Le parti communiste, toujours clandestin, refuse d'entrer au gouvernement, mais autorise l'un de ses sympathisants, Aziz Cherif, l'un des leaders du Mouvement de la paix, à accepter, le 1er janvier 1970, le portefeuille de la justice. La plupart des militants du PC sont remis en liberté. Le rapprochement entre le gouvernement et l'extrême gauche coïncide avec le renforcement des liens entre l'Irak et les pays socialistes. Les 23 juillet et 31 août 1969, divers accords de coopération technique, notamment dans le domaine atomique, sont conclus avec Moscou. L'URSS accorde à Bagdad divers prêts, dont l'un de 56 millions de dollars pour la construction de barrages, et un autre de 70 millions de dollars pour financer l'exploitation du fabuleux gisement pétrolier de Roumeilah-Nord, dont les réserves sont estimées à un milliard de tonnes.

L'Irak remboursera ce dernier prêt en pétrole brut, en sept annuités comportant un intérêt de 2,5 %. L'Allemagne de l'Est, toujours en juillet 1969, avance au gouvernement irakien 80 millions de dollars pour l'exécution de 13 projets industriels. Les conditions consenties sont considérées comme étant les plus favorables jamais faites à l'Irak : le prêt sera remboursé en douze ans avec un intérêt de 2,5 %, sous forme de produits locaux, notamment du pétrole. En revanche, Bagdad suspend, le 18 août, ses relations diplomatiques avec la Roumanie, après que celle-ci eut échangé des ambassadeurs avec Israël.

Tandis que la campagne anti-américaine se poursuit, que les relations avec l'Iran s'enveniment, le régime baasiste intensifie la répression à l'encontre des milieux conservateurs. Les arrestations se multiplient, et plusieurs procès sont intentés à des civils et à des militaires qualifiés d'espions à la solde d'Israël et des services de renseignements américains. Les 24 août et 8 septembre, 18 inculpés sont exécutés. Les 21 et 22 janvier 1970, 44 personnes sont passées par les armes pour tentative de coup d'État pour le compte des États-Unis et de l'Iran. L'ambassadeur du chah à Bagdad, ainsi que quatre de ses collaborateurs, impliqués dans le complot, sont expulsés. On estime que depuis janvier 1969 101 personnes, dont 2 juifs, ont été exécutées.

Fin du conflit avec les Kurdes

Soucieux d'assainir la situation intérieure et de réduire les dépenses militaires, qui freinent le développement du pays, le régime baasiste s'applique à mettre un terme à la guerre menée contre les autonomistes kurdes dans le nord du pays. Au début de l'été 1969 et jusqu'en octobre, tout est mis en œuvre pour réduire par la force les maquisards du général Barzani, mais sans succès.

Une série de mesures sont alors prises pour préparer la voie à un règlement politique. Le 1er octobre, un décret divise l'Irak en 16 gouvernorats (au lieu de 14), dont 3 sont à majorité kurde, auxquels on accorde une large autonomie. Le 9 octobre, l'enseignement du kurde — déjà en vigueur dans les écoles primaires — est rendu obligatoire dans le secondaire et le supérieur, notamment à l'université de Bagdad. À la mi-janvier, le gouvernement de Bagdad charge une personnalité kurde, le général Fouad Aref, d'une mission de médiation auprès du général Barzani.

Le complot éventé le 21 janvier permet au gouvernement de sévir contre tous les jusqu'auboutistes et les adversaires d'un compromis avec le mouvement nationaliste kurde. Le 25 janvier, probablement en accord avec le général Barzani, le Conseil de la révolution proclame une amnistie générale, tout en autorisant les guérilleros kurdes à conserver leurs armes, et ordonne la réintégration des fonctionnaires qui avaient rejoint les insurgés. Il confirme, en outre, la validité de l'accord conclu le 29 juin 1966, mais jamais appliqué. Aux termes de cet accord, l'existence d'une nation kurde est formellement reconnue, le kurde devient langue officielle dans les provinces du Nord, l'accession des Kurdes dans toutes les administrations de l'État sera en proportion de leur nombre dans le pays (environ un quart de la population totale). Les écrivains kurdes sont autorisés à former leur propre association et à publier des journaux et des revues en leur propre langue. Six semaines plus tard, le 11 mars, Bagdad annonce officiellement la conclusion de la paix avec les maquisards kurdes, à l'issue d'une guerre larvée qui aura durée neuf ans.