Initié par la Déclaration d'intention d'Oslo signée à Washington en septembre 1993, le processus de paix visait à liquider le contentieux israélo-palestinien né des guerres de 1948 et 1967. Mais l'arrivée au pouvoir de Benyamin Netanyahou à l'issue de la victoire électorale du Likoud en mai 1996 devait rapidement refroidir les enthousiasmes. Si les espoirs nés de la poignée de main entre Rabin et Yasser Arafat s'amenuisaient bientôt face à la multiplication des colonies israéliennes en Cisjordanie, l'implantation en février 1997, aux portes de Jérusalem, d'un nouvel établissement dénommé Har Homa portait un coup fatal au processus de paix.

Les États-Unis qui, dans l'euphorie de la guerre du Golfe, s'étaient considérablement investis pour amener autour d'une même table les principaux acteurs du contentieux israélo-arabe n'ont cependant guère apprécié les manœuvres dilatoires du Premier ministre israélien.

De Wye Plantation...

Aux yeux de Washington, B. Netanyahou devenait le principal responsable de l'enlisement du processus de paix. Donné cliniquement mort, ce dernier devait pourtant faire l'objet d'une ultime tentative de sauvetage : ce fut le mémorandum de Wye Plantation. Signé à Washington le 24 octobre 1998, Wye Plantation sera effectivement un geste d'urgence destiné à sauver davantage le « processus » que la « paix ». Mais un examen attentif du texte montre bien que ce n'est en fait qu'un de ces accords intérimaires tendant à l'application d'accords antérieurs, également intérimaires, et dont plusieurs clauses sont demeurées inexécutées. De plus, B. Netanyahou tirera argument d'une série d'attentats anti-israéliens intervenus à la fin de l'année pour différer l'application intégrale du mémorandum de Wye Plantation... sous l'œil résigné de l'administration américaine. Les choses en seraient restées là si les électeurs israéliens n'avaient pas rappelé aux affaires les travaillistes à l'issue des élections législatives de mai 1999.

... à Charm el-Cheikh

Autant B. Netanyahou aura mis d'entêtement à freiner l'application des accords d'Oslo, autant E. Barak va s'empresser de rassurer le monde arabe, l'opinion internationale et les États-Unis. Une posture qui devait déboucher sur la signature, le 4 septembre, par Ehoud Barak et Y. Arafat à Charm el-Cheikh, en Égypte, d'un document sur l'application des accords de Wye Plantation.

Ce document prévoit notamment la libération de 350 prisonniers palestiniens et la restitution par Israël de 11 % de territoires supplémentaires aux Palestiniens, qui, en janvier 2000, devraient aussi contrôler 40 % de la Cisjordanie, à l'exclusion de Jérusalem-Est. Reste donc en suspens la délicate question de l'État palestinien.

P. F.

La question de l'État palestinien

Peu avant les élections de mai 1999, les travaillistes avaient reconnu le droit des Palestiniens à un État, une manière de rendre la politesse à l'Autorité palestinienne qui venait de faire amender par le Conseil national palestinien la charte de l'OLP pour en supprimer les passages impliquant la liquidation d'Israël. Mais, plus encore que la question de l'État palestinien, c'est le statut de Jérusalem qui constitue, pour les deux parties en présence, l'enjeu majeur.

Colombie, une violence sans retour

Disparitions, exécutions sommaires – des milliers de morts chaque année – constituent le dramatique quotidien de la Colombie. Ici, l'État paraît littéralement débordé, voire inexistant, face à l'acceptation d'un haut niveau de violence sans équivalent sur le continent latino-américain.

De tous les pays d'Amérique latine, la Colombie reste celui où la situation apparaît la plus explosive. Les autorités ne peuvent que confesser leur impuissance à relancer un processus de paix moribond – les pourparlers avec la guérilla n'auront guère avancé en 1999 –, les perspectives économiques sont bouchées, les narcotrafiquants règnent en maîtres sur de larges pans du territoire national, et, de toutes les industries, la plus florissante est celle qui a pour objet l'enlèvement de personnes contre rançons. Violence et méfiance se déclinent à tous les échelons de la société, tandis que, sur une mer déjà agitée par le vent de la crise asiatique, le bateau Colombie fait eau de toutes parts.

Violences

Alors que l'espoir né de l'ouverture de discussions de paix entre les Forces armées révolutionnaires de Colombie – FARC, principal mouvement révolutionnaire – et le gouvernement du président Andrés Pastrana s'est envolé, la Colombie s'enfonce dans une violence totale qui, selon le secrétaire général de la Fédération internationale des droits de l'homme, « vise systématiquement ceux qui manifestent une opposition dans un pays qui n'en connaît pas ». S'il est vrai que l'histoire de l'Amérique latine est émaillée de coups d'État particulièrement sanglants, le niveau de la violence en Colombie échappe à toute comparaison. On se souvient que la commission Vérité et réconciliation au Chili avait recensé 2 700 cas d'assassinat et de disparition politiques au cours des dix-sept années de la dictature du général Pinochet. Mais ce chiffre, tout horrible soit-il, est inférieur à ce que connaît la Colombie chaque année. Ainsi, ce sont quelque 3 000 personnes qui ont trouvé la mort en 1999, victimes directes des affrontements armés. Selon la Fédération nationale des maires, 500 d'entre eux, sur les 1 081 que compte le pays, ont fait l'objet de menaces au cours de l'année écoulée, et le quart a été obligé de partager le budget de leur localité avec les différents groupes armés. Pour reprendre la main, A. Pastrana a présenté un plan destiné à rétablir la paix et l'activité économique. Le chef de l'État espère que ce plan, dont le coût est estimé à 7,5 milliards de dollars, lui permettra d'obtenir au cours des trois prochaines années 3,5 milliards de dollars d'aide de la communauté internationale, et en particulier des États-Unis. Mais, en présentant la lutte contre les narcotrafiquants comme sa priorité, le président Pastrana a déclenché une réaction violente des FARC, qui l'ont accusé de préparer une intervention américaine sous couvert de la lutte contre le trafic de drogue. Retour donc à la case départ.