Un mouvement s'est aussi amorcé pour le travail des vendredis, samedis et dimanches. L'article du Code du travail L 221-5 impose aux entreprises de donner à leurs salariés le repos hebdomadaire le dimanche. Certes, depuis l'ordonnance du 16 janvier 1982, les entreprises industrielles ont la possibilité de mettre en place des équipes spéciales de suppléance en fin de semaine pour assurer l'utilisation des équipements pendant le week-end. Mais cette organisation coûte beaucoup plus cher à l'entreprise, puisque la rémunération des salariés travaillant dans ces équipes est majorée de 50 %. Par exemple, les équipes effectuant 10 heures par jour sur 3 jours – les équipes VSD (vendredi, samedi, dimanche) – sont payées 45 heures. Compte tenu des contraintes existant dans certains secteurs industriels, l'agroalimentaire, les composants électroniques et les activités portuaires notamment, on a tenté à partir d'octobre, d'introduire plus de souplesse. L'opinion publique en a été immédiatement informée, grâce à l'agitation aux alentours de certains hypermarchés. En fait, la querelle des hypermarchés – faut-il ou non les autoriser à ouvrir le dimanche ? – n'est que la pointe émergée d'une modification profonde des modes de vie. La sacralisation du week-end dans une société réglée sur les mêmes horloges et sur les mêmes emplois du temps devient caduque dès que les modes de vie et de travail se diversifient. La flexibilité engendre la flexibilité, celle de la production entraînant celle des modes de consommation. À terme, c'est donc la question de l'organisation de bon nombre de services qui sera posée. Certes, il est plus facile de régler la vie d'une société astreinte à des horaires identiques, mais, à moins de développer chez chacun d'entre nous une parfaite schizophrénie entre sa part consommateur et sa part employé-salarié, il faudra bien que, selon des modalités choisies et sans doute compensées, la vie économique française s'organise avec des marges de liberté supplémentaires.

Les actions parallèles

Dans les sociétés modernes, un des aspects les plus mal connus de la flexibilité est le travail au noir. Selon certaines estimations, 800 000 personnes exerceraient, en France, une activité clandestine. Hors impôts, TVA et cotisations sociales, elles réalisent une production dont le montant est difficile à estimer, mais qui ne peut être ignorée. Le gouvernement n'a pas cherché à lutter sérieusement contre le travail au noir. Il a essayé, par contre, à partir de septembre 1984, de développer une nouvelle politique de l'emploi en prenant deux grandes initiatives : d'une part, une opération de formation des jeunes, dite en alternance ; d'autre part, les travaux d'utilité collective (TUC).

Les formations en alternance devaient permettre d'intégrer 300 000 jeunes d'ici à la fin de 1985. Telles étaient du moins les espérances du gouvernement. Les entreprises acceptant d'y participer pouvaient bénéficier d'une défiscalisation de 0,3 % de leur masse salariale (0,1 % de la taxe d'apprentissage et 0,2 % de la formation professionnelle), afin d'assurer le financement de leurs engagements. Les difficultés rencontrées par cette formule ont été sérieuses. D'abord, toutes les formations ne peuvent déboucher directement sur un emploi. Il faut en outre que les acteurs de la formation en alternance (les régions et les entreprises) soient persuadés du bien-fondé de l'action. Les organismes de formation doivent mettre leur expérience au service des employeurs et en particulier de PME qui n'ont pas les moyens de cette politique. Il faut enfin et surtout que les salariés eux-mêmes trouvent un intérêt à cette initiative. Beaucoup de monde à convaincre, donc, pour atteindre les niveaux escomptés. Finalement, le principal intérêt de cette opération est de constituer un recours pour les anciens bénéficiaires des travaux d'utilité collective mal préparés à l'exercice d'un métier réel. La formation en alternance pourrait devenir le moyen d'empêcher les individus sortant des TUC de retomber dans les statistiques du chômage !