Ces discussions privées n'empêchent nullement une seconde crise d'éclater quelques mois plus tard à l'occasion de la création, à Niamey, d'une Agence francophone de coopération culturelle et technique. Ottawa et Paris s'opposent de front à cette occasion, le gouvernement français voulant que des gouvernements non souverains — c'est-à-dire le Québec — puissent être membres de plein droit de la nouvelle Agence. Finalement, un compromis permettant au Québec de participer à l'Agence est trouvé, mais Ottawa ressent une vive amertume à la suite des pressions ouvertes de Paris.

Tensions avec Washington

Peu avant les élections législatives québécoises, la visite officielle de M. Sharp à Paris normalise les relations. À la fin du mois de mai, André Fanton, secrétaire d'État français à la Défense, rompt le premier avec la règle non écrite établie par le général de Gaulle interdisant aux membres du gouvernement français de se rendre en visite officielle à Ottawa. L'élection de Bourassa devrait renforcer cette normalisation, le nouveau gouvernement québécois ne contestant en aucune façon la souveraineté canadienne.

Sur le plan de la politique étrangère, plusieurs autres événements ou tendances sont à signaler :
– Rompant avec une tradition qu'il partage avec les États-Unis, le Canada établit en octobre 1969 des relations diplomatiques avec le Vatican ;
– Dans le cadre du réexamen de sa politique étrangère, il décide également une réduction importante de ses forces stationnées en Allemagne. Environ 5 000 des 10 000 hommes stationnés outre-Rhin seront rapatriés à l'automne 1970 ;
– À l'occasion d'un long voyage qui le conduit, au printemps, en Nouvelle-Zélande, en Australie, en Malaisie, à Singapour, à Hongkong et au Japon, E. Trudeau développe la vocation du Pacifique du Canada ;
– En même temps, on assiste à un durcissement des rapports entre Ottawa et Washington, surtout sensible dans le domaine économique. Le Canada ne cache pas sa volonté de conserver sous sa souveraineté certains secteurs économiques, comme celui de l'uranium, par exemple. C'est ainsi qu'Ottawa s'oppose, en 1970, au rachat par une compagnie américaine d'une des principales entreprises canadiennes productrices d'uranium. Ce geste, précédé par une diminution des quotas de pétrole canadien autorisés à entrer aux États-Unis, est très mal vu à Washington.

Il en est de même pour deux textes de loi, considérés comme anti-américains dans certains milieux de la capitale américaine ; le premier étend de 3 à 12 milles la limite des eaux territoriales canadiennes et le second, destiné à lutter contre la pollution dans l'Arctique, a pour effet de placer sous contrôle canadien tout transport de pétrole empruntant le passage du Nord-Est.

C'est sûrement un passage maritime qui intéresse fortement les États-Unis, car il permettrait d'évacuer une partie du pétrole de Prudho Bay en Alaska.

Augmentation du chômage

En politique intérieure, la scène est toujours dominée par la situation économique. La très dure politique anti-inflationniste imposée par E. Trudeau se traduit par une sérieuse augmentation du chômage, d'où une situation sociale tendue, marquée par de nombreuses grèves, notamment dans la fonction publique. L'un des inconvénients majeurs de cette politique anti-inflationniste, c'est qu'elle s'applique également à toutes les provinces, même à celles où le danger serait plutôt un risque de récession, comme le Québec et les Provinces-Maritimes.

Le gouvernement d'Ottawa décide le 1er juin de laisser flotter le dollar canadien et renonce au taux de change fixe (92,5 cents pour un dollar américain). Le ministre des Finances explique cette décision par la forte augmentation des réserves en devises.

États-Unis

203 216 000. 21. 1,3 %.
Économie. PNB (67) 4 037. Production (67) : A 3 % + I 37 % + S 60 %. Énerg. (67) : 9 828. C.E. (67) : 4 %.
Transports. (*67) : 24 451 M pass./km, 1 050 449 M t/km. (*67) : 80 059 300 + 15 522 900.  : 19 668 000 tjb. (*67) : 158 912 969 000 pass./km.
Information. (67) : 1 749 quotidiens ; tirage global : 61 560 000. (67) : *285 M. (67) : *78 M. (67) : 7 M de fauteuils ; fréquentation : 1 301 M. (67) : 104 073 849.
Santé (65). 288 671. Mté inf. (67) : 22,1.
Éducation (66). Prim. : *32 527 000. Sec. et techn. : *17 328 000. Sup. : 6 389 872.
Institutions. État fédéral. République présidentielle. Constitution de 1787. Président et chef de l'exécutif : Richard Milhous Nixon, élu le 5 novembre 1968 ; succède à Lyndon B. Johnson.

Une opinion de plus en plus divisée

Richard Nixon s'était engagé, peu après son accession au pouvoir, à « baisser le ton » de l'Amérique, en particulier dans sa politique vietnamienne. Plus d'un an après l'entrée du candidat républicain à la Maison-Blanche, c'est pourtant la situation en Asie du Sud-Est qui domine la scène américaine.