Amérique

Canada

21 089 000. 2. 1,9 %.
Économie. PNB (67) 2 805. Production (67) : A 6 % + I 38 % + S 56 %. Énerg. (67) : 8 060. C.E. (67) : 18 %.
Transports. (*67) : 5 045 M pass./km, 137 384 M t/km. (*67) : 5 771 900 + 1 505 000.  : 2 403 000 tjb. (67) : 11 102 048 000 pass./km.
Information. (66) : 113 quotidiens ; tirage global : 4 336 000. (67) : *12 050 000. (66) : *5 700 000. (66) : 647 800 fauteuils ; fréquentation : 99 M. (67) : 8 345 000.
Santé (66). 23 990. Mté inf. (66) : 23,1.
Éducation (66). Prim. : 3 768 875. Sec. et techn. : 1 521 646. Sup. : 372 275.
Institutions. État fédéral indépendant en 1931 (Statut de Westminster). Constitution de 1867. Gouverneur général représentant la Couronne britannique : Daniel Roland Michener. Premier ministre : Pierre Elliott Trudeau.

Victoire fragile du fédéralisme

Les élections législatives québécoises du 29 avril 1970 ont dominé la vie politique. Le thème central de la consultation a été, en effet, celui de l'unité canadienne. Les partisans du maintien du fédéralisme l'ont finalement emporté, sous la direction du nouveau chef du parti libéral, Robert Bourassa. Mais plus qu'une victoire, ce succès apparaît surtout comme un sursis.

Le succès du parti libéral, seule formation politique à avoir clairement pris position en faveur du fédéralisme, est indéniable : il remporte 72 des 108 sièges à pourvoir. La formation de Bourassa ne recueille cependant que 45 % des suffrages.

Le second parti (si l'on s'en tient au nombre de voix) est le parti québécois, qui prône depuis sa formation en 1968 l'indépendance politique, sinon économique, de la province francophone. Avec 23 % des suffrages, il réalise une progression importante : l'idée indépendantiste était totalement absente au début des années 1960 et les deux petites formations qui s'en étaient réclamées lors des élections législatives de 1966 n'avaient pas totalisé 9 % des voix. Avec près d'un quart des suffrages, le parti québécois ne peut cependant faire élire que 7 députés à l'Assemblée nationale.

Le Ralliement créditiste, sorte de mouvement poujadiste misant sur toutes les frustrations d'une société archaïque brusquement confrontée avec la civilisation industrielle, est autrement heureux : avec seulement 13 % des voix, il compte 12 députés élus. Le système uninominal à un tour, dont les effets sont multipliés par une carte électorale particulièrement inique, puisqu'elle favorise les circonscriptions rurales au détriment des zones urbaines, explique de tels écarts entre le vote populaire et le nombre de candidats élus. Le parti québécois, dirigé par un transfuge libéral, René Lévesque, bénéficie, en effet, d'une audience importante surtout dans les milieux populaires de Montréal.

Le grand perdant de la consultation est le parti de l'Union nationale, dont le chef, Jean-Jacques Bertrand, avait pourtant décidé de la date des élections, puisqu'il était au pouvoir. L'Union nationale ne recueille que 20 % des suffrages et envoie 17 représentants au Parlement de Québec. Par cette défaite, l'Union nationale paie, ses ambiguïtés sur les questions constitutionnelles (elle n'a pas voulu choisir entre fédéralisme et indépendance) et sur la question linguistique. Sa politique linguistique avait en particulier été critiquée à l'occasion du bill 63. Ce texte, adopté en novembre 1969, accorde aux parents le choix de la langue dans laquelle leurs enfants feront leurs études. Il prévoit bien l'étude d'une seconde langue pour les élèves comme pour les immigrants, mais sans mesures contraignantes.

Dans la mesure où seuls les Canadiens francophones pratiquent réellement le bilinguisme, ce texte a été dénoncé par les autonomistes et indépendantistes comme assurant le maintien des privilèges des anglophones et mettant dangereusement en cause, à long terme, l'avenir de la langue française au Québec.

Autre point faible de l'Union nationale : son immobilisme en matière de développement économique. Si les questions constitutionnelles ont dominé la consultation, les problèmes économiques ont également joué un grand rôle. Privé de nouveaux investissements en raison de l'instabilité politique, le Québec a très mal enregistré le contrecoup de la crise économique américaine. Le taux de chômage atteint presque 10 %, environ le double de celui de l'Ontario. La situation a été encore aggravée par la très stricte politique anti-inflationniste d'Ottawa.

Le gouvernement québécois

Premier ministre et ministre des Finances : Robert Bourassa ;
ministre du Travail, de la Main-d'œuvre et des Affaires intergouvernementales : Gérard Lévesque ;
ministre de la Justice, des Institutions financières, des Compagnies et des Coopératives : Jérôme Choquette
ministre de l'Éducation : Guy Saint-Pierre
ministre de l'Agriculture et de la Colonisation : Normand Toupin
ministre des Affaires culturelles : François Cloutier
ministre des Communications, responsable du haut-commissariat à la Jeunesse et aux Sports, chargé de l'Office franco-québécois : Jean-Paul l'Allier.

Un technocrate efficace

C'est en exploitant au maximum ces difficultés économiques que Robert Bourassa parvient à remporter les élections. Encore inconnu des électeurs québécois au mois de janvier, avant qu'il soit désigné, au cours d'un congrès extraordinaire du parti libéral, chef de la formation, Bourassa réussit assez vite à imposer l'image d'un jeune technocrate compétent, efficace et intègre. Plutôt que de se préoccuper des questions constitutionnelles qui opposent traditionnellement Québec à Ottawa, il insiste sur les difficultés économiques et sur la rentabilité du fédéralisme qui pourrait permettre de les surmonter. Son slogan, « créer 100 000 emplois en 1971 », résume assez bien cette tactique.