Jusque-là, l'amélioration de l'activité économique s'est accompagnée d'une inflation très faible. Pour les cinq premiers mois de l'année, le taux annuel de la hausse générale des prix n'est que de 3 % (contre 3,9 % en 1982). À compter du deuxième trimestre, seul l'infléchissement de la reprise va permettre d'éviter un retour aux tendances inflationnistes. Plusieurs facteurs empêchent en effet le phénomène de relance d'être aussi vigoureux que ceux qui avaient suivi les autres récessions de l'après-guerre : la flambée du dollar, qui freine les exportations ; le maintien des taux d'intérêt à un niveau anormalement élevé compte tenu de la modicité de l'inflation ; la démesure du déficit budgétaire, qui devrait atteindre la somme de 192 milliards pour 1983-1984.

Les grandes banques décident, en février, de ramener leur taux de base (prime rate) (c'est le taux d'intérêt privilégié qu'elles consentent à leurs meilleurs clients) de 11 % à 10,5 %, le chiffre le plus bas depuis novembre 1978. Le président Reagan, le secrétaire au Trésor Donald Regan et Paul Volcker (qui se verra confier en juin un nouveau mandat de quatre ans à la tête de la Fed, la Réserve fédérale) préconisent alors la poursuite de ce mouvement de repli. C'est pourtant l'inverse qui va se produire six mois plus tard : en août, les principaux établissements bancaires portent de nouveau leur prime rate à 11 %. Entre-temps, la reprise, d'une part, l'expansion de la masse monétaire, d'autre part, sont plus fortes et plus rapides que prévu. En outre, les demandeurs de crédits du secteur privé, stimulés par la relance, se trouvent en concurrence, sur le marché financier, avec l'État fédéral qui, faute d'une augmentation de la pression fiscale, doit financer ses déficits budgétaires en empruntant, mais n'en continue pas moins à faire de la lutte anti-inflationniste son objectif prioritaire.

Impôts

En matière fiscale, R. Reagan se dit prêt, le 19 mai, à gouverner à coups de veto pour empêcher toute augmentation des impôts. Il lance cette mise en garde après que le Congrès a voté plusieurs résolutions révisant de fond en comble le projet qu'il avait présenté le 31 janvier devant les parlementaires. Finalement, il obtient gain de cause : la dernière tranche de réductions d'impôts, pierre angulaire du programme économique mis en œuvre par le président dès son arrivée au pouvoir, entre en vigueur le 1er juillet. En trois ans, les barèmes de l'impôt sur le revenu ont été ainsi diminués de 25 % (5 % le 1er octobre 1981, 10 % le 1er juillet 1982 et 10 % le 1er juillet 1983). Cependant, l'effet de la réduction de la pression fiscale est en partie annulé par d'importantes augmentations des impôts locaux décidées par les municipalités et les États, obligés d'accroître leurs ressources du fait de la baisse de l'aide fédérale.

Dollar

Le mécanisme de l'argent cher rend évidemment le dollar attractif et draine vers les États-Unis les capitaux du monde entier à la recherche de placements rémunérateurs. Mais, dans le même temps, il accentue la surévaluation du billet vert par rapport aux autres monnaies, favorise les importations étrangères, freine les investissements et aggrave le déficit de la balance commerciale (cause de la perte de centaines de milliers d'emplois). À la fin de l'été, les experts prévoient déjà que celui-ci s'établira aux alentours de 70 milliards de dollars en 1983, au lieu de 42,7 milliards en 1982. Autre point noir : la baisse sensible des productions céréalières (– 14 % pour le blé, – 38 % pour le maïs, – 20 % pour le soja), due à une longue sécheresse et à une forte réduction des surfaces ensemencées.

Dialogue de sourds avec l'URSS

Abordant, le 12 janvier, la question des euromissiles, au cœur du débat entre Washington et Moscou, la Maison-Blanche souligne que l'option zéro (liquidation de tous les missiles terrestres à portée intermédiaire) demeure la « principale proposition » des États-Unis et que « toute réduction (des missiles soviétiques) qui s'écarterait de cette option préserverait l'avantage dont jouit l'URSS ». Le même jour, Kenneth Adelman est nommé à la tête de l'Agence américaine pour le contrôle des armes et le désarmement, en remplacement d'Eugene Rostow qui, quelques mois plus tôt, s'était montré favorable à la discussion d'un accord s'écartant de l'option zéro.

Toutes les forces nucléaires

Peu après, à Bonn, le ministre soviétique des Affaires étrangères, Andrei Gromyko, rejette l'option zéro et propose que les forces nucléaires française et britannique soient prises en compte dans les négociations de Genève. Il se heurte à un non catégorique du secrétaire à la Défense, Caspar Weinberger. Toutefois, le 25 janvier, dans son traditionnel Message sur l'état de l'Union, R. Reagan use d'un langage plutôt conciliant à l'égard des Soviétiques. Et le 27, lors de la reprise des négociations de Genève, le chef de la délégation américaine, Paul Nitze, assure qu'il n'est pas « enfermé » dans l'option zéro et qu'il souhaite « explorer toute possibilité d'atteindre un accord équitable ». Le 31, R. Reagan fait lire à Berlin-Ouest par le vice-président George Bush une lettre ouverte aux Européens, dans laquelle il propose à Youri Andropov de le rencontrer pour signer un accord bannissant les missiles nucléaires à moyenne portée. Réponse négative du Kremlin, qui ne voit là « rien de nouveau ».