furent moins favorables à la CDU, qui conserva de justesse sa majorité absolue (50,1 %) mais en concédant 3,8 % des voix, pendant que le FDP en gagnait 0,7 % et le SPD 4,7 %. Le même scénario se reproduisait presque le 23 avril au Schleswig-Holstein. À mille voix près, la CDU maintenait tout juste sa majorité absolue, le SPD enregistrait une forte poussée, mais le FDP reculait.

Succès fragile

La série des consultations ouvertes en juin 1978 tournait ainsi à l'avantage du SPD (gain total : + 1,2 %), mais son partenaire libéral accusait une perte (– 0,9 %), encore plus accentuée chez leur adversaire CDU-CSU (– 1,9 %). La bonne tenue du SPD s'explique largement par la popularité de son chancelier Helmut Schmidt, qui a su donner à l'Allemagne fédérale une assise économique et sociale saine, malgré la crise mondiale, pendant que le pays affirmait ses positions sur le plan extérieur. Malgré tout, son succès reste fragile dans la mesure où son indispensable allié libéral, le petit FDP, se retrouve souvent à proximité de la barre fatidique des 5 %. Le recul assez net de la CDU traduit la situation assez inconfortable de la démocratie chrétienne en RFA : elle est forte, mais pas assez pour revenir seule au pouvoir à Bonn. Le président de la CDU, Helmut Kohl, s'est usé dans cette vaine course-poursuite, donnant des armes supplémentaires à son rival bavarois Franz Josef Strauss, qui annonce, fin juin 1979, sa candidature à la chancellerie pour les élections fédérales de 1980. La CDU-CSU se trouve divisée sur la stratégie à employer pour revenir au pouvoir, dans un régime dont la stabilité est une des principales caractéristiques.

Malgré ses déboires, la CDU-CSU a réussi à faire élire un des siens, Karl Carstens, à la présidence de la République. Grâce aux bons résultats qu'elle avait obtenus aux élections fédérales de 1976 (premier parti du Bundestag) et aux élections régionales précédentes, elle détenait en effet la majorité absolue dans le collège électoral (les membres du Bundestag et un nombre égal de représentants des Länder choisis à la proportionnelle par les diètes régionales) chargé d'élire le président de la République. Comme le président sortant, Walter Scheel, FDP, ne voulait pas prendre le risque d'être battu, il préféra ne pas briguer le second mandat prévu dans la Constitution.