Les Soviétiques, de leur côté, sont partisans d'une solution rapide au conflit, ne serait-ce qu'à cause de leur différend avec la Chine. Ensuite, le Viêt-nam du Nord vient de préciser sa position : Pham Van Dong, dans des déclarations à l'envoyé spécial du New York Times à Hanoi, Salisbury, a répété que les fameux quatre points n'étaient pas des préalables ; il a même exposé clairement que l'arrêt des raids américains contre son pays permettrait l'ouverture des discussions.

Semaine dramatique

Enfin, le voyage du chef du gouvernement soviétique à Londres coïncide avec la trêve du Têt (le premier de l'an vietnamien). Du 7 et 11 février à minuit, les combats ont cessé, les raids sur le Viêt-nam du Nord ont été suspendus.

Quels que soient les autres sujets de discussion entre Londres et Moscou, le Viêt-nam est le souci no 1 des deux partenaires. Aussi, au cours de cette dramatique semaine du 5 au 13 février, chacun va se faire l'avocat de négociations auprès des belligérants. Entre Washington et Hanoi, Londres et Moscou sont le chemin obligé de la paix. Cette paix pour laquelle, au même moment, Paul VI et Thant lancent un appel en demandant une prolongation de la trêve. Premier progrès : Harold Wilson obtient du président Johnson une prolongation de l'arrêt des raids.

La trêve s'est terminée le samedi 11 février à minuit. Le dimanche 12, les bombardements sur le Viêt-nam du Nord n'ont pas repris. C'est le dimanche de l'espoir. Mais, parallèlement, le chef de l'exécutif américain a demandé qu'Hanoi fasse un « geste », exprime par un « signe » sa volonté de paix.

Kossyguine s'efforce donc de convaincre ses alliés nord-vietnamiens de faire ce « geste » de réponse à la suspension des raids. En vain, Ho Chi Minh répond « non ». Les Américains, dit-il en substance, doivent mettre fin inconditionnellement à leurs bombardements. Le 13 au soir, les bombardiers américains pilonnent de nouveau le Viêt-nam du Nord. Une négociation pour rien.

Cette négociation manquée — la plus importante, celle qui a eu le plus de chance de réussir — conserve cependant, par son échec même, un caractère exemplaire. Elle manifeste le degré d'intransigeance atteint par les Nord-Vietnamiens et surtout par les Américains.

Impasse diplomatique

Le déclenchement des raids le 6 février 1965 fut, au départ, présenté par les États-Unis comme des représailles contre l'activité des viêt-congs au Viêt-nam du Sud. Mais les bombardements ont perdu rapidement ce caractère de punition. Ils sont aujourd'hui un des facteurs de la guerre au même titre que les opérations au Sud.

Aussi, quand Hanoi demande leur arrêt pur et simple, sans contrepartie, il n'exige rien d'autre que le retour à une situation dont l'aggravation incombe à Washington. Les Américains répliquent que l'aide apportée par Hanoi au Viêt-cong et les infiltrations d'unités nord-vietnamiennes au Sud justifient ces raids.

De fait, plusieurs divisions nord-vietnamiennes combattent au Sud. Mais ces infiltrations ont été, en partie, la conséquence des raids américains. Convaincus de leur bonne foi et de leur bonne cause, convaincus aussi d'emporter la victoire, les Américains sont entrés, au niveau diplomatique, dans la logique absurde du « que celui qui a commencé arrête ».

Les Nord-Vietnamiens, pour leur part, rejettent cette logique, estimant qu'il appartient d'abord aux Américains de cesser leur pression sur leur pays pour que soient réunies les conditions d'une négociation.

Cette impasse diplomatique trouve sa confirmation un mois plus tard.

En mars 1967, infatigable, Thant propose un nouveau plan de paix. Le secrétaire général de l'ONU propose cette fois un cessez-le-feu général suivi de la préparation d'une nouvelle conférence de Genève.

Les Américains acceptent, mais, inévitablement, les Nord-Vietnamiens rejettent ce qui leur apparaît comme une capitulation.

D'autres pays prennent alors la relève. Le Canada et Ceylan, notamment, tentent à leur tour de mettre sur pied des programmes de paix acceptables par les adversaires. En vain une fois de plus.

La parole aux militaires

Au printemps 1967, les militaires ont pris le relais des diplomates. La conférence de Guam, qui a réuni dans cette île du Pacifique, autour du président Johnson, les principaux responsables civils et militaires de la guerre, a décidé une intensification des raids contre le Viêt-nam du Nord et un développement des opérations au Sud. Le général Westmoreland, commandant en chef des forces américaines, demande de nouveaux renforts.