Cette fois, ce n'est pas un différend sur l'énergie nucléaire, mais un projet de réforme de la fiscalité, qui est à l'origine de la dislocation de la coalition tripartite au pouvoir, avec une seule voix de majorité au Parlement, depuis les élections générales de 1979 (Journal de l'année 1979-80).

Le 4 mai 1981, les huit ministres conservateurs du cabinet claquent brusquement la porte. Ils reprochent à leurs partenaires centristes et libéraux de s'être mis d'accord, derrière leur dos, avec l'opposition social-démocrate sur un train de mesures visant à alléger la progressivité de l'impôt et à limiter les possibilités de dégrèvements fiscaux, .jusqu'ici particulièrement généreuses.

Celles-ci avaient permis, le plus légalement du monde, à l'un des dirigeants de l'industrie les plus en vue, Anders Wall, de ne pas payer un sou d'impôt en 1979. Exemple parmi d'autres, illustrant les contradictions d'un système fiscal qui se veut égalitaire.

Les conservateurs estiment avoir été tout bonnement trahis par leurs amis avec lesquels ils avaient mis au point, deux mois plus tôt, un plan d'action économique comprenant justement une réforme de ce type.

Ils soupçonnent surtout les centristes et les libéraux de vouloir se rapprocher de la social-démocratie, au nom du consensus national, pour tenter d'enrayer la fuite inquiétante de leurs électeurs traditionnels. On parle aussi bien de compromis historique que de capitulation historique.

La crise gouvernementale est finalement dénouée le 20 mai par la décision des conservateurs de ne pas s'opposer directement à la formation d'un cabinet centriste-libéral, dirigé par le Premier ministre démissionnaire, Thorbjörn Fälldin.

La droite suédoise estime avoir reçu les garanties suffisantes que ses anciens partenaires ne mèneront pas une politique social-démocrate et qu'ils resteront fidèles aux options bourgeoises. Cette nouvelle coalition est minoritaire puisqu'elle ne dispose que de 102 sièges sur 349 au Riksdag, et il lui faudra manœuvrer avec habileté pour se maintenir au pouvoir jusqu'aux élections législatives de septembre 1982.

Déficit

Ce ne sera pas chose facile, car la détérioration de la situation économique et surtout financière exige, de l'avis général, des décisions énergiques et rapides. Le déficit budgétaire ne cesse de se creuser et représente en 1981 environ 11 % du PNB, malgré deux plans d'économies dans les dépenses publiques, d'une dizaine de milliards de F, présentés en moins de six mois par un gouvernement hésitant, qui n'ose pas revenir sur les acquis sociaux.

Ce déficit est couvert dans une large mesure par des emprunts extérieurs, d'où une augmentation en flèche de la dette extérieure (75 milliards de F). Par ailleurs, la balance des paiements est négative, et la remontée fulgurante du dollar américain accentue très nettement son déséquilibre.

L'austérité, à laquelle les Suédois ont du mal à s'accoutumer, donne lieu à des frictions entre les différentes catégories sociales et les syndicats qui défendent leurs intérêts. Au printemps 1981, médecins puis cols blancs déclenchent des mouvements de grève.

Fusion

L'objectif est en premier lieu de montrer qu'ils ne sont pas disposés à supporter seuls le fardeau de la crise, et que le rôle de la puissante centrale ouvrière LO (près de 2 millions de membres sur une population de 8 millions d'habitants) n'est pas de fixer, en accord tacite avec le patronat, le niveau général des salaires des employés, cadres et agents du secteur public.

En dépit de ces petits accrochages, on peut constater que les syndicats font preuve d'une étonnante modération dans leurs revendications. Ils se contentent finalement d'augmentations de l'ordre de 9 %, au total, pour 1981 et 1982, alors que le rythme annuel de l'inflation est supérieur à 12 %.

Les restructurations et les regroupements se poursuivent dans l'industrie sans aggravation notable du chômage (2 % de la main-d'œuvre en juin 1981). Peu avant l'été, la fusion du groupe Volvo avec la société d'investissement Beijer Invest (dirigée par l'homme qui n'a pas versé un centime d'impôt au percepteur en 1979) est entérinée par les actionnaires des deux entreprises.