Enfin, les ultimes bastions au Nord-Liban des fedayin pro-Arafat sont investis en octobre-novembre par des forces prosyriennes qui les pilonnent à l'arme lourde.

Amal Naccache

Libye

L'engagement au Tchad

L'engagement militaire de Tripoli au Tchad, aux côtés du Gouvernement d'union nationale transitoire (GUNT) de Goukouni Oueddei, aggrave la détérioration des relations de la Libye avec les États-Unis, déjà compromises au début de février à la suite d'une minicrise entre les deux pays à propos du Soudan.

La présence, au début de février, du porte-avions américain Nimitz et de son escorte dans le golfe de Syrte, dont les eaux sont considérées comme internationales par les États-Unis, semble constituer le prélude à l'épreuve de force tant attendue entre Washington et le colonel Kadhafi, qualifié par le président Reagan d'« homme le plus dangereux du monde ». Loin de se laisser intimider, le chef de la révolution libyenne réplique en affirmant qu'il est disposé à se battre pour défendre le golfe de Syrte, « qui fait partie des eaux territoriales libyennes ». Beaucoup de bruit pour rien, puisque les dirigeants américains, tout en se félicitant publiquement d'avoir dissuadé la Libye d'intervenir au Soudan — une menace que tout le monde s'accorde à qualifier d'imaginaire —, démentent aussitôt tout rapport entre les mouvements de la flotte américaine et le développement de la situation à Khartoum.

Washington, l'ennemi principal

La minicrise de février conforte cependant le colonel Kadhafi dans sa conviction que les États-Unis menacent la sécurité de la Libye et souhaitent déstabiliser son régime. La Libye est déjà flanquée à l'ouest par l'Égypte et le Soudan, deux États pro-américains, et le dirigeant de Tripoli entend empêcher par tous les moyens que le Tchad ne vienne compléter le cordon sanitaire que, selon lui, le président Reagan s'apprête à établir aux frontières de son pays. Cette crainte explique en partie la décision du chef de l'État libyen de s'engager militairement à partir du mois d'août aux côtés des forces du GUNT, après la reconquête de Faya-Largeau par l'armée gouvernementale d'Hissène Habré. Jusque-là, le colonel Kadhafi s'était contenté d'accorder aux partisans de Goukouni Oueddei un soutien logistique important, estimant que cette aide était parfaitement justifiée, puisqu'elle était adressée au « gouvernement légitime du Tchad », qui « se bat contre un officier félon, Hissène Habré, naguère ministre de la Défense de ce même gouvernement, et qui a occupé par la force N'Djamena, la capitale ».

Pour le chef de la révolution libyenne, les États-Unis constituent l'ennemi principal. La France, qu'il accuse par ailleurs d'intervenir dans la guerre civile au Tchad, est entraînée dans cette intervention par Washington. En conséquence, il se déclare à plusieurs reprises, en juillet et en août, « prêt à envisager un règlement diplomatique avec Paris ». Après les explications de F. Mitterrand sur la crise du Tchad dans lesquelles le chef de l'État français affirme que « tous les moyens de répondre militairement et vite à une nouvelle offensive libyenne ont été mis en place », le colonel Kadhafi, conforté par les succès de son armée à Faya-Largeau, fait savoir implicitement qu'il est disposé à respecter les lignes rouges que la France a établies entre les deux belligérants. Il concentre désormais toutes ses attaques contre les États-Unis, soulignant que « tout dialogue avec Washington est impossible ».

Les relations avec Paris tardent à être normalisées. Début octobre, le climat des relations entre les deux pays se détériore de nouveau, à la suite d'une nouvelle crise provoquée par la décision du gouvernement libyen d'empêcher un groupe de 37 Français de quitter Tripoli, à la suite de l'arrestation à Paris d'un ressortissant libyen, accusé d'avoir participé à l'assassinat en juin 1980 d'un opposant libyen en Italie. La crise est provisoirement dénouée le 13 octobre, à la suite de la décision de Tripoli d'autoriser les Français à regagner le territoire national, mais les relations entre les deux capitales demeurent tendues.