Ce coup de poker, James Callaghan, successeur de Harold Wilson élu en 1974, va le préparer tout au long de cette année, sans abattre son jeu. Le premier ministre, qui a connu des débuts difficiles, réussit à réunir dans sa main un certain nombre d'atouts.

– Sur le plan économique, ce n'est pas encore le « miracle anglais », mais peut-être la sortie du tunnel. Pour la première fois depuis quatre ans, l'inflation a été ramenée au taux de 10 %. La livre a effectué une remontée spectaculaire, et, en janvier 1978, le gouvernement a pu rembourser par anticipation un milliard de dollars au FMI. Le commerce extérieur s'est redressé, la balance des paiements rééquilibrée. La Bourse a repris confiance. Le pétrole de la mer du Nord tient ses promesses. Certes, le chômage reste le dossier le plus noir, mais son taux a diminué pendant les six derniers mois. Lentement, mais régulièrement.

– Sur le plan social, l'été s'ouvre sur une menace de crise : les syndicats refusent de souscrire à un nouveau contrat social aux termes duquel ils s'engageraient volontairement — comme ils l'avaient fait les deux années précédentes — à limiter les revendications salariales. Mais la détente s'amorce à l'automne. Le congrès des Trade-Unions, à une très large majorité, accepte de ne pas remettre en cause les conventions collectives qui ont été signées, ce qui assure un répit d'un an. La menace d'une grande vague de grèves est écartée. « C'est la meilleure nouvelle de l'année », titrera la presse anglaise. La Bourse, qui monte en flèche, ne s'y trompe pas.

Quelques conflits, néanmoins, éclatent. Spectaculaires et longs, comme la grève des contrôleurs du ciel en août 1977 ou celle des 39 000 pompiers du royaume en décembre, qui dure neuf semaines. Le gouvernement ne cède pas. Sa fermeté est entendue. Les mineurs, qui revendiquaient une augmentation de salaire exceptionnelle, s'inclinent, eux aussi, sans même tenter l'épreuve de force.

– Sur le plan parlementaire, la bataille est plus difficile. Le parti travailliste ne dispose plus de la majorité. Il est obligé de compter sur l'appui des treize libéraux. Ceux-ci ont scellé, il y a un an, un pacte de soutien. Mais c'est une alliance capricieuse. James Callaghan parvient néanmoins à faire passer deux projets contestés, qui ont chacun leur poids électoral.

Du métro à l'avion

Londres est désormais la première grande ville du monde reliée par le métro à son aéroport principal. La reine a inauguré, le 16 septembre 1977, la ligne qui relie Piccadilly Circus à Heathrow en 40 minutes.

Régionalisation

Le premier est celui de la dévolution qui accorde l'autonomie régionale à l'Écosse et au pays de Galles. Sans doute le gouvernement a-t-il fait des concessions à ses adversaires : des amendements restrictifs ont été apportés au schéma primitif, qui en limitent singulièrement la portée. C'est ainsi que, lors du référendum par lequel Gallois et Écossais devront approuver la réforme, la victoire des « oui » ne sera assurée que si 40 % des inscrits votent en faveur de la régionalisation.

Dans un pays où l'abstentionnisme est un mal traditionnel et le référendum une procédure peu courante, cette clause est lourde de risques. Mais, pour James Callaghan, l'essentiel est que la loi sur la dévolution soit enfin acquise, même à ce prix. Ce vote lui assure un double avantage : à court terme, il cimente le pacte Lib-lab, la régionalisation étant une des conditions des libéraux à leur soutien ; à moyen terme, il doit préserver les positions travaillistes en Ecosse, menacées par la poussée des nationalistes. L'élection partielle de Garscadden, dans la banlieue de Glasgow, en avril, montre que cet espoir est fondé : le candidat du Labour l'emporte haut la main.

Parlement européen

Le second obstacle que le Premier ministre parvient à surmonter, en dépit d'une vive opposition au sein de son propre parti, est celui du Parlement européen. Le 24 novembre 1977, les Communes en approuvent le principe à une majorité inespérée, 381 voix contre 98. Les anti-Européens du parti travailliste se sont divisés : 72 d'entre eux ont voté contre, mais 55 — dont 7 membres du cabinet — se sont simplement réfugiés dans l'abstention, évitant ainsi une crise au sein du gouvernement. James Callaghan a gagné la première manche. Reste la seconde : le choix du scrutin.