Engagée dans une politique de privatisation et de stabilisation sévère élaborée sous les directives du Fonds monétaire international, la Turquie connaît aussi de fortes tensions sociales qui provoquent à l'automne une longue grève de 350 000 employés du secteur public.

Chrono. : 2/01, 6/02, 6/03, 13/03, 20/03, 6/07, 20/09, 15/10, 24/12.

Chypre

1995 n'aura pas vu d'évolutions décisives dans le règlement du conflit entre la République de Chypre et la République turque de Chypre du Nord (RTCN, reconnue seulement par la Turquie). Cependant, la conjugaison de différents facteurs internationaux peut laisser entrevoir une issue. Tout d'abord, les États-Unis s'impliquent activement dans la recherche d'une solution. Avec la fin de la guerre froide, les États-Unis considèrent que les conditions sont désormais réunies pour régler ce vieux conflit, en adoptant la même démarche que pour le processus de paix israélo-arabe : impliquer toutes les parties concernées par le conflit, soit les responsables grecs, chypriotes et turcs. Des résultats ne doivent pourtant pas être attendus dans l'immédiat. L'échec de la rencontre de Londres en mai (une initiative des Britanniques et des Américains) en est la preuve : il reste difficile d'inciter les représentants des deux communautés à s'asseoir à la même table.

Néanmoins, le rapprochement entre la Turquie et l'Union européenne et les négociations pour l'adhésion de Chypre à l'UE devraient amener les deux pays à assouplir leurs positions. Ainsi, le maigre soutien manifesté par Ankara à l'égard du président de la RTCN, Rauf Denktash, lors de sa réélection d'avril montre que la politique chypriote de la Turquie est en train de changer.

Iran

La rivalité entre le président Ali Akbar Hachemi Rafsandjani et le « guide de la Révolution » Ali Khamenei continue à dominer la scène iranienne. Mais il s'agit moins d'une lutte pour le pouvoir entre « modérés » et « conservateurs » que d'une redéfinition du partage des pouvoirs entre le champ politique et le champ religieux, au moment où la République islamique d'Iran traverse une crise de légitimité. La question d'un aggiornamento de la Révolution commence à se poser face à la demande croissante de libertés politiques, de pluralisme et de modernité, alors que se poursuit la détérioration de l'économie et des conditions de vie.

Toujours accusé de soutenir le terrorisme international, l'Iran est également suspecté par les États-Unis de vouloir développer un programme nucléaire agressif, alors que l'activité diplomatique de l'année est tournée vers la négociation du traité de non-prolifération nucléaire (TNP). C'est ainsi qu'en mai les États-Unis interrompent leurs échanges commerciaux avec l'Iran et tentent de convaincre leurs alliés occidentaux et la Russie du bien-fondé de cette politique. La Russie reporte l'application d'un accord de coopération dans le domaine nucléaire (conclu avec l'Iran en décembre 1994), et les États-Unis réussissent à empêcher un accord commercial entre l'Iran et l'Azerbaïdjan, mais l'Union européenne et le Japon (les principaux créanciers et partenaires de l'Iran) refusent de suivre les États-Unis sur le terrain des sanctions commerciales. L'UE et ses États membres préfèrent entretenir un « dialogue critique » avec l'Iran. Les principales victimes de l'embargo sont les compagnies pétrolières américaines qui voient la compagnie française Total conclure un important contrat de prospection.

Sur le plan économique, la politique de privatisation, d'ouverture et d'incitation aux investissements étrangers, menée de manière un peu chaotique par le gouvernement, ne porte guère de fruits pour l'instant. L'embargo américain provoque une chute vertigineuse du rial et accélère l'inflation, qui atteindrait environ 55 %. Cela augmente les difficultés de la population et laisse craindre, pour cet hiver, des mouvements de protestation dans les centres urbains, lorsque les hausses du fuel, décidées au printemps, se répercuteront sur les produits agricoles récoltés en été et en automne. Les critiques envers la politique économique du gouvernement risquent également de se multiplier au Parlement, sensible au mécontentement populaire et aux protestations des marchands contre le contrôle des changes, alors que se préparent les élections législatives de 1996.