La commercialisation de l'Airbus ne progresse que modérément malgré la décision prise par la Lufthansa, le 19 décembre 1972, de passer commande à son tour. À cette même date, le tableau des commandes s'établissait ainsi :
– Air France : 6 Airbus type B 2, plus 10 options ;
– Iberia : 4 Airbus type B 4, plus 8 options ;
– Sterling Airways : 3 Airbus type B 4 ;
– Lufthansa : 3 Airbus type B 2, plus 4 options.

Au total, 16 avions commandés ferme et 22 options. Les besoins, à terme, de ces quatre compagnies sont évalués à 110/115 appareils. L'Airbus est vendu environ 80 millions de francs, et la part française sur chaque appareil représente 36 millions (45 %). L'équilibre financier de l'opération sera atteint, estime-t-on, lorsque 360 appareils auront été vendus, le marché mondial étant lui-même compris, d'ici à 1985, entre 1 200 et 1 400 avions (dont 400 pour la seule Europe). Aucun concurrent n'a été officiellement annoncé jusqu'ici, sauf par McDonnell-Douglas, qui étudie un biréacteur, le DC-10 Twin, dérivé du DC-10 triréacteur.

Mais le constructeur américain n'a pas encore lancé réellement la fabrication de l'appareil, qui n'apparaîtrait au plus tôt qu'en 1976. Par contre, Airbus Industrie poursuit l'étude d'une version de l'appareil européen ; les moteurs General Electric seraient remplacés par des moteurs Rolls-Royce, ce qui ouvrirait ultérieurement le marché britannique à l'Airbus.

Le parc français

La France comptait, au 1er janvier 1973, 4 628 avions privés dont 2 488 appartenaient à des aéroclubs, 1 508 à des particuliers, 759 à des sociétés, 269 aux services ministériels, 54 à des constructeurs. On comptait à la même date 431 avions de transport (dont 110 appareils de la compagnie Air France) et 9 ballons libres.

Transatlantique

Concorde a poursuivi ses essais avec brio : les deux prototypes (001 et 002) et les deux avions de présérie (01 et 02) totalisaient, au 30 juin 1972, près de 2 000 heures de vol ; Concorde 02 a effectué plusieurs vols en circuit fermé sur une distance totale qui dépasse largement 6 000 km. Les qualités de l'appareil ont été confirmées au cours de ces vols d'essai et on s'en déclare satisfait. Les compagnies ont ainsi la preuve définitive que l'avion supersonique franco-britannique est capable de franchir l'Atlantique Nord en 3 h 30 mn avec 10 à 12 t de charge marchande (soit 120 passagers) et 16 t de carburant de réserve. Le poids total de l'avion, limité maintenant à 176 t, sera progressivement porté à 180 t, ce qui lui permettra de relier Francfort à New York (6 400 km). L'avion entrera en service effectif au printemps 1975. Sur le plan commercial, les commandes de la BOAC en mai 1972 (5 avions) et d'Air France en juillet 1972 (4 appareils) sont suivies par celles, inattendues, d'Iran Air (2 avions, plus une option) et de la Chine (3 avions). Par contre, la Pan Am et la TWA refusent (fin janvier 1973) de lever leurs options tout en ne fermant pas définitivement la porte. Plusieurs autres compagnies américaines adoptent une attitude analogue. L'Aérospatiale et la British Aircraft Corporation décident alors d'abandonner le système des options, devenu inutile.

Garanties

La cadence de production de Concorde va donc fortement se ralentir, afin d'éviter toute interruption de la chaîne d'assemblage. Mais, la fabrication des seize premiers avions étant déjà très avancée, le maintien en activité de la chaîne oblige les industriels à demander la garantie et l'aide de l'État pour lancer des tranches supplémentaires.

Le marché, estime-t-on, devrait se dégeler à partir de 1975, lorsque l'appareil entrera en service sur l'Atlantique Nord, l'Afrique, l'Atlantique Sud, et l'Extrême-Orient (Paris-Tokyo via Moscou). Seule lueur réconfortante dans ce tableau assez pessimiste : les études de marché et les sondages effectués aux États-Unis auprès d'habitués des lignes aériennes montrent qu'il existe un préjugé très favorable envers Concorde, et une demande potentielle justifiant largement la mise en service de l'appareil avec des tarifs supérieurs à celui de la première classe actuelle. L'exploitation de Concorde, estiment Air France et la BOAC, sera très bénéficiaire.

Révision

Le biréacteur Mercure de Dassault poursuit ses essais après avoir subi diverses modifications. L'avion tête de série est sorti d'usine en juin 1972, mais aucune autre commande n'a été enregistrée après celle d'Air Inter (dix appareils). Dassault a donc révisé la définition de l'appareil et propose maintenant un Mercure 200, pesant 59 t contre 54, mais capable de franchir des étapes plus longues (2 000 à 2 500 km) avec sa pleine charge marchande (150 passagers).