Le 7 février suivant, sept missionnaires (trois jésuites et quatre religieuses) sont assassinés par des guérilleros à Masami, à 80 kilomètres de Salisbury. Le 24 mars, enfin, Mgr Lamont est expulsé de Rhodésie.

Protestants

Soumis, comme tout le monde, à la double pression de l'interdépendance forcée des peuples et des relations inter-ecclésiastiques, c'est essentiellement dans ces domaines que le protestantisme se sera manifesté cette année. C'est dire que cela lui aura valu des crises similaires à celles que connaît l'Église romaine.

Politique

Comme le catholicisme, le protestantisme a été victime des totalitarismes sévissant dans la majeure partie du monde. Tandis que le pasteur baptiste G. Vins voyait, grâce à l'opinion publique alertée, sa peine très légèrement adoucie dans son Goulag soviétique, 14 pasteurs signataires de la Charte 77 tchécoslovaque étaient vivement inquiétés.

Dans le même temps, le 17 février 1977, le Dr Janani Luwum, archevêque anglican de Kampala, était assassiné par les hommes de main du chef de l'État ougandais, et le professeur méthodiste du séminaire de théologie de Buenos Aires, Mauricio Lopez, était enlevé à Mendoza, sans que les protestations parvenues à toutes les autorités argentines aient le moindre effet. Deux noms, d'ailleurs, parmi de très nombreux autres protestants, pasteurs, laïcs hommes et femmes, arrêtés, torturés, violés, disparus, tant dans des pays d'Amérique du Sud et d'Amérique centrale que dans des pays de l'Est, en Afrique, en Indonésie ou en Asie.

La nationalisation du poste de radiodiffusion intercontinental La Voix de l'Évangile, qui avait coûté des millions de dollars aux luthériens et qui employait à Addis-Abeba des centaines de journalistes, aura été une autre forme de totalitarisme.

Ces exemples suffisent à établir que le protestantisme est solidaire de l'Église universelle, retrouvant sa vocation fondamentale parce qu'elle doit prendre la défense des droits de l'homme bafoués. N'a-t-on pas vu, même en Europe occidentale, des émissions religieuses censurées, en France, pour avoir dénoncé certains régimes policiers africains ou, en Allemagne fédérale, d'autres protestants comme le président d'Église évangélique Ernst Willm, se faire railler ou rappeler à l'ordre pour avoir réclamé la libération de Rudolph Hess, emprisonné depuis 1945, ou pour avoir protesté contre un système de torture spécial infligé à des prisonniers ?

Crises

Les actions diverses du protestantisme en faveur des libérations, y compris celles des femmes et des jeunes, sur le plan, notamment, de l'éthique sexuelle, auront provoqué en son sein des divisions semblables à celles qu'ont suscitées dans le catholicisme les fidèles de Mgr Lefebvre.

En Europe, aux USA et même en Afrique, des mouvements intégristes accusent le protestantisme d'être politisé, voire d'être cryptocommuniste. Refusant de comprendre que le fait de se ranger aux côtés des peuples néocolonisés, des minorités opprimées, des femmes séculairement dominées par les hommes, des jeunes abandonnés sans idéal ni avenir... est dans le droit fil de l'Évangile libérateur, ces groupes intégristes font, sans le savoir, la pire politique qui soit : une politique rétrograde, fondée sur le maintien de l'ordre et du statu quo. En France sont nés des groupes, animés par des pasteurs, jugés tellement dissidents qu'ils ont été exclus de la communauté protestante. En Allemagne fédérale s'est tenu, en mai, à Dortmund, un 3e Rassemblement paroissial à l'écoute de la Parole, sous le titre Le Seigneur qui revient. Or, cette initiative de tendance intégriste prend le contre-pied des fameux Kirchentag créés voici des années pour ouvrir l'esprit des jeunes aux problèmes du monde moderne. Celui de 1977 s'est réuni à Berlin-Ouest — thème significatif : Porter les fardeaux les uns des autres — et il a rassemblé, du 8 au 12 juin, plus de 300 000 participants.

On trouve les mêmes exemples de clivage en Europe, aux USA, en Amérique du Nord et du Sud, en Afrique.

Les questions d'éthique divisent aussi beaucoup. Si le protestantisme est, dans sa majorité, favorable à la libéralisation du divorce ou de l'avortement, ce n'est pas qu'il approuve ces échecs, mais parce que, pour lui, le message évangélique annonce le pardon et jamais l'interdit. Or, certains groupes protestants, au nom d'une lecture littérale de l'Écriture et d'une tradition d'ordre, condamnent avec énergie toute ouverture dans ces domaines.

Faits et gestes

La Fédération protestante de France (FPF) a été le lieu de deux faits notables. C'est, d'abord, l'entrée en son sein d'une Église aussi peu traditionnelle qui soit : La Mission évangélique tzigane, forte de près de 100 000 membres et animée par le pasteur pentecôtiste Charles Le Cossec. L'autre fait est l'élection d'un nouveau président de la FPF, le pasteur Jacques Maury, président jusqu'à cette date de l'Église réformée de France. Il succède au laïc Jean Courvoisier, après avoir participé au synode national de cette Église tenu fin mai à Angers avec, précisément, pour thème : Éthique sexuelle et familiale, et pour principal orateur l'écrivain protestant français, France Quéré.