S'il vote à contrecœur, le 25 octobre, des dépenses supplémentaires pour faire face aux débordements de la politique agricole commune, il refuse le 14 novembre de donner quitus à la Commission pour le budget 1982, par 219 voix contre 102 et 33 abstentions. Certes, il ne s'agit pas d'un vote de censure, qui aurait entraîné la démission de l'exécutif, mais d'un avertissement de l'Assemblée, qui demande aux commissaires de « tirer les conclusions qui s'imposent » à la suite de ce désaveu.

Pour montrer son désaccord, l'Assemblée européenne a ainsi voté des dépenses supérieures de trois milliards d'ECU au projet initial des Dix pour le budget 1985 (dont 1,3 milliard pour financer la politique agricole commune).

Les gouvernements reprochent aux députés de se montrer trop dispendieux, mais ceux-ci répondent qu'ils sont partisans de la discipline budgétaire à condition que celle-ci soit réalisée sur « la base d'une véritable décision commune ». Bref, le dialogue s'avère de plus en plus délicat entre la Commission et l'Assemblée.

L'Europe de la technologie

En attendant que les projets d'union politique sortent de la nébuleuse, les Dix s'efforcent de multiplier les mesures concrètes qui doivent permettre aux habitants de la Communauté de prendre conscience des progrès réalisés. Un comité pour préparer l'« Europe des citoyens » est créé au sommet de Fontainebleau pour recenser tout ce qui peut être accompli dans ce sens. Cela concerne la suppression des contrôles aux postes frontières, la banalisation des bureaux de douane, les diplômes, les jumelages, le passeport unique.

Les Dix adoptent, le 28 février, un projet ambitieux, le programme Esprit (European Strategic Program for Research in Information Technology). Conçu pour favoriser la recherche dans les techniques de l'information pour la période 1984-1988, il dispose d'une enveloppe de 750 millions d'ECU. Les douze firmes européennes les plus importantes, parmi lesquelles la CGE, Thomson et Bull, participeront pour un montant équivalent à la réalisation du projet.

Dans le domaine de la technologie, il faut aussi signaler les succès remportés par la fusée Ariane, même si elle se situe hors du cadre strictement communautaire, ainsi que l'association entre les Français, les Britanniques et les Allemands pour la construction de la troisième version de l'avion Airbus (A 320).

Enfin, le 9 avril, le Jet (Joint European Tours), destiné à l'étude de la fusion thermonucléaire, est inauguré à Culham, près d'Oxford, en Grande-Bretagne. Son financement et son contrôle sont assurés par Euratom.

Convergence économique

Le système monétaire européen est entré dans sa sixième année d'existence. Il a fonctionné de manière remarquable, puisque aucune modification de parité n'a eu lieu. Cette stabilité a été favorisée par la force du dollar, qui a atténué les pressions qui auraient pu se faire jour entre les devises européennes, mais aussi par le développement de la convergence des politiques économiques à l'intérieur de la Communauté. Ainsi, l'écart extrême entre les taux d'inflation est revenu de 12 points en 1983 à 7,5 points en 1984. La hausse moyenne des prix s'est située à 5,1 % en 1984 et devrait tomber à 4,2 % en 1985, contre un taux annuel de 9,5 % pour la période 1971-1980.

En revanche, les perspectives de l'emploi demeurent peu satisfaisantes : de 1982 à 1984, les effectifs au travail ont diminué de 800 000 personnes, alors qu'ils augmentaient de 5,4 millions aux États-Unis et de 1,5 million au Japon. Le taux de chômage va passer à 11,5 % de la population active en 1985, représentant plus de 12 millions de chômeurs. Car la croissance progressera seulement de 2,3 % en 1985, contre 2 % en 1984, ce qui est très inférieur à la performance de longue période, qui atteignait 2,9 % par an de 1971 à 1980.

La Commission conseille aux gouvernements, dans une communication faite au Conseil de Dublin, de maintenir des politiques monétaires anti-inflationnistes et de poursuivre une action en faveur de la diversification des emplois et de l'abaissement des coûts salariaux. Elle insiste sur la promotion de l'offre, en développant la productivité dans toutes les structures économiques.

L'essor de l'ECU

L'un des moyens essentiels de renforcer les économies du Marché commun consiste à renforcer l'identité européenne. La croissance économique serait plus forte si le système monétaire pouvait être consolidé. À cet égard, 1984 apparaîtra peut-être comme l'année où l'ECU a pris son essor. Les fluctuations du dollar ont suscité un véritable appel en faveur de ce nouvel outil financier, auquel sa composition, sous la forme d'un panier de monnaies, confère la stabilité.