Or, malgré la paix, la situation intérieure reste extrêmement difficile : la grande sécheresse du Sahel, le conflit qui continue chez les voisins et qui oblige à garder une armée sur pied de guerre, la chute des exportations de minerai de fer, la dette extérieure trop lourde, tout cela va amener le gouvernement à investir désormais dans des projets plus modestes et à redonner une priorité à l'agriculture et à la pêche, trop longtemps négligées.

En même temps, le gouvernement s'engage sur la voie d'une certaine démocratisation et d'une réduction des tensions ethniques, toujours vivaces. Il part en lutte contre la corruption, met sur pied une réforme linguistique pour répondre aux revendications des Noirs, supprime enfin l'esclavage, le 5 juillet 1980, libérant ainsi les Haratine, en principe déjà affranchis mais souvent considérés encore comme esclaves par leurs anciens maîtres.

Un nouveau gouvernement « civil » dirigé par Si Ahmed Ould Bneijara est constitué le 15 décembre 1980, avec pour objectif de préparer la mise en place d'institutions démocratiques.

Islamique

Le comité militaire de salut national annonce l'élaboration d'une nouvelle Constitution, soumise à référendum, prévoyant d'instaurer une République islamique parlementaire, démocratique et sociale. Le président de la République serait élu au suffrage universel, les partis politiques seraient admis, l'arabe deviendrait seule langue officielle. La date du référendum n'est pas précisée.

Un coup de tonnerre éclate dans ce ciel qui commençait à se dégager : le lundi 16 mars 1981, au matin, deux officiers rebelles, les lieutenants-colonels Abdelkader et Ould Sidi, tentent de renverser le régime à Nouakchott. Les combats durent trois heures et il semble que les putschistes aient trouvé un certain concours dans l'armée mauritanienne. Une fois le putsch enrayé et les rebelles arrêtés, on s'interroge sur le ou les instigateurs : s'agit-il, comme l'affirme presque aussitôt le président mauritanien, d'une entreprise inspirée par le Maroc ?

Rabat dément énergiquement toute participation et rétorque que l'Alliance pour une Mauritanie démocratique — mouvement d'opposition au régime d'Ould Heydalla, qui a inspiré le putsch — veut surtout éviter une installation du Polisario à Nouakchott. Ces démentis marocains ne sont pas pris en considération par la Mauritanie, qui rompt ses relations diplomatiques avec Rabat, saisit le Conseil de sécurité de l'ONU, la Ligue arabe et l'OUA.

Exécution

Quatre officiers putschistes (Abdelkader, Ould Sidi, Niang et Doudou Seck) ont été condamnés à mort le 24 mars et exécutés le 26. Cinq sous-officiers sont condamnés aux travaux forcés à vie. Des armes algériennes arrivent en Mauritanie, et Nouakchott reste une semaine en état de siège. La situation se tend avec le Sénégal, d'où seraient venus les putschistes.

Peu à peu, l'émotion retombe. Mais la démocratisation annoncée semble stoppée, ou en tout cas retardée.

Il reste que la Mauritanie, après avoir été le maillon faible de la guerre, risque de devenir le maillon faible de la paix. Il devient difficile de maintenir une stricte neutralité dans le conflit en cours. La Mauritanie continue à ne pas reconnaître la RASD (République arabe sahraouie démocratique), même si elle a reconnu le Front en 1979. Mais ses relations avec ses voisins se compliquent singulièrement.

Le froid qui s'était installé entre Nouakchott et Rabat, après la signature de l'accord de paix entre Mauritanie et Sahraouis, ne fait que s'accentuer. Des incidents de frontière s'étaient déjà produits le 29 juillet 1980, l'aviation marocaine ayant poursuivi des colonnes sahraouies en territoire mauritanien. La Mauritanie avait alors menacé de reconnaître la RASD. À la suite du putsch manqué, rien ne va plus entre Nouakchott et Rabat.

Coopération

Avec la Libye, les relations passent par des hauts et des bas. Trois diplomates libyens en poste à Nouakchott sont déclarés persona non grata. Le centre d'information libyen à Nouakchott est fermé pour « activités subversives ». Pro-libyens et pro-iraqiens s'affrontent dans les écoles. Enfin, Ahmed Baba Miske, un des leaders de l'opposition, est arrêté le 27 décembre 1980 et accusé de complicité avec la Libye. Il sera assez rapidement libéré, et les relations s'améliorent progressivement.