Cette chute de 8,9 % des exportations, qui survient après une première baisse de 9,9 % en 1981 et qui s'accompagne d'un écroulement (– 23,9 %) du nombre de voitures françaises assemblées à l'étranger, est extrêmement préoccupante et traduit la perte sensible de compétitivité face aux concurrents étrangers, allemands en particulier.

Il en résulte une dégradation nette du commerce extérieur automobile, encore largement positif (24,4 milliards de F) mais qui perd 6 % en francs courants. En francs constants, le recul, par rapport au niveau record de 1979, est de 33,3 % : en deux ans, l'apport de devises de l'automobile française au pays s'est réduit d'un tiers...

Compétitivité

Élément nouveau : alors qu'au cours de l'année précédente les difficultés de l'automobile française se réduisaient, en fait, à celles du groupe Peugeot S.A. (marques Peugeot, Citroën, Talbot), tandis que Renault continuait de progresser, en 1981 Peugeot continue sa descente aux enfers, mais Renault n'est plus épargné.

À cela, plusieurs raisons : la perte de compétitivité de l'automobile française est générale, car elle est liée aux évolutions monétaires. En dépit d'un différentiel d'inflation considérable (trois fois plus rapide en France qu'en Allemagne), le franc et le mark restent dans le cadre de parités fixes. Dès lors, nos voisins d'outre-Rhin peuvent augmenter en France leurs tarifs moins vite que les Français, tout en dégageant des marges accrues leur permettant de procéder à des investissements commerciaux. À l'inverse, en Allemagne, les Français sont conduits soit à augmenter leurs prix plus rapidement que la concurrence, donc de reculer, soit de vendre à perte. Ils ont, en 1981, fait les deux. Sans le dire ouvertement, les constructeurs nationaux, au nom de l'emploi, réclament une dévaluation du franc, le réajustement monétaire intervenu étant jugé à la fois trop insuffisant et trop tardif.

Autre motif : les difficultés liées à la fusion des réseaux Talbot et Peugeot. Cette fusion est largement engagée — 10 % des ventes seulement s'effectuant par l'intermédiaire de concessionnaires mono-marques au 1er janvier 1982 — et doit être achevée au 31 décembre 1982. Cet accord a jeté un grand trouble. Les concessionnaires déçus ont trappe à différentes portes. Renault ayant fait le plein en 1980, ce sont Volkswagen, Ford, Fiat et autres importateurs qui en accueillent le plus grand nombre. Ce qui explique en partie le boom de leurs ventes.

La troisième principale raison de l'affaissement des Français tient à l'absence de nouveaux modèles attractifs de la mi-1980 au dernier trimestre 1981, alors que les Européens présentaient des produits renouvelés, de conception moderne. Cette période est révolue dès octobre 1981, date de commercialisation de la R 9. En décembre, vient la Talbot Samba. Dès janvier, les conséquences de ce renouveau se font sentir et, aidé par une politique commerciale agressive (rachat à tout acheteur de Peugeot, Talbot ou Citroën de n'importe quelle vieille voiture à 5 000 F), le marché des voitures françaises amorce un redressement vigoureux. Le succès de la R 9 et de la Samba ainsi que le réveil de la Peugeot 505 et de la Visa rénovée accompagnent ce redressement à l'exportation.

Offensive japonaise

La période la plus noire semble donc surmontée. Le groupe Peugeot, qui annonce pour 1981 des pertes records supérieures à 2 milliards de F, reprend peu à peu confiance en lui. La sortie attendue de nouveaux modèles Citroën et Peugeot marquera vraisemblablement le rétablissement définitif du groupe.

Mais, après une crise particulièrement rude, Français et Européens devront compter avec une alliance extrêmement forte qui se précise.

En effet, limités de façon plus ou moins brutale dans la plupart des grands marchés du monde, les Japonais semblent décidés à nouer des alliances. Ils l'ont fait avec divers Européens, et selon des fortunes diverses. Toyota, le numéro un japonais, jusque-là très réservé sur la coopération internationale, paraît décidé à sauter le pas. En s'alliant avec le numéro un américain et mondial : General Motors. Des négociations sérieuses se déroulent depuis décembre 1981 pour la construction aux États-Unis par Toyota, et pour le compte de GM, de quelque 500 000 petites voitures. Une alliance profonde de deux géants mondiaux se partageant les marchés en fonction de leurs atouts et de leurs handicaps respectifs serait extrêmement dangereuse pour tous les autres.

Bâtiment

Marasme persistant

Avec une production stabilisée à 400 000 logements, les entreprises du bâtiment peuvent agiter, avec raison, le spectre de la pénurie. Sans rêver aux 550 000 mises en chantier qui constituèrent un record il y a une dizaine d'années, il est admis qu'il manque actuellement 50 000 logements-an pour éviter la dégradation du parc national et assurer un logement décent à tous les ménages. Autre aspect de cette défaillance de la politique de l'habitat, le bâtiment a de nouveau perdu 40 000 emplois en 1981. Par rapport à 1972, le recul est de 36 % en termes d'activité (heures travaillées) et de 24 % en termes d'emploi.

Paralysie

Le nouveau pouvoir politique, comme le précédent d'ailleurs, a pris diverses mesures afin de ranimer le secteur (déblocage de crédits privilégiés, etc.), mesures d'abord jugées satisfaisantes par les entreprises, mais ensuite contrariées par d'autres mesures plus générales (impôt sur la fortune, etc.). Au total, les candidats au logement, découragés par les taux d'intérêt élevés, s'orientent désormais plutôt vers le locatif aidé, dont les mises en chantier ont augmenté de 14 % en 1981, et donc vers la construction collective qui, après avoir chuté fortement pendant plusieurs années, s'est redressée de plus de 10 % l'an dernier.