Une croissance économique sans inflation : telle est, en tout cas, l'une des grandes lignes du programme que définit le président Ford en présentant, le 21 janvier, au Congrès, son projet de budget 1976-1977. Les dépenses (394,2 milliards de dollars) sont en augmentation de 5,5 % sur l'année fiscale en cours ; les recettes, chiffrées à 351,3 milliards de dollars, en hausse de 25 %. Le déficit, qui s'établit à quelque 43 milliards de dollars, est en baisse de 43,5 % par rapport à 1976.

Cependant, ce budget est jugé trop conservateur par les démocrates. Ils considèrent notamment que les allégements fiscaux recommandés (10 milliards de dollars) et les mesures visant à encourager les investissements privés font la part trop belle aux contribuables aisés des classes moyennes.

CIA-FBI

À grand renfort de publicité et de slogans, les États-Unis célèbrent tout au long de l'année le 200e anniversaire de leur accession à l'indépendance. Créée par le gouvernement pour coordonner l'ensemble des activités commémoratives dont le coup d'envoi a été donné dès le printemps de 1975, l'Administration du bicentenaire de la révolution (ARBA) enregistre déjà, en octobre, plus de 27 000 projets de cérémonies. Les festivités, dont le point culminant se situera le 4 juillet 1976, deux siècles jour pour jour après le rejet de la tutelle coloniale de la Grande-Bretagne, sont centrées autour de trois grands thèmes : « Souvenons-nous » (de nos pères fondateurs, de nos libertés, des événements de notre patrie), « célébrons » (la vitalité de notre culture, notre hospitalité, les traditions de notre peuple) et « construisons l'avenir » (en nous donnant dès aujourd'hui de nouveaux buts).

Pourtant, la population américaine est plus portée à la morosité qu'à l'enthousiasme. Deux tentatives d'assassinat commises coup sur coup contre Gerald Ford lui montrent que la violence, loin de régresser, continue à se manifester sous les formes les plus insidieuses : le 5 septembre, à Sacramento, capitale de la Californie, une déséquilibrée de 26 ans. Lynne Fromme, disciple de Charles Manson, est arrêtée alors qu'elle s'apprêtait à tirer sur le chef de l'État. Dix-sept jours plus tard, nouvel attentat manqué : Sarah Moore, extrémiste de gauche de 46 ans ayant travaillé comme indicatrice pour le FBI, fait feu en direction du président, alors que celui-ci répondait aux applaudissements de la foule massée devant son hôtel.

Autres motifs de malaise : les innombrables révélations faites sur les agissements peu orthodoxes d'institutions telles que la CIA ou le FBI, et les manœuvres corruptrices de certaines grandes compagnies. Semaine après semaine, la presse lève le voile sur un nouveau scandale.

Pour sa part, la commission d'enquête du sénat, qui ne s'est pas contentée du rapport publié en juin 1975 par la commission Rockefeller (Journal de l'année 1974-75), poursuit, sous la présidence de Frank Church, ses travaux sur les services de renseignements. Une commission de la Chambre des représentants, dirigée par Otis Pike, en fait autant.

Finalement, le 28 avril, la commission Church rend public un long document de 396 pages dont les principales indications sont les suivantes : des personnalités gouvernementales, républicaines et démocrates, ont, à tous les niveaux, pris part en connaissance de cause à des activités politiques illégales. Les présidents, depuis Franklin Roosevelt, les membres du cabinet et ceux du Congrès ont requis ou accepté des informations politiques compilées par le FBI sur leurs opposants ou critiques.

Le FBI, la CIA, l'IRS (administration des impôts), les agences de renseignements de l'armée ont constitué des dossiers sur un demi-million de citoyens américains, ouvert 200 000 lettres, intercepté des millions de télégrammes, établi une liste noire (mise à jour jusqu'en 1975) de 26 000 personnes à arrêter en cas de situation d'urgence, soumis des centaines de personnes à des campagnes de harcèlement visant à détruire leur réputation et, dans certains cas, à les acculer au suicide.