L'hodjatoleslam Rafsandjani affirme notamment dans une interview fort remarquée que « toutes les portes ne sont pas fermées avec la France ». Il laisse également entendre que l'Iran n'exclut plus la « voie diplomatique » pour arrêter la guerre du Golfe. Le président du Parlement iranien estime qu'un rapprochement avec Paris est possible si la France met fin à son soutien à l'opposition iranienne et assure le remboursement des avoirs iraniens dans l'Hexagone, soit 1 milliard de dollars prêtés par le chah à la société d'enrichissement de l'uranium, Eurodif.

Ces deux problèmes sont abordés début juillet, au cours de la discrète visite effectuée à l'Élysée par Sadegh Tabatabaï, un des proches de l'imam. L'ouverture diplomatique se concrétise au cours de la dernière semaine de juillet par le voyage officiel — le premier en République islamique d'un ministre des Affaires étrangères d'un pays de la CEE — de Hans Dietrich Genscher, le chef de la diplomatie ouest-allemande. Ce dernier affirme à l'issue de sa visite que Téhéran est prêt à un dialogue politique avec l'Occident, et invite ses collègues de la Communauté européenne à renouer avec l'Iran.

Désaccords

De profondes divergences subsistent cependant dans les milieux dirigeants de Téhéran sur la stratégie à suivre pour mettre un terme à la guerre du Golfe et sur l'opportunité de l'ouverture en direction des pays occidentaux. L'affaire du Boeing d'Air France détourné début août sur l'aéroport de Téhéran semble, dans ces conditions, constituer une tentative de la part des jusqu'au-boutistes du clergé iranien de torpiller l'ouverture vers l'Ouest et d'affaiblir les positions de l'hodjatoleslam Rafsandjani et de ses amis qui ont tout récemment encore consolidé leur pouvoir au Majlis et dans le pays, à la suite des élections législatives. Dans cette hypothèse, le détournement du Boeing d'Air France et l'attentat à l'explosif qui fait, le 23 août, plus d'une vingtaine de morts en plein centre de Téhéran ne seraient qu'une nouvelle péripétie de la lutte pour le pouvoir, qui se poursuit sans répit depuis la création de la République islamique entre partisans et adversaires de la ligne de l'imam.

Les élections législatives qui ont eu lieu en avril et mai pour le renouvellement du Majlis confirment la prédominance de la tendance progressiste du clergé, dont les principaux chefs de file sont l'hodjatoleslam Rafsandjani et le Premier ministre Moussavi, ainsi que l'échec spectaculaire de certains des représentants du clan des conservateurs. En décidant de solliciter en août la confiance du nouveau Majlis, alors qu'une telle procédure n'est pas prévue par la Constitution islamique, le Premier ministre a voulu donner une plus grande liberté de manœuvre au gouvernement, qui était obligé, au cours de la précédente législature, de guerroyer en permanence contre ses détracteurs installés au Parlement.

Après avoir éliminé du Majlis les six députés du groupe des libéraux de Mehdi Bazargan qui, soumis à de multiples pressions, ont boycotté la consultation électorale, les deux principales tendances du clergé se trouvent désormais face à face et semblent avoir engagé les grandes manœuvres en vue de la bataille pour la succession de l'imam Khomeiny, qui a eu, vers la mi-juillet, une grave alerte cardiaque.

La guerre du Golfe

15 février : Mettant fin à une relative accalmie de près de trois mois, les forces iraniennes lancent une attaque massive sur le front du centre, dans le saillant de Mehran. Cette opération, présentée comme la cinquième phase de l'offensive Aurore déclenchée au printemps 1983, est suivie, le 21 février, d'une nouvelle attaque de plus grande envergure dans les secteurs de Bostan et de Qournah (Aurore VI), dont l'objectif semble être de couper la route Bagdad-Bassorah sur plusieurs points.

20 mars : Fin de l'opération Aurore VI qui n'a guère été concluante, puisqu'elle n'a abouti qu'à la création, au prix de lourdes pertes, d'une tête de pont localisée à l'intérieur du territoire iraqien, dans la région des marais à Majnoun, une presqu'île artificielle d'environ 60 km2, dont le sous-sol recèle le sixième des réserves pétrolières de l'Iraq.