Le gouvernement doit se montrer d'autant plus sévère envers les fraudeurs que le chômage massif représente une double perte pour le Trésor. D'une part, les chômeurs sont indemnisés et, d'autre part, l'État subit un manque à gagner sur les cotisations sociales.

Plans

Les difficultés budgétaires incitent le gouvernement à joindre au budget des Voies et moyens une loi-programme en trois volets qui porte sur des dispositions fiscales, une nouvelle technique pour l'évolution des allocations sociales et le financement des institutions universitaires. Ces dernières dispositions soulèvent une vive émotion dans les milieux universitaires.

Les ministres de l'Éducation nationale (française et flamande) ont beau prétendre qu'ils ne portent en rien préjudice à la bonne marche des universités en obligeant celles-ci à certaines économies jugées indispensables, le monde universitaire proteste. Il les accuse de xénophobie (pour avoir pris certaines dispositions relatives à des catégories d'étudiants étrangers) et affirme que la recherche scientifique est en péril, le statut de chercheur étant soumis à de nouveaux critères.

Les grèves et les manifestations se multiplient sur les campus et dans plusieurs villes en octobre 1975. Le gouvernement obtient malgré tout la majorité pour le vote du projet. Mais il s'engage à organiser une vaste concertation sur les problèmes de l'enseignement supérieur.

Loi-programme, plan de sobriété : ce n'est pas tout ! Le gouvernement de L. Tindemans a mis au point (laborieusement) un plan de redressement économique dit plan de relance. Dans l'esprit de ses promoteurs, ce projet devrait relancer l'économie. Las ! Chacun s'accorde à dire que ces mesures viennent trop tard : le plan est voté au Parlement avant les fêtes de Pâques, mais les arrêtés d'exécution seront pris plus tard. L'essentiel de ce plan de redressement concerne le blocage des revenus. Les rémunérations des ministres seront bloquées au même titre que les honoraires des professions libérales, les dividendes et tantièmes des actionnaires et dirigeants de sociétés ainsi que tous les loyers.

Les grands syndicats se sont opposés à ce que le gouvernement modifie le système d'indexation des salaires et appointements sur l'indice des prix. Seule la partie des appointements supérieure à 40 250 francs belges ne serait plus indexée. Cette mesure atteint quelque 13 000 ouvriers et 240 000 employés ; ce sont surtout les cadres qui en sont les victimes. C'est la goutte d'eau qui fait déborder le vase. Depuis des années, les gouvernements successifs ont rogné les revenus des cadres en augmentant régulièrement le plafond de la Sécurité sociale. Pour la première fois, les cadres groupés au sein de la Confédération nationale des cadres (CNC), syndicat indépendant des partis politiques, descendent dans la rue. Ils sont quelques milliers à défiler dans la capitale puis à remplir la salle de la Madeleine. Leur président, Jean Defer, déclare que le projet du gouvernement est un plan « naïf, irréalisable, démagogique et anti-cadres ». Il exige que son organisation soit reconnue comme représentative des cadres et soit associée aux négociations sociales.

Syndicats

Jusqu'à présent seuls les syndicats traditionnels (FGTB socialiste, CSC chrétienne et syndicats libéraux) sont consultés. Les deux grands syndicats (FGTB et CSC) ont des sections cadres ; mais les intérêts des cadres ne sont pas pour eux un secteur prioritaire.

Les syndicats se sont opposés, mais en vain, à la disposition relative à la non-indexation des revenus professionnels supérieurs à 40 250 francs belges. À l'initiative de la CNC le projet est amendé ; les cadres retrouveront, après neuf mois, le traitement qui aurait été le leur si l'indexation avait pu jouer librement. La FGTB mobilise 50 000 personnes à Bruxelles. Un tel déploiement est toujours impressionnant. Cette manifestation vise à obtenir une modification de la politique sociale et des mesures plus efficaces en faveur de l'emploi.

La CSC organise un congrès extraordinaire sur les problèmes de l'emploi. Elle propose la réduction des heures supplémentaires, la lutte contre le travail noir, la suppression de certains cumuls professionnels (enseignants et pensionnés des services publics) et l'emploi d'une partie des chômeurs par les services publics.