La progression des dépenses est moins due jusqu'à présent à l'augmentation du nombre des personnes âgées qu'à des modifications de la réglementation dans un sens plus favorable, comme l'abaissement de l'âge du droit à la retraite, la revalorisation des pensions et l'allongement des carrières. En termes réels (hors inflation), le montant par personne a été multiplié par 2,5 dans les pays de l'OCDE. Dans beaucoup de pays, le montant moyen de la retraite nette (cotisations sociales et impôts déduits) par rapport au salaire moyen net a fortement augmenté. C'est aux Pays-Bas qu'il est le plus élevé (90 % environ).

Les difficultés économiques ont contribué à gonfler les dépenses. Le chômage a poussé à des départs anticipés, particulièrement aux Pays-Bas, en Belgique, en Grande-Bretagne et en Espagne. Les taux d'activité des personnes âgées ont baissé entre 1950 et 1985 ; la proportion d'hommes de 65 ans et plus encore actifs est devenu marginale (moins de 10 %), sauf aux États-Unis (où elle avoisinait encore les 20 % en 1985) et au Japon (où elle restait proche de 40 %) ; celle des 55-64 ans encore actifs est revenue au-dessous de 70 % aux États-Unis, au Canada et en Grande-Bretagne, au-dessous de 60 % en Allemagne fédérale, à 50 % en France et en Italie.

Les dépenses sont appelées à croître encore par le vieillissement de la population, l'arrivée à l'âge de la retraite des générations du baby boom coïncidant avec la réduction de la population d'âge actif. En 1980, trois des vingt-quatre pays de l'OCDE comptaient 15 % de personnes de 65 ans ou plus ; vers 2010, seize seront dans cette situation et trois en approcheront ; en 2030 la proportion ne sera inférieure à 18 % qu'en Irlande et en Turquie et dépassera 20 % dans la majorité des pays. Mais l'allongement des carrières va aussi accroître les dépenses les régimes de retraite, constitués pour la plupart entre 1950 et 1970, n'atteignant leur maturité que vers la fin du xxe siècle.

Aussi a-t-on déjà cherché à limiter les dépenses La méthode la plus usitée a consisté, comme en France, mais souvent trop tôt, à modifier les systèmes de revalorisation annuelle voire à retarder purement et simplement les revalorisations prévues

Le report de l'âge de la retraite, envisagé dans beaucoup de pays, a été décidé aux États-Unis en 1983 ; il sera porté progressivement de 65 à 67 ans entre 2003 et 2027, à raison de deux mois chaque année. Parallèlement, le montant de la pension sera ramené de 80 % à 70 % du taux plein en cas de départ à 62 ans ; on a proscrit toute limite d'âge à l'exercice d'une activité professionnelle. Enfin un relèvement du taux de la cotisation a été programmé jusqu'en 1990.

Bibliographie
Jean-Pierre Dumont, Les Systèmes étrangers de sécurité sociale, 2e édition, Economica, 1988.
OCDE, La Réforme des régimes publics de pension, 1988.

Ralentir la progression

Le gouvernement Chirac avait envisagé d'inciter les salariés à retarder leur âge de départ en donnant un « bonus » à ceux qui partiraient après 60 ans (en prenant alors en compte plus que les 37 années et demi de cotisations normales) ; c'était possible dans certaines limites, sans augmenter les charges de l'assurance-vieillesse. Mais les études n'ont pas débouché. En 1988, on s'est contenté de rendre possible une « retraite progressive », permettant à ceux qui le désirent de réduire leur durée de travail et de toucher une retraite partielle. L'effet de la mesure est encore inconnu, mais il sera peu visible à court terme.

Le recours à la capitalisation ne peut être sérieusement envisagé : pour arriver à distribuer des pensions d'un montant équivalent aux retraites actuelles, il faudrait constituer un capital énorme, et pour cela payer deux fois. En fait, les assureurs ou les établissements financiers eux-mêmes, qui ont multiplié les produits de capitalisation au cours des dernières années et axé leur publicité sur « la chute des retraites », visent une frange précise des actifs, ceux qui, comme les cadres supérieurs ou les travailleurs indépendants, ont durablement une marge de revenu disponible pour compléter leur pension. Ces différentes formules d'« épargne-retraite » ont rencontré un succès certain au cours des dernières années, indépendamment du système institué sous ce nom en 1987 par le gouvernement. Certains économistes suggèrent de permettre au régime général de constituer des réserves, ce qui lui donnerait la possibilité de « lisser » les évolutions dans l'avenir.