Qu'il existe une grande peur nucléaire ou, atout le moins, une certaine inquiétude atomique, tout le monde en convient. La seule question à laquelle il importe de répondre est claire : sont-elles justifiées ?

Défaillances

Depuis Hiroshima, le public a tendance a confondre nucléaire et bombe atomique. Or, une centrale nucléaire n'est pas une bombe et ne peut, en aucun cas exploser spontanément. N.C. Rasmussen (département d'ingénierie nucléaire du MIT) le rappelait à l'issue d'une enquête menée pendant deux ans dans 50 centres américains utilisant des réacteurs à eau : « Il est physiquement impossible qu'un réacteur explose comme une bombe atomique. »

Il existe cependant deux types d'accident :
– une défaillance séquentielle conduisant à la fusion du combustible par surchauffe ;
– une défaillance du confinement et de l'épuration de la radioactivité.

La fusion du combustible survient à plus de 2 800° à la suite d'un défaut de refroidissement. Mais, en cas d'emballement thermique, les systèmes de sécurité stoppent automatiquement le réacteur ; la réaction en chaîne étant arrêtée (la rupture de la cuve elle-même est improbable), il convient d'évacuer la chaleur emmagasinée. Une cause imprévue (la perte brusque d'alimentation électrique, par exemple) entraîne l'arrêt d'urgence du réacteur.

Quant aux accidents de confinement (éclatement du bâtiment par surpression ou par impact de missiles internes consécutifs à une fusion du cœur), ils paraissent improbables en raison de l'importance des dispositifs de sûreté. Une centrale nucléaire dispose toujours de plusieurs dispositifs de secours (trois sortes de pompes, par exemple) qui prennent le relais du système principal s'il venait à être défaillant ou détruit.

17 siècles

La conclusion de l'enquête américaine est très nette : « La probabilité d'un accident de fusion du cœur est estimée par réacteur et par an à 1/17 000, ce qui équivaut, pour 100 réacteurs semblables (prévisions américaines pour 1980), à 1 accident tous les 170 ans. Mais un tel accident n'entraîne pas nécessairement des conséquences pour la santé du public. Seul un accident sur dix entraînerait de telles conséquences, dont la probabilité moyenne est ramenée, pour 100 réacteurs, à tous les dix-sept siècles. »

Restent les causes externes pouvant être à l'origine d'un accident :
– un tremblement de terre peut certes endommager la centrale, mais elle resterait sûre vis-à-vis de l'extérieur ;
– la chute d'un gros avion (du type Boeing) serait sans effet sur le réacteur, qui est un blockhaus de béton armé et d'acier ; seules, les installations annexes pourraient être endommagées ;
– l'irruption d'un commando (véritable commando-suicide en raison de l'irradiation) dans le confinement et l'attaque de la chaudière elle-même par explosifs, afin d'obtenir une fuite, semble difficile à réaliser.

Le grand danger, pour beaucoup, se situe au niveau des radiations dégagées par une centrale ou une usine de retraitement ; danger estimé très important. En fait, et une communication soviétique présentée au congrès en a apporté la preuve, à égalité de puissance énergétique, une centrale électrique au charbon rejette plus de radioactivité qu'une centrale nucléaire.

À quelle place se situe alors l'industrie nucléaire dans la radioactivité générale ? Très exactement, la dernière. Les centrales nucléaires ne constituent, à elles seules, que 1/1 000 de la radioactivité ambiante.

Irradiation

Un rapport du Comité scientifique de l'ONU (l'un des organisateurs du congrès) précise que la source principale de l'irradiation de l'humanité est constituée par l'irradiation naturelle de l'atmosphère : de 35 millirems par an au niveau de la mer à 70 millirems par an à 1 000 m d'altitude, en Europe. En deuxième position se situe l'irradiation médicale avec les examens radiologiques (50 millirems). Vient ensuite l'irradiation artificielle due à l'habitat (les matériaux de construction sont tous radioactifs). L'irradiation due aux essais nucléaires figure en quatrième position (elle constitue quelques pour-cent de l'irradiation totale), puis viennent l'irradiation liée aux transports aériens modernes en haute altitude (moins de 1 %) et celle due aux montres et aux cadrans luminescents (2 millirems par an). Enfin apparaît, en dernier, l'irradiation dégagée par l'industrie nucléaire. On estime qu'en l'an 2000, si 50 pays du monde ont multiplié par 20 leur puissance en installations nucléaires, l'irradiation qu'elles dégageront alors constituera environ 2 % de l'irradiation totale.