Biens d'équipement : la demande étrangère est stable, la demande globale est en très nette augmentation ainsi que la production. La durée du travail a augmenté et si les effectifs sont restés stables, ils sont prévus en augmentation.

Biens intermédiaires : si la demande étrangère est en très nette augmentation la demande globale est stationnaire, à un niveau normal. Les effectifs progressent légèrement alors que la durée du travail diminue.

Biens de consommation : demande globale et production se stabilisent à un niveau élevé. La progression des effectifs est freinée par le manque de main-d'œuvre qualifiée, dans des industries comme l'habillement.

Cependant, par suite du déclin des industries traditionnelles, celle du cuir notamment, l'économie du Limousin reste fragile et ressent les secousses avec plus d'acuité que le reste du pays. Les demandes d'emploi vont surtout vers le secteur tertiaire, alors que c'est le secondaire qui est demandeur. De plus, l'Agence de l'emploi constitue un outil encore trop méconnu des industriels, qui ne s'adressent à elle qu'en dernier ressort après avoir épuisé les canaux traditionnels comme les petites annonces.

Tout autant que la formation professionnelle, dont les centres se multiplient, l'information paraît nécessaire tant de la part des enseignants que des employeurs et des parents. Il s'agit de faire disparaître les facteurs psychologiques tendant à préférer les manches de lustrine au bleu de travail ou aux blouses blanches. À cet égard, l'opération portes ouvertes réalisée dans les principales entreprises de Limoges par le patronat pour les enfants des écoles est intéressante. Il n'en reste pas moins que demeureront longtemps des réticences pour certains métiers et que dans d'autres (la bonneterie, par exemple) les femmes continueront à refuser de faire des heures supplémentaires : elles recherchent un salaire d'appoint et ne veulent pas perturber leur vie familiale.

Ces réticences expliquent l'élargissement de la population étrangère. De 11 203 habitants en 1966, elle est passée en 1971 à 18 742. Les Portugais arrivent en tête (11 258) devant les Espagnols (3 547) et les Italiens (1 453). La Corrèze compte à elle seule 10 774 étrangers. C'est dans le forestage et les industries du bois que l'on enregistre le plus grand nombre de salariés portugais (1 750 contre 550 dans le bâtiment et les travaux publics).

Bien accueillie par la population dans les bourgs de la Corrèze où elle dispose d'un habitat normal et parvient à s'intégrer, cette immigration très limitée ne suscite pas de protestation.

Cependant, à Limoges, le préfet a pris la décision d'interdire aux entreprises l'embauche d'une main-d'œuvre étrangère qui n'aurait pas été préalablement logée. Trop d'immigrés étaient exploités par des marchands de sommeil qui leur louaient des taudis au prix fort. Et cela avait entraîné une certaine perturbation dans le centre de la ville.

Un ghetto économique

Le Limousin souffre surtout de son enclavement. La création d'un aéroport de classe B à Limoges, qui commence à fonctionner, ne suffira pas à résoudre tous les problèmes. Les relations ferroviaires avec l'Ouest (Bordeaux) et l'Est (Clermont-Ferrand et Lyon) sont exécrables et les voies routières constituent la principale préoccupation des élus et des pouvoirs publics.

Le député-maire de Limoges, Louis Longequeue, a poussé un cri d'alarme : « La transformation de la nationale 10 Paris-Poitiers en voie autoroutière aura pour conséquence de faire déserter la nationale 20 Paris-Limoges-Brive-Toulouse, si elle n'est pas rapidement mise en état de recevoir une circulation qui se heurte actuellement à des insuffisances diverses et notoires, notamment au sud de Limoges. De plus, si l'apport touristique des régions de l'Est (Suisses, Allemands ou Lyonnais) est relativement faible malgré l'attrait des côtes atlantiques et les gros efforts déployés par les responsables du tourisme en Limousin, la raison essentielle en est dans l'allure trop lente de nos moyens de liaison est-ouest. » On retrouve la même préoccupation pour la Creuse et la Corrèze, où l'on s'occupe activement, au sein de l'association pour la route Centre-Europe-Atlantique, de promouvoir la réalisation d'une grande transversale passant par le nord du Massif central. Digoin et Limoges constitueraient les grands points d'éclatement de cet axe transversal qui s'avère vital pour que le centre de la France ne demeure pas une sorte de ghetto économique et que l'Ouest ne continue pas à dépérir, victime d'une sorte de muraille de Chine.