– Relève par les vieux, réhabilités après la révolution culturelle. Ainsi, deux anciens vice-Premiers ministres et membres du bureau politique, Ulanfu et Tan Chen-lin, réapparaissent au 10e congrès. Peu après le retour d'un autre personnage clef de même rang, dénoncé comme « renégat no 2, complice de Liou », rescapé, en 1967, d'une tentative de suicide : Teng Hsiao-ping, réélu d'abord au comité central, puis officiellement réintégré au nouveau bureau politique le jour même où il annonce la réduction des activités du vieux Chou En-lai. Alors que lui-même, âgé de 70 ans, est son cadet de six années.

– Relève par les militaires loyaux au régime. À trois niveaux : à la tête de l'armée, à la tête du parti (au bureau politique et même au comité permanent) et à la tête de certaines provinces plus ou moins transformées en royaumes indépendants par de nouveaux seigneurs de la guerre ; en janvier 1974, permutent d'un coup le commissaire politique de l'APL et 7 des 11 chefs de régions militaires. Aussitôt après ce remaniement spectaculaire, l'armée est détournée de ses nostalgies lin-piaoïstes par une tâche qui l'oblige à prouver son efficacité : un commando de 400 hommes et 11 bateaux de guerre équipés d'engins téléguidés nettoient quelques îlots de l'archipel des Paracels où des unités sud-vietnamiennes viennent de planter leur drapeau. Quelques jours plus tard, les Chinois victorieux libèrent 6 prisonniers, dont un conseiller américain.

Les États-Unis s'empressent de proclamer leur neutralité. Mais Moscou condamne Pékin, qui « refuse la solution pacifique des négociations ». Et la Chine réaffirme sa souveraineté sur 150 îlots des archipels de mer de Chine (notamment les Paracels et les Spratly) dont certains sont occupés par des soldats de Formose ou de Manille. Secteur chaud dont l'utilité stratégique se double d'un intérêt économique : c'est une zone convoitée de recherches pétrolières.

– Relève, enfin, par les jeunes, les nouveaux venus quadragénaires entrés au bureau politique : représentants de diverses nationalités, responsables provinciaux qui renforcent le centralisme du pouvoir jamais vraiment réalisé, ouvriers et paysans modèles dont une simple ouvrière du textile qui remplace Yeh Chun, épouse de Lin Piao, disparue avec lui. Et, surtout, les trois hommes forts du groupe de Chang-hai qui ont joué un rôle capital dans la neutralisation du complot contre Mao et le maintien du régime : Chang Chun-chiao, Yao Wen-yuan et, loin devant eux, Wang Hong-wen dont l'étonnante promotion devient officielle après le très bref 10e congrès du parti communiste ; quatre jours (du 24 au 28 août 1973) au lieu de vingt-quatre jours pour le précédent en 1969, au cours duquel s'étaient affrontés les clans au lendemain de la révolution culturelle.

À l'époque, à défaut de se faire élire président de la République (c'était son ambition, affirme-t-on maintenant), Lin Piao réussit à se faire nommer « successeur désigné » de Mao. Cinq ans plus tard, il est avec Chen Po-ta, ex-no 1 de la révolution culturelle, la cible du 10e congrès, qui les condamne tous deux et élit au comité central 139 membres nouveaux sur 319 et vote à l'unanimité les deux grands rapports : celui sur la politique, présenté par Chou En-lai (qui donne une version détaillée du complot), et celui de Wang Hong-wen sur les nouveaux statuts du parti.

Les nouveaux dirigeants

Bureau politique : les 25 membres élus après le 10e congrès :
Mao Tsé-toung, président du Comité central.

5 vice-présidents : Chou En-lai, Premier ministre ; Wang Hong-wen, vice-président du comité révolutionnaire de Chang-hai ; Kang Sheng, membre du groupe de la révolution culturelle ; Ye Chien-ying, maréchal, vice-président du comité des Affaires militaires du Comité central, fait fonction de ministre de la Défense (après la disparition de Lin Piao) ; Li Te-sheng, nouveau commissaire politique de l'armée.

Le comité permanent. Avec le président et les cinq vice-présidents, trois autres membres : les deux doyens, âgés tous deux de 88 ans, Chu Teh, maréchal, président du comité permanent de l'Assemblée nationale populaire, et Tung Pi-wu, président de la République par intérim. Et Chang Chun-chiao, président du comité révolutionnaire de Chang-hai, chef adjoint du groupe de la révolution culturelle.