Jamais, sans doute, un parti n'a pu enlever la majorité absolue à la Knesset, dont les 120 députés sont élus à la proportionnelle intégrale. Il faut donc à la formation la mieux placée trouver le plus d'alliés possible parmi les députés des petits partis, afin de constituer une coalition de 61 sièges.

Mais, cette fois, Shimon Pérès se heurte au refus catégorique des quatre députés du Parti national religieux (PNR), qui auraient constitué pour les travaillistes la force d'appoint indispensable. Motif : le PNR ne veut pas participer à une majorité parlementaire qui serait tributaire de certains partis de gauche non sionistes.

Il ne reste plus qu'une solution : la coalition des deux grands partis rivaux, le Front travailliste et le Likoud. Si, après des semaines de laborieuses tractations, Shimon Pérès et Itzahk Shamir, continuateur de Menahem Begin, parviennent à surmonter leurs divergences idéologiques, il s'avère en revanche impossible de s'entendre sur la désignation du chef du gouvernement : S. Pérès estime que, avec trois députés de plus que le Likoud, cette fonction lui revient. Mais I. Shamir souligne que sept députés travaillistes se refusent à soutenir un gouvernement d'union nationale, ce qui prive donc S. Pérès de son avantage initial.

Les appels de l'intégrisme

L'un des enseignements à tirer des dernières élections législatives israéliennes est l'emprise grandissante sur la vie publique d'une nouvelle idéologie fondée sur le messianisme et l'ultranationalisme. Cette évolution, inquiétante à bien des égards, trouve son illustration avec l'entrée spectaculaire et très décriée à la Knesset du rabbin Meir Kahane, élu sur la liste du Kach, groupuscule ultranationaliste. D'abord exclu de la course électorale par la commission centrale chargée de superviser la campagne des législatives en raison de ses thèses « racistes et fascistes », le rabbin Kahane réussit, quelques semaines avant l'ouverture du scrutin, à faire casser cette décision. Alors qu'aux élections de 1977 et de 1981, il n'avait jamais obtenu plus de 5 000 voix, il recueille cette fois plus de 20 000 suffrages !

Quoique détesté par les travaillistes et désavoué par les conservateurs, le rabbin Kahane ne se laisse pas abattre. À peine élu, il demande aux ultras du parti d'extrême droite Tehiya de l'aider à obtenir l'amnistie de tous les terroristes juifs arrêtés en mars alors qu'ils préparaient des attentats meurtriers contre des civils cisjordaniens. Il reste que les thèses défendues par l'inquiétant leader du Kach sont tellement scandaleuses que même le rabbin Moshe Levinger, l'un des chefs du Gouch Emounim (Bloc de la foi) qui considère les terroristes juifs comme des « héros », évite de le fréquenter ouvertement.

Sans se manifester toujours de façon aussi excessive, la montée de l'intégrisme juif demeure néanmoins un phénomène indéniable. C'est sous la pression du parti religieux Agoudat Israël que la compagnie nationale El Al a dû renoncer à faire voler ses avions durant le sabbat. Ou encore que des manifestants se sont attaqués aux archéologues travaillant en Terre sainte, car la Loi religieuse interdit de profaner les sépultures.

« Il s'agit de savoir si Israël sera gouverné par des lois votées par le Parlement ou par celles édictées par Moïse ! » devait récemment s'exclamer l'ex-président israélien Navon.

A. L.

Tandem fragile

La solution finalement adoptée est pour le moins originale. À tour de rôle, chacun des leaders des deux grands partis deviendra président du Conseil. Pendant les 25 premiers mois, ce sera Shimon Pérès, chef du gouvernement, qui aura pour vice-Premier ministre et ministre des Affaires étrangères Itzhak Shamir. Ensuite, les rôles seront inversés, jusqu'au terme légal de novembre 1988. Autre disposition : pendant 50 mois, Itzhak Rabin, travailliste, gardera le portefeuille de la Défense, tandis que le Likoud conservera pour la même durée celui des Finances.

Enfin, subtilité supplémentaire, le ministre de la Défense comme celui des Finances auront comme adjoints un vice-ministre du parti rival. Compte tenu de la lourdeur et de la complexité de ce gouvernement d'union comptant 25 ministres (douze du parti travailliste, douze liés au Likoud et un du PNR), on décide de constituer un cabinet paritaire restreint de dix membres charges de traiter les dossiers les plus délicats, comme celui des colonies de peuplement.