En hiver, après une série de meetings en plein air, le Peace People a concentré son action sur la jeunesse ; pour pallier le fait que, dès leur plus jeune âge, les enfants reçoivent une éducation différenciée selon qu'ils sont catholiques ou protestants, ce qui marque déjà la division.

Ombres

En plus des causes de disputes internes aux Églises pour motifs doctrinaux ou éthiques souvent similaires, c'est la grande ombre de la persécution qui a plané sur l'immense majorité des croyants.

Funestement concrète dans les pays socialistes, dans de nombreux États africains et asiatiques, dans toute l'Amérique du Sud, elle est redoutée même en Europe occidentale. Le Conseil œcuménique des Églises (COE), lors de la session 1976 de son comité central, en août à Genève, comme la commission pontificale romaine Justice et Paix n'ont pas hésité à mobiliser leurs forces pour dénoncer, malgré l'opposition prudente des délégués officiels de l'Est, le long génocide perpétré en URSS. Ils ont mis également tout en œuvre pour que cessent arrestations et tortures dans des pays comme l'Argentine, où l'Église d'hier porte une lourde responsabilité. Le résultat bénéfique (si on peut dire) de ces persécutions aura été la découverte d'une forme inattendue d'unité, dans la souffrance. Cela s'est vu à l'occasion de protestations catholiques-protestantes-orthodoxes, à Genève, à Rome, en France et ailleurs. Cela s'est vu au moment du drame de centaines d'enfants noirs à Soweto, en République sud-africaine (ou à propos de la proclamation unilatérale d'indépendance du Transkei par ce régime raciste), ou dans les alertes incessantes sur les atteintes aux droits de l'homme lancées auprès de l'opinion publique par Amnesty International et par des mouvements nationaux comme l'Action des chrétiens pour l'abolition de la torture (ACAT).

Lumières

Au milieu de ces ombres, il y a eu d'autres lumières : la publication de la Traduction œcuménique de la Bible (TOB) française en un seul volume après onze années d'efforts. Au même moment, Paul VI recevait le Nouveau Testament de la TOB italienne, et, six mois plus tard, un million d'exemplaires en étaient achetés, tandis que seize TOB en d'autres langues parvenaient à leur terme.

Par ailleurs, l'ordination des femmes était acceptée par l'Église d'Angleterre et l'Église épiscopale du Canada. L'Église luthérienne de Suède célébrait, d'autre part, à Paris, en novembre, avec le concours des hautes autorités catholiques et protestantes, le 350e anniversaire de la première paroisse luthérienne en France. Enfin, et pour la première fois, une femme, Lois Wilson, était élue présidente du Conseil chrétien des Églises au Canada et une autre, secrétaire générale de la Conférence des Églises de toute l'Afrique (CETA).

Une lumière spéciale a encore été donnée par Taizé et son prieur, le frère Roger. Après sa rencontre avec Mère Teresa à Calcutta, une 2e Lettre au peuple de Dieu a été rendue publique, lors d'une cérémonie de grande affluence en Notre-Dame de Paris. Le prieur s'est rendu ensuite à Zurich puis à Madrid. Voici ce que déclare, entre autres, cette Lettre : « [...] Les structures qui soutiennent l'injustice internationale doivent être changées à tout prix. C'est le besoin réel de tous les hommes, jusqu'au dernier des derniers, qui est la référence, et non pas la satisfaction des besoins de l'homme occidentalisé [...] Si l'Église abandonne tout ce qui ne lui est pas absolument essentiel [...] alors elle participera à la guérison des blessures de la famille humaine. Elle fera vaciller les structures d'injustice, elle pourra renverser les vagues du pessimisme et nous arracher à l'actuelle crise de confiance en l'homme [...]. »

Orthodoxes

L'orthodoxie, malgré l'apparence d'un statu quo fortement enraciné, ne manque pas de manifester, ici ou là, des signes de changement. L'autocéphalie des Églises orthodoxes, par l'impression de division qu'elle donne, cache souvent l'unité de la marche vers de nouvelles formes de vie.

En effet, quel contraste à ne voir la vie religieuse orthodoxe que sous l'un de ces deux angles :
– celui qui semble avoir marqué l'année orthodoxe russe : le patriarcat de Moscou faisant imprimer 75 000 exemplaires d'une nouvelle édition du Nouveau Testament, avec une nouvelle division thématique du texte ;
– celui qui constitue la réalité quotidienne de l'Église d'Albanie, à savoir la survivance de cette dernière dans les catacombes (fait indirectement avoué en juillet 1976 par le journal officiel de l'État albanais), malgré la persécution et l'interdiction de la vie liturgique par le 5e Congrès du parti communiste albanais en 1967, qui a supprimé les droits reconnus à l'Église albanaise en 1950.