La naissance, en avril, au Queen Victoria Hospital de Melbourne, dans le service du docteur Carl Wood, de Zoé, premier enfant ayant vu le jour après avoir été congelé, à l'état d'embryon, puis réchauffé, prouve que cette technique est possible sans risques apparents. En France, elle reste pour l'instant interdite, l'Institut national de la recherche médicale estimant n'avoir pas encore suffisamment de preuves que cela ne portera pas préjudice à l'enfant. Les embryons congelés français restent donc, jusqu'à nouvel ordre, dans le congélateur de quelques centres qui en possèdent parce qu'ils effectuent des fécondations en éprouvette. Le Comité national d'éthique, mis en place en décembre 1983 par le président François Mitterrand et que préside le Pr Jean Bernard, est saisi de ce problème.

Un précédent

Il existe d'autres façons de donner des enfants à des couples qui ne peuvent normalement en avoir, du fait de la stérilité de l'un ou de l'autre. La plus ancienne est l'insémination artificielle, qui utilise des spermatozoïdes conservés au froid, qui proviennent soit du mari, soit d'un donneur anonyme. Cette méthode a connu les feux de l'actualité, en 1984, avec le jugement rendu par la tribunal de Créteil, qui a accédé à la demande d'une jeune femme, Corinne, laquelle voulait être inséminée avec le sperme déposé par son mari, à la veille de subir un traitement contre le cancer risquant de le rendre stérile.

Le malheureux mourut et la jeune veuve souhaitait un enfant posthume. Mais la règle des CECOS, les centres de conservation du sperme, qui existent dans une quinzaine d'hôpitaux français, s'y opposait. Leur éthique, non codifiée, pose que ce sperme est conservé au froid pour être rendu au mari, après sa guérison, afin d'être utilisé dans le cadre du couple. C'est la même règle qui, en cas d'insémination avec les spermatozoïdes d'un donneur anonyme, lorsque le mari est stérile, commande que ces spermatozoïdes soient utilisés par un couple — ce qui exclut leur don à des homosexuelles ou à des femmes seules, lesquelles en font parfois la demande.

Le cas de Corinne est un précédent qui suscite des controverses. Les uns se félicitent que le tribunal ait accédé au désir d'enfant de la jeune veuve. Les autres s'inquiètent du devenir psychologique d'un enfant qui naîtra ainsi dans d'étranges conditions, d'un homme mort dont aucun texte écrit ne prouve qu'il souhaitait réellement cette utilisation de sa semence.

Ces exemples montrent la perplexité des moralistes et des hommes de loi devant ces avancées fulgurantes de la biologie de la reproduction, qui donnent les moyens de faire naître des enfants malgré la stérilité du couple. Dans tous les pays, on s'inquiète du développement possible de ces méthodes et des conséquences qu'elles pourraient avoir. En Grande-Bretagne, une commission, formée de seize sages et présidée par Mary Varnock, réclame l'interdiction des intermédiaires qui se sont formés dans le pays, à l'image de ce qui se fait aux États-Unis, pour que des mères porteuses fassent des enfants avec la semence du mari, pour le compte de femmes stériles.

En France, le Comité national d'éthique a condamné cette pratique des mères de substitution qui tombe d'ailleurs sous le coup des textes réglementant l'adoption et interdisant l'incitation à l'abandon d'enfant. Mais il reste au Comité à se prononcer sur d'autres questions que lui posent biologistes et médecins. Ceux-ci sont, en effet, eux-mêmes dépassés par leurs techniques et réclament des pouvoirs publics d'être éclairés sur ce qu'ils doivent faire. La réponse à cette interrogation est difficile à formuler, tant les révolutions en matière de conception touchent à des domaines secrets et mystérieux, sur lesquels la science jette une lueur si vive qu'elle nous éblouit.

Robert Clarke

Médecine

La peur du SIDA

Le secrétaire américain à la Santé a fait sensation en annonçant solennellement le 23 avril à Washington que la « cause probable » du SIDA (Syndrome d'Immunodéficience Acquise) avait été découverte. Il s'agirait d'une variante d'un virus du cancer, appelé HTLV-3 (Human T-cell Lymphoma Virus). Un nouveau procédé a été mis au point pour produire ce virus en grande quantité, permettant la réalisation d'un test sanguin, qui pourrait être disponible à la fin de l'année. Margaret Heckler ajoutait que ce test permettrait d'identifier les victimes du SIDA avec près de 100 % de certitude, et devrait conduire à la production d'un vaccin dans les prochaines années. Déclaration un peu prématurée à divers titres.