Un grave mécontentement populaire agite au contraire, à 450 km de là, l'archipel de Bahreïn. Sur fond de ressources pétrolières en baisse (20 millions de tonnes par an), la dictature de fait qu'exerce l'émir Isa ibn Salman al Khalifa au mépris de la Constitution (1973) est mal supportée par une population comprenant une majorité de chiites (environ 65 %) victimes d'une forte discrimination. Islamistes et libéraux dénoncent ensemble chômage, trafic d'emplois et arbitraire politique. La répression de leurs manifestations fait plusieurs morts.

Dans la péninsule voisine de Qatar, un coup d'État met fin aux vingt-trois ans de règne du cheikh Khalifa al-Thani, remplacé par son fils Ahmad (27 juin), un quadragénaire issu de l'école d'officiers de Sandhurst (Grande-Bretagne). L'Occident, qui poursuit sa course aux ventes d'armes dans la région, est plutôt satisfait de ce rajeunissement.

Au début de l'automne, les Émirats arabes unis font la une de l'actualité internationale : une jeune employée de maison philippine, Sarah Balabagan, condamnée à mort pour avoir poignardé son employeur qui l'avait violée, est sauvée grâce à l'intervention d'un comité de défense animé par Gisèle Halimi, avocate et militante des droits de la femme, et Marie-Claire Mendès-France, la veuve de l'ancien président du Conseil. Soucieux de sa réputation internationale, le gouvernement des Émirats finit par obtenir des tribunaux et de la famille de la victime la grâce de Sarah, condamnée cependant à un an de prison et à cent coups de fouet.

Chrono. : 27/06, 15/10.

Arabie saoudite

L'Arabie saoudite est toujours gouvernée, roi Fahd en tête, par la génération des fils du fondateur du royaume, Abdal al-Aziz III ibn Saud (v. 1880-1953). Point d'appui du contrôle géostratégique américain sur la région, l'immobilisme du système rassure ; un recyclage massif des pétrodollars par d'énormes achats d'armement malgré un endettement récent mais important (65 milliards de dollars) suscite à la fois intérêt et indulgence. L'Arabie Saoudite plaide à Washington pour le maintien de la production d'hydrocarbures à un niveau élevé (400 millions de tonnes par an) et justifie un système de prébendes qui profite pour l'essentiel, directement ou indirectement, aux 5 000 princes de la famille. Dans ces conditions, une contestation souterraine se répand chez les jeunes générations formées à l'école du libéralisme, chez les chiites (10 %) victimes de discriminations et chez des contestataires islamistes. Les femmes restent quant à elles totalement reléguées à l'écart de la vie publique. Le pouvoir pare à la montée des mécontentements par une répression dont la peine de mort par décapitation représente, avec plus d'une centaine de cas, le principal élément de dissuasion. Il donne tout son poids à un rigorisme islamique sans faille, imposé par un personnel religieux bien contrôlé.

Chrono. : 26/02, 13/11.

Yémen

L'islamisme quasi insurrectionnel qui a fait son apparition au Yémen est d'une tout autre nature. Les « miliciens » islamistes, dans les rangs desquels figurent des « afghans » algériens et égyptiens (anciens combattants de la guerre anti-soviétique d'Afghanistan), sont désormais la cible du président Ali Abdallah al-Salih, qui a décrété leur éradication, comptant s'attirer ainsi la sympathie de ses interlocuteurs étrangers. Mais, sur le plan intérieur, il lui faut d'autant plus composer avec les « modérés » du parti islamique Islah d'où sont issus les « extrémistes » que son propre parti, le Congrès populaire général, utile en période électorale, n'a pas d'existence réelle. Bien que généralement passées inaperçues à l'étranger, ces difficultés politiques ainsi qu'une faiblesse économique chronique préoccupante conduisent Sanaa à se rapprocher de Riyad et à renoncer de nouveau à toute revendication sur les trois provinces frontalières (Asir, Nadjran, Djizan) rattachées au royaume wahhabite en 1934. La prochaine délimitation de leurs 2 000 km de frontières communes devrait assainir leurs relations de voisinage.