Le monde politique, lui, est encore tout abasourdi du triomphe remporté par le leader du nouveau parti social-démocrate (SDP), Roy Jenkins, à l'élection partielle de Glasgow-Hillhead, pourtant fief conservateur. L'irrésistible montée du SDP, voilà apparemment, au seuil de sa troisième année de pouvoir, la vraie menace pour Margaret Thatcher.

Confetti

L'épreuve pourtant vient d'ailleurs. D'un des derniers confettis de l'Empire perdu dans les mers australes. Le débarquement des forces argentines aux îles Falkland le 1er avril prend le gouvernement britannique de surprise. Et sa première conséquence est de provoquer une crise politique à Londres : débat houleux aux Communes, démission du secrétaire aux Affaires étrangères lord Carrington.

Jamais le Foreign Office n'avait prévu ou même imaginé, malgré les nombreux avertissements de Buenos Aires et les signes avant-coureurs de son intervention armée, que l'interminable négociation sur l'avenir des Falkland-Malouines déboucherait sur un coup de force. Lord Carrington sera la première victime expiatoire de cette bévue.

Fidèle à sa réputation, la Dame de fer ne tolère pourtant aucun flottement. En vingt-quatre heures, le remaniement gouvernemental est achevé, les décisions arrêtées et la contre-attaque organisée : Londres ne s'inclinera pas devant l'agression.

Sans réserve

Un cabinet de guerre est constitué, ou siègent trois ministres — dont le nouveau secrétaire aux Affaires étrangères Francis Pym — aux côtés du chef d'état-major et du leader du parti conservateur. C'est lui qui gère la crise et engage une double action diplomatique et militaire.

À l'ONU, convoquée à la demande de Londres, le Conseil de sécurité vote, le 3 avril, la résolution 502, qui demande le retrait immédiat des forces argentines et la reprise de la négociation. C'est un franc succès pour Margaret Thatcher, qui obtient dans la foulée l'appui sans réserve de ses partenaires européens et sait pouvoir compter sur les États-Unis, même si, dans une première phase, Washington entend se poser en médiateur.

Mais la Dame de fer ne saurait laisser à la communauté internationale le soin de punir l'agresseur et de défendre le droit. Les Britanniques s'en chargeront avec leurs armes. Le 5 avril, une armada d'une cinquantaine de navires chargés de plusieurs milliers d'hommes et placés sous le commandement de l'amiral John Woodward quitte Portsmouth pour l'Atlantique sud sous les acclamations de la foule. Deuxième succès pour Margaret Thatcher : sa fermeté recueille l'adhésion populaire. Jamais sa cote n'a été si haute.

La vraie bataille, pourtant, ne s'engagera que 25 jours plus tard lorsque la flotte britannique, renforcée de nombreux bâtiments venus de Gibraltar et d'ailleurs, encadrant transports de troupes et pétroliers réquisitionnés comme le prestigieux Queen Elizabeth, atteindra la « zone de guerre » établie autour des Malouines. La reconquête sera sanglante, longue et coûteuse.

Diplomatie

Mais la victoire est au bout du chemin, totale : le 14 juin 1982, à 21 heures (locales), les forces argentines, encerclées dans Port Stanley, font leur reddition. « Les îles Malouines sont à nouveau sous le contrôle du gouvernement souhaité par ses habitants. Que Dieu sauve la Reine » câble le général Jeremy Moore, commandant des forces terrestres britanniques de débarquement.

Reste maintenant à renouer la négociation avec l'Argentine pour régler enfin le sort de ces îles malheureuses.

Pendant la veillée d'armes du mois d'avril, la diplomatie avait épuisé toutes ses ressources pour éviter le pire. Tour à tour, le secrétaire d'État américain Alexandre Haig et le secrétaire général de l'ONU — le Péruvien Xavier Perez de Cuellar — tentent d'imposer à Londres et à Buenos Aires un compromis honorable. En vain.

Non que Margaret Thatcher refuse les concessions pour l'avenir. Mais celles-ci ne peuvent toucher, à ses yeux, au principe fondamental de la souveraineté britannique. « Nous œuvrons pour un règlement pacifique, déclare-t-elle, non pour une braderie. »