Le cardinal Silva Henriquez, archevêque de Santiago, déclare, le 5 février 1972 : « Aucun chrétien ne peut dire, en vérité, qu'il est marxiste. »

Afrique

Les difficultés des Églises africaines dans leurs rapports avec les États nouvellement indépendants sont mises en lumière par le conflit qui éclate, en janvier 1972, entre le président du Zaïre (ex-Congo belge), Joseph Mobutu, et le cardinal Malula, archevêque du Kinshasa. Raison du conflit : la politique d'authenticité africaine, c'est-à-dire d'africanisation à outrance, menée par le président Mobutu. En raison de l'authenticité, les enfants devront, par exemple, être baptisés désormais avec des prénoms zaïrois, et le président lui-même abandonne le prénom de Joseph pour celui de Sese Seka Kuku Ngden du Maza Banga. Le 12 janvier, Afrique chrétienne, le journal catholique, critique vivement cette politique : « Allons-nous exhumer de la nuit du passé une philosophie africaine originale qui n'a pu être, si du moins elle a un jour existé, que l'expression d'une situation et d'une vie sociale à jamais périmées ? »

Le journal est alors suspendu, son directeur mis en prison, et les autorités déclenchent une vive campagne contre le cardinal Malula, qualifié par la presse de « vipère ». Le 11 février, le pape appelle celui-ci à Rome, mais cette mesure ne provoque aucun apaisement. L'exigence, formulée par le président Mobutu, de créer dans les séminaires des sections du JMPR (Jeunesses du mouvement populaire de la révolution, le parti unique), entraîne la fermeture du grand séminaire Jean-XXIII. En mai, le différend s'apaise et le grand séminaire rouvre ses portes. Le 28 juin, Mgr Malula regagne Kinshasa. Cependant, le Vatican demeure inquiet de la situation de l'Église en Afrique.

Suisse

La publication des résultats du recensement fédéral fait apparaître que les catholiques sont désormais plus nombreux que les protestants (en raison, notamment, de l'immigration) : ils étaient, en 1970, 3 090 000, et les protestants 2 980 000. Les relations entre les deux confessions s'améliorent sans cesse. Un signe en est donné par la proposition de levée de l'interdiction — devenue théorique, il est vrai — faite aux jésuites de s'installer sur le territoire de la Confédération.

L'activité de l'Église catholique est dominée par la préparation du Synode 1972. Il s'agit d'une innovation, d'une vaste consultation démocratique en partie inspirée de l'exemple des Pays-Bas. Commencé par une enquête à laquelle 335 000 personnes ont répondu, il se poursuit en septembre par des réunions diocésaines auxquelles participent des délégués élus.

Les protestants

L'image du protestantisme mondial, comme d'ailleurs des autres confessions chrétiennes au cours de l'année, aura sans doute été celle d'une accélération de prises de positions opposées.

La frontière qui se dessinait depuis des années au sein de toute la chrétienté — très différente des anciennes frontières dogmatiques et juridiques — s'est brusquement concrétisée.

Il ne s'agit pas tellement d'un sévère clivage entre conservateurs et novateurs, comme ce fut le cas tout au long de l'histoire, mais de deux façons, difficilement conciliables, de lire l'actualité du monde et d'entendre l'Évangile.

Il est probable qu'une des causes de ce phénomène troublant est la lenteur des mutations ecclésiales en regard de l'extrême rapidité de l'évolution sociale. Le fossé s'est certainement creusé cette année, et tandis que la majorité demeure statique, d'autres s'efforcent de suivre ou de s'opposer au mouvement général, de façon souvent incohérente. En un mot, le protestantisme a offert une image très proche de la situation où se trouvent les hommes de ce temps : les uns demeurant farouchement attachés au statu quo pour des raisons plus biologiques que sordides, les autres militant dans des groupuscules extrémistes.

Le charisme

Du mot grec karisma, signifiant : grâce, bienfait. C'est le nom donné aux dons exceptionnels du Saint-Esprit à des individus ou à des groupes. Saint Paul les mentionne : don de guérison, du parler en langue (glossolalie), de l'interprétation des langues... Les communautés charismatiques ont existé durant toute l'histoire de l'Église. Les plus récentes sont le scientisme de Marie Baker Eddie (USA) et le pentecôtisme, né vers 1920 avec John Scott en Grande-Bretagne. Toutes les Églises reconnaissent les charismes, mais ne leur accordent généralement pas une place essentielle.

Le fondamentalisme

Le fondamentalisme est l'attachement absolu, fondamental, à une certaine lecture littérale de l'Écriture sainte, voire parfois à une lecture complémentaire de fondateurs d'Églises ou de sectes. Il y a des fondamentalistes au sein de toutes les grandes familles confessionnelles protestantes : réformés, luthériens, baptistes, anglicans. Toutefois, les plus actifs sont sortis de ces familles et ont constitué des communautés à part.

Le méthodisme

Né au XVIIIe siècle, en Angleterre, comme mouvement de réveil religieux suscité par John Wesley, le méthodisme se propagea rapidement dans tout l'Empire britannique. L'indépendance des États-Unis en 1776 donna naissance à une Église wesleyenne épiscopale, distincte de l'Église méthodiste non épiscopale. Toutes les Églises méthodistes sont autonomes, reliées seulement entre elles par le Conseil méthodiste mondial (CMM) créé à Londres en 1881. Ses assemblées ont lieu tous les cinq ans depuis 1945. En France, le méthodisme s'est rallié, en 1938, à l'unité partielle réalisée par la constitution de l'Église réformée de France (ERF).

Un projet commun

Ce qui semble manquer à nos sociétés comme aux Églises, et donc au protestantisme, c'est la découverte d'un projet commun auquel chaque groupe humain concourrait avec ses propres particularités. Seulement ce projet commun n'existe même pas en espérance, et ceux auxquels s'accrochent les uns ou les autres ne se ressemblent que par leur commune imprécision.