Klaus Barbie : un retraité de l'horreur. Le visage mangé par ce vert de gris qui fut la couleur de son uniforme. À Lyon, il se dérobe à son procès et laisse son avocat, Me Verges, plaider non coupable. Les ombres des 48 enfants juifs d'Izieu et des 600 déportés du dernier convoi de la mort, où Juifs et résistants étaient mêlés, s'opposent en contraste. Accusatrices. Réclusion à perpétuité pour cet ultime survivant du nazisme, avant que la mémoire de ces années de glace ne s'enferme dans l'histoire.

Pierre Bois

Faits divers

En reculant, l'insécurité qui naguère faisait et défaisait les élections a perdu tout impact : sept mille agressions en moins, cinquante mille cambriolages évités deviennent des non-événements, et le ministre de l'Intérieur, Charles Pasqua, n'attire pas les gros titres en annonçant pour 1987 une baisse de 17,45 p. 100 des cambriolages et près du tiers des hold-up en moins. Pourtant, la politique musclée du gouvernement a payé, là, comme dans la lutte antiterroriste : la bande d'Action directe (Rouillan, Menigon, Aubron, Frérot) est sous les verrous. De même que 148 activistes iraniens, libanais, basques et séparatistes corses.

Côté fait divers, l'insolite, le spectaculaire dominent cette année creuse de la criminalité. À La Réole, on croirait du Simenon : Fanny Lazare, 49 ans, énergique P-DG d'une entreprise de transports, est assassinée. Le coupable, c'est le mari, qui perdait son ascendant au fur et à mesure de la progression sociale de son épouse. Un chauffeur routier résume : « La patronne était devenue pire que le patron. »

Le mystère d'Annecy : une double disparition. C'est de l'Agatha Christie. Une belle Eurasienne est enlevée le même jour qu'un médecin de Sisteron. Ni l'un ni l'autre ne se connaissent, ils vivent à 250 km de distance et, pourtant, leurs pistes sont confondues.

Jacques Hyver réussit l'évasion de l'année en empruntant une benne à ordures. Sa « belle » échauffe les esprits : une révolte éclate et toute la centrale de Saint-Maur, près de Châteauroux, est incendiée.

Enfin, une version inédite de la criminalité spectacle. Simone Weber est toujours accusée d'avoir découpé son amant. Son défenseur propose une reconstitution, hémoglobine garantie : il désossera un animal à la meule à béton pour prouver qu'il était impossible à sa cliente d'avoir ainsi tronçonné sa victime. La Justice interdit cette expérience médiatiquement sauvage, et l'avocat s'indigne de cette entrave à la liberté de démonstration.

Pierre Bois

Enseignement

En France, le ministère de l'Éducation nationale exerce son autorité sur 14 095 142 enseignés. Second employeur du monde après l'Armée rouge, il rétribue 1 125 629 personnes dont le coût s'élève en 1987 à 189,9 milliards de francs, soit 18,1 p. 100 du budget de l'État.

Ces chiffres soulignent la lourdeur de la tâche de René Monory. Les problèmes à résoudre sont nombreux. Un crédit de « 1,2 milliard de francs pour l'éducation » dans le prochain collectif budgétaire doit aider les régions à rénover les lycées. La baisse de la natalité, la campagne de promotion du ministère en faveur du métier d'instituteur pallient, provisoirement, la crise du recrutement dans l'enseignement primaire où l'encadrement des enfants doit être mieux assuré grâce à la création de 8 000 postes de maîtres directeurs auxquels ont postulé 30 000 candidats. Pour relever le niveau des enseignants, le ministère exige que les élèves instituteurs soient titulaires d'un DEUG ; il arrête le recrutement des PEGC et leur ouvre l'accès à l'échelle de traitement des professeurs certifiés par la création en 1987 d'un CAPES interne ; il élabore même une loi programme pour ajuster les flux scolaires et le recrutement des personnels aux besoins en formation sur cinq à dix ans. Mais comment éviter que cette amélioration du corps enseignant n'aggrave la crise des vocations alors qu'à niveau égal le secteur privé offre des salaires doubles de ceux que propose l'État à un instituteur, à un professeur certifié ou à un professeur agrégé débutants (respectivement 5 800, 6 400 et 7 000 francs nets par mois) ? Et ce ne sont pas les liens que les écoles normales supérieures nouent avec les entreprises de pointe qui arrêteront l'hémorragie des professeurs de physique ou de mathématiques... Dans ces conditions, il serait surprenant que 80 p. 100 des Français atteignent le niveau du baccalauréat et que l'Université compte 2 millions d'étudiants en l'an 2000.