On ne peut que se borner à évoquer ici les domaines les plus importants concernés par cette évolution. La fiscalité en est naturellement un. L'allégement de la taxe professionnelle et l'aménagement de la pratique du « carry back » devraient avoir des conséquences favorables.

Le problème de la transmission des entreprises déborde le cadre de la fiscalité. On constate, en effet, que bon nombre de PME disparaissent avec le départ de leur dirigeant, en l'absence d'héritiers naturels. L'importance des droits de mutation rend souvent la transmission impossible. Une loi de juillet 1984 organise une modalité nouvelle en France : la reprise d'entreprise par les salariés (RES), adaptée du Leverage Management Buy Out (IMBO) américain. Cette pratique consiste en un rachat d'une firme par ses salariés au moyen d'un endettement bancaire. La loi y associe l'octroi d'importants avantages fiscaux aux repreneurs à condition d'obtenir l'accord du ministère des Finances. Ce dernier semble jusqu'à présent particulièrement réticent à donner un avis favorable aux dossiers qui lui sont soumis.

L'aménagement du temps de travail est aussi l'objet de mesures législatives. Un projet de loi sur la flexibilité a été élaboré en novembre 1985. Avant même d'être discuté, il a été soumis aux attaques des syndicats, qui voient sans doute dans l'accroissement de la souplesse des relations employeurs-salariés une menace pour leur action.

Il faut, enfin, souligner les efforts déployés par le ministère de l'Éducation nationale pour assurer une meilleure coordination entre les formations initiales et permanentes et le monde professionnel. Des contacts plus étroits entre les entreprises d'une part, l'école et l'université d'autre part devraient conduire à une amélioration quantitative et qualitative du marché du travail et des formations.

Ces différentes mesures contribuent à créer des conditions favorables à une efficacité et à une indépendance accrues des entreprises. Le simple fait, pourtant, que l'on trouve les pouvoirs publics à leur origine, montre bien le chemin qu'il reste à parcourir avant que l'on puisse réellement parler en France de renouveau de l'entreprise. Pour des raisons de tempérament peut-être, d'histoire et de tradition certainement, la France occupe, dans ce courant, une situation en retrait de celle d'autres nations occidentales. Certes, elle participe à l'évolution commune mais ne le fait que timidement et selon des modalités parfois originales en raison de ses particularités. Elle ne pourra sans doute pas échapper à un renouveau encore plus profond des entreprises, lié au passage d'une économie de production traditionnelle à une économie d'information. Dès 1972, aux États-Unis, près de la moitié de la production nationale était constituée par des services d'information et leur part relative s'est sensiblement accrue depuis. Or, non seulement les entreprises produisent ces services, mais ce sont elles aussi qui en consomment l'essentiel. L'environnement dans lequel elles évoluent est donc profondément modifié.

Les règles de comportement et les valeurs se transforment. Pour n'en donner qu'un exemple, l'essentiel des actifs d'une entreprise ne sera plus constitué par les équipements qu'elle possède, mais par les connaissances qu'elle met en œuvre. Or celles-ci ne sont pas réellement la propriété de la firme, mais sont au contraire « incorporées » dans son personnel. Ce changement radical de situation ne peut donc que remettre en cause des pratiques et des institutions fondées sur l'usage de moyens de production matériels. Cette évolution ouvre des perspectives nouvelles d'autonomie aux entreprises.

Daniel Soulié