Globalement, on peut noter un très timide essai de libéralisation, freiné par l'armée. La démocratisation ne peut s'effectuer que très lentement, avoue d'ailleurs le Premier ministre, qui, avec son équipe, se consacre aux problèmes économiques, laissant les questions d'ordre et de sécurité aux militaires représentés par le général Evren, aujourd'hui président élu de la République. Une grande partie de l'opinion, exaspérée par le manque de libertés, patiente cependant. Car elle se souvient des années précédant le coup d'État de 1980, où le terrorisme de droite et de gauche faisait une vingtaine de morts par jour et où chacun se sentait menacé. Aucun des problèmes qui avaient engendré ce terrorisme n'est en effet résolu : ni l'exigence kurde d'une autonomie qui ressemble fort à une indépendance, ni les revendications arméniennes, ni les difficultés économiques.

Si Turgut Ozal gagne son pari et si son choix d'un « développement rationnel » n'entraîne pas une paupérisation croissante de la population, la Turquie peut espérer un véritable retour à la démocratie. Mais, pour gagner ce pari, il lui faut à la fois du temps et la paix dans la rue.

Kenize Mourad