Dominique Colson

Matières premières

Pendant le premier semestre 1988, les prix des matières premières non énergétiques (produits agricoles, métaux précieux et non-ferreux) ont progressé de 22 %. Les records de hausse reviennent aux métaux non ferreux (aluminium, cuivre, zinc et même étain), au caoutchouc (+ 38 %) et aux denrées alimentaires (+ 50 % pour le soja et + 33 % pour le blé). Cependant, cette remontée des cours n'efface pas les baisses des prix observées de 1984 à 1987, puisque, en termes réels, les cours restent de 18 % en deçà de leur niveau moyen de 1984.

Cette vague de hausses a été suscitée autant par les craintes des investisseurs que par des circonstances particulières, comme des rumeurs de pénurie sur les métaux non-ferreux, ou la sécheresse sur les régions de grande culture du Middle West.

Au deuxième semestre, les cours des matières premières agricoles devaient retrouver des niveaux plus normaux. Dans une certaine mesure, le retournement des cours du marché s'est produit sous l'influence des pluies qui sont tombées sur les régions de cultures et des prévisions de nouvelles précipitations. Pour les métaux de base, après élimination des tendances spéculatives, les cours se sont maintenus à des niveaux raisonnables, par rapport aux sommets atteints au printemps.

Ces évolutions confirment les observations effectuées depuis longtemps sur les marchés des produits bruts qui ont tendance à fonctionner selon un cycle à caractère spéculatif et sur lesquels les prévisions et les décisions tant des vendeurs que des acheteurs exercent une action déterminante. Dans ces conditions, il faut s'attendre à une alternance entre une phase de surproduction accompagnée d'un effondrement des cours et une phase de hausse-surprise des prix, qui rendra inopérants les efforts de régularisation des cours.

Gilbert Rullière

Énergie

Pendant toute l'année 1988, les cours du pétrole ont poursuivi leur chute sur les marchés internationaux, ramenant les prix de vente au consommateur, après correction monétaire, quasiment au niveau de 1973, antérieur aux deux chocs pétroliers.

Le prix moyen officiel de 18 dollars par baril, prix de consensus, prix de cible de l'OPEP, n'était plus défendu depuis décembre 1987. En février 1988, les cours réels du brut étaient inférieurs de deux à trois dollars à ceux de l'OPEP, mais c'est à partir de l'été qu'ils se sont à nouveau dégradés pour atteindre leur niveau le plus bas ; ils se situaient alors entre 10,40 dollars le baril pour les pétroles du Golfe (Dubayy) et 13,44 dollars pour les pétroles américains, prix inférieur au coût moyen de production outre-Atlantique (13,50 dollars). Cependant, la hausse de la consommation, surtout aux États-Unis, a freiné la baisse.

Ces accès de faiblesse s'expliquent par l'absence de discipline commune ; les pays de l'OPEP ne respectent pas toujours leurs quotas de production, si bien que l'Arabie Saoudite n'a pas cherché à limiter les siens. À la fin novembre, la production de l'OPEP a alors atteint son niveau le plus haut depuis 1982.

La chute des cours pétroliers a provoqué l'interruption de nombreux projets de développement dans les régions les plus difficiles : Arctique, mer du Nord, offshore profond. D'un autre côté, le développement des énergies concurrentes a été freiné : le nucléaire régresse ; l'extraction du charbon est de plus en plus ralentie ; l'énergie hydroélectrique et la production de gaz naturel ne sont pas davantage favorisées ; au contraire, Électricité de France, en raison de surplus constants et malgré la fermeture de centrales nucléaires, envisage une politique d'exportation systématique. Enfin, la baisse des cours a entraîné celle des coûts de production et a ainsi facilité la reprise de l'activité économique dans les pays occidentaux.

Gilbert Rullière

Industrie

L'année 1988 a mis en relief des changements intervenus dans l'évolution des différents secteurs de l'industrie à travers le monde.

Durant une trentaine d'années, les secteurs industriels de nombreux pays se sont trouvés engagés dans un processus de développement extensif, consistant à produire toujours davantage, car les marchés absorbaient facilement les biens fabriqués. Avec les chocs pétroliers, les pressions de la compétitivité, tant au plan national qu'au plan international, et les mutations technologiques, la « crise », qui a débuté en 1973, a fait apparaître de nouvelles contraintes (préférences des consommateurs pour les produits de meilleure qualité).