Afrique

De nouveau rejetée dans une position marginale

Si, durant les six derniers mois de l'année 1966, l'Afrique noire a conservé une place de premier plan dans l'actualité internationale, elle est brusquement retournée au dernier rang au cours des six premiers mois de l'année 1967. Il est vrai que la crise du Moyen-Orient, dont la guerre israélo-arabe du mois de juin ne constitue qu'un des aspects, préoccupe toutes les capitales.

Les caractéristiques de cette année sont essentiellement les suivantes : persistance de l'instabilité politique interne des nouvelles républiques négro-africaines, ralentissement général du mouvement d'accession à l'indépendance en dépit de la poursuite de l'agitation nationaliste, multiplication des conflits interafricains, recul de l'influence des États africains hors du cadre continental et, parallèlement, diminution de l'intérêt porté par les grandes puissances à tout ce qui concerne l'Afrique.

L'ère d'instabilité intérieure ouverte en janvier 1963 à Lomé par l'assassinat du président de la République du Togo Sylvanus Olympio, par des sous-officiers placés en demi-solde, est loin d'être close. Inconscients ou ignorants du danger qui pouvait en résulter pour eux, les hommes politiques d'Afrique s'étaient empressés de se doter d'armées nationales, destinées dans leur esprit à constituer un des attributs majeurs de leur souveraineté récemment acquise. Or, ces armées représentant dans la majorité des États la seule force cohérente, leurs chefs ont, soit de leur propre initiative, soit sous la poussée des masses populaires, commencé à prendre la relève des civils. Actuellement, un chef d'État africain sur quatre est un militaire.

Le courant de décolonisation amorcé par la Grande-Bretagne en 1958 connaît un net ralentissement. Certes, le 30 août 1966, le Bechuanaland devient indépendant et prend le nom de Botswana, tandis que, plus tard, le Basutoland accède dans les mêmes conditions à la souveraineté internationale, sous le nom de Lesotho. Mais la dégradation générale de la situation dans les pays nouvellement indépendants encourage les dernières puissances coloniales — l'Espagne et le Portugal notamment — à faire face, au besoin par les armes, aux revendications nationalistes.

Le succès des 200 000 colons blancs de Rhodésie, la République sud-africaine, qui renforce sa politique d'apartheid, incitent les partisans du maintien de la domination blanche dans la partie méridionale de l'Afrique à rester intransigeants. Cependant, la France, qui, à Djibouti, possède une dernière enclave africaine, cède à la pression nationaliste et consent à accorder un statut d'autonomie à la Côte française des Somalis, devenue en juin 1967 le Territoire des Afars et des Issas. La fièvre nationaliste n'épargne aucune région d'Afrique, fût-ce les îles : en janvier 1967, les dirigeants de l'archipel des Comores exigent du gouvernement français une plus large autonomie.

Malgré leur appartenance commune à l'Organisation de l'unité africaine (OUA), créée en mai 1962 à Addis-Abeba, les États d'Afrique continuent de s'opposer les uns aux autres, notamment dans d'inextricables querelles frontalières. L'Algérie et le Maroc, le Soudan et le Tchad, la République Somalie et l'Éthiopie d'une part et le Kenya d'autre part, ont un contentieux territorial. L'esprit panafricain marque le pas et le sommet de l'OUA, tenu en novembre 1966 à Addis-Abeba, ne réunit que 20 des 38 chefs d'État membres de l'Organisation.

On comprend, dans ces circonstances, que l'audience internationale de l'Afrique entre dans une phase décroissante. Récemment encore très écoutés à l'Organisation des Nations unies, les représentants des nouvelles nations africaines sont de plus en plus isolés. Après avoir été, dans le cadre de la guerre froide notamment, le théâtre d'âpres rivalités internationales, l'Afrique donne l'impression d'être à nouveau abandonnée à elle-même. La concurrence soviéto-américaine fait long feu, et la Chine communiste elle-même ne manifeste désormais qu'un intérêt médiocre pour le continent africain, où elle a pris pied avec difficulté. Le progrès des thèses cartiéristes non seulement en France et en Grande-Bretagne, mais en Allemagne et aux États-Unis, la dégradation accentuée des termes de l'échange entre le reste du monde et l'Afrique semblent condamner cette dernière à une phase d'isolement momentané. C'est surtout en fonction des événements qui auront lieu hors du continent noir que l'opinion mondiale s'intéressera désormais aux États africains. Ainsi, indifférentes à l'éclatement de la Fédération du Nigeria, dont l'importance est cependant capitale, les chancelleries mondiales suivront, en revanche, très attentivement les réactions de l'Algérie et tireront avec soin les leçons de la neutralité des dirigeants noirs dans la crise du Moyen-Orient de l'été 1967.

Algérie

(60) : 10 784 309. 5. 0,9 %. Consomm. énergie : *275 kg e.c.
Transports. Rail : 556 M pass./km, 960 M t/km. Parc autos : 207 000 + 92 500. Aviat. civ. : 254 799 000 pass./km.
Information. Journaux (63) : 7 quotidiens. Récepteurs radio (63) : 1 500 000. Téléviseurs : 100 000. Cinéma (59) : 479 salles, fréquentation (60) : 29,2 M. Postes téléphone : 139 473.
Santé (63) : 1 319 médecins.
Éducation. Prim. : 1 230 561. Sec. et techn. : 101 616. Sup. : 6 888.
Institutions. État indépendant le 3 juillet 1962. République proclamée le 25 septembre 1962. Constitution de 1963. Président du Conseil de la révolution et chef de l'exécutif : colonel Houari Boumediene, auteur du coup d'État qui renverse Ben Bella le 19 juin 1965. Parti unique : FLN (Front de libération nationale).

En deux ans, Boumediene a consolidé son pouvoir politique

Le colonel Boumediene est parvenu à faire admettre son socialisme austère aux Algériens.