Quant à la thérapeutique du déficit immunitaire de base, nécessaire à la guérison des patients, elle a recours à deux types de traitements :
1) Traitement antiviral, en vue d'agir sur le virus en le détruisant ou en empêchant sa multiplication. Plusieurs médicaments antiviraux, anciens ou nouveaux, tels que Suramine, Ribavirine, HPA 23, sont utilisés ou en cours d'expérimentation (Azidiothymidine ou composé S). Ils ont en général un effet inconstant ou transitoire.
2) Traitement immunomodulateur en vue de restaurer le système immunitaire. Le traitement immunostimulant, le plus logique, vise à augmenter le nombre des lymphocytes T4 (transfusions de moelle osseuse, interféron α, interleukine 2, isoprinosine). Mais il s'est avéré plus dangereux qu'utile, car, en même temps qu'il stimule les lymphocytes, il dissémine le virus, qui, grâce à sa transcriptase inverse, s'est intégré à leur noyau dont il est indissociable. Le traitement inverse, apparemment paradoxal, utilise un médicament immunosuppresseur bien connu, la ciclosporine (employée depuis longtemps pour éviter les réactions de rejet après les greffes d'organes). En inhibant l'activité des lymphocytes infectés, on espère bloquer la multiplication du virus, mais on prend le risque d'achever la destruction immunitaire en s'attaquant aux quelques lymphocytes T4 encore épargnés par le virus. Les conditions dans lesquelles ce traitement a été expérimenté ne permettent pas un jugement sur son efficacité.

En définitive, il n'y a pas à l'heure actuelle de traitement spécifique du Sida et aucun cas de récupération immunitaire n'a encore été rapporté.

La psychose du Sida

De nos jours les grandes parasitoses continuent à décimer des populations. La bilharziose atteint 300 millions de personnes dans le monde, le paludisme menace un milliard d'hommes, en touche 400 millions et tue 1 million d'enfants tous les ans. En France, 120 000 personnes meurent chaque année du cancer. En regard de ces chiffres, le Sida, même en progression, reste une affection très rare.

L'intérêt assez trouble qu'il suscite dans le public, entretenu par les médias et amplifié par le monde du spectacle, est dû sans doute à la triade qui se trouve réunie : le sexe, le sang et la mort.

L'intérêt que lui porte la communauté scientifique est d'un autre ordre. À une époque de certitudes, elle accepte difficilement de se heurter à une maladie – un « mal », pourrait-on dire comme au Moyen Âge – qui ne se laisse pas cerner et échappe à la thérapeutique.

L'exemple de la maladie du légionnaire rappelle cependant qu'une maladie « mystérieuse » ne le reste pas très longtemps ; celui de l'hépatite virale B, qui présente de nombreuses analogies avec le Sida et qui a fait beaucoup plus de victimes, montre qu'un excellent vaccin peut être mis au point contre une maladie virale meurtrière. Il est raisonnable de croire qu'à moyen terme le Sida deviendra une maladie comme les autres, accessible à une prévention et à une thérapeutique efficaces.

Dr Georges de Corganoff