Le dernier événement de l'année aura été la 6e Assemblée de la Fédération luthérienne mondiale, à Dar es-Salam en Tanzanie. Cette manifestation, où les délégués représentent quelque 80 millions de luthériens répartis dans le monde entier, a été centrée sur le thème : Vers une nouvelle communauté. Ce qui est une manière de poursuivre une quête d'identité et une façon de rechercher le rôle du protestantisme dans le monde technicisé et dur d'aujourd'hui. En revanche, l'Alliance réformée mondiale (autre famille protestante tout aussi importante) a célébré, à St Andrews (Écosse), le 100e anniversaire de sa fondation de façon discrète, par mesure d'économie, mais surtout pour donner un exemple de restriction volontaire en ces temps de crise économique mondiale. C'est, une fois encore, sur le plan des relations œcuméniques que le protestantisme mondial s'est le plus manifesté.

Œcuménisme

Il se peut que le terme d'« œcuménisme » paraisse un peu usé à certains. Comment pourrait-il en être autrement depuis trente ans qu'il est utilisé à tort et à travers ? Cela n'empêche pas l'œcuménisme, cette tendance positive à la rencontre des autres, de s'être encore accentué au cours de cette année, avec un surprenant élargissement des événements peu communs et, enfin, dans la commune souffrance des croyants, unis dans la défense des plus maltraités, des sans-noms ou, comme cela s'est dit lors d'une assemblée, des non-personnes.

Autres croyants

En novembre 1976, pour la première fois depuis le XVe siècle, le Congrès juif mondial a été reçu officiellement en Espagne. C'est également en Espagne, à Cordoue, mais aussi à Tunis et au Caire, après la fameuse rencontre de Tripoli (Journal de l'année 1975-76), qu'un dialogue durable s'est instauré entre chrétiens et musulmans. Il en a été de même, en Asie, avec l'hindouisme et le bouddhisme ; et, tandis qu'un congrès des religions unies est annoncé, le Conseil œcuménique des églises (COE) et le Vatican préparent une conférence mondiale avec les représentants de toutes les religions.

On constate aussi les progrès manifestes de l'islam en Europe, avec le respect tardif des christianisés pour cette religion méconnue ; des mosquées sont ouvertes et des démarches ont été tentées pour que ses adeptes aient droit à des émissions télévisées consacrées à leur foi. Dans le même temps, cela va sans dire, les dialogues entre confessions chrétiennes se sont poursuivis sur les points les plus délicats, tels que la succession apostolique, le culte marial ou la papauté. Tel a été le cas des rencontres luthéro-catholiques de Strasbourg, de Rome, de Londres, de Vienne, en Allemagne, en Italie et aux USA, etc. ; des rencontres anglicano-catholiques, orthodoxes-catholiques, luthéro-réformés, Églises orientales orthodoxes ou catholiques, etc. À l'image du groupe officieux français des Dombes (entre protestants et catholiques français, groupe animé par un disciple du P. Couturier, le P. Maurice Villain, mort en mars 1977), ces dialogues ont fait des progrès substantiels sur ces points qui demeurent la pierre d'achoppement de l'unité chrétienne.

Le Peace People

Quelques événements peu communs peuvent être rangés au bénéfice de l'œcuménisme. Ainsi en est-il du surprenant Mouvement pour la paix des femmes irlandaises, intitulé Peace People et installé dans les locaux de la communauté œcuménique et pacifiste de Corrymeela, à Belfast.

La notoriété de ce mouvement spontané s'est répandue dans le monde. C'est ainsi que des manifestations de soutien ont eu lieu à Londres même, avec des délégations de femmes venues du continent (dont une Française), comprenant des catholiques et des protestantes ; des meetings ont également eu lieu à Berlin, à Auklan, à Paris (avril 1976) avec, toujours, deux ou trois leaders du Peace People et, souvent, la présence des autorités religieuses des diverses Églises.

À Londres, par exemple, les milliers de femmes rassemblées à Trafalgar Square après une longue marche, en présence du primat de l'Église anglicane, du cardinal de Westminster et du modérateur de l'Église presbytérienne, ont écouté des chants pacifistes de Joan Baez. À Paris, la manifestation de soutien s'est déroulée dans l'église de Saint-Germain-des-Prés. On a même vu des émules du Peace People, des femmes noires et blanches des deux confessions, s'opposer à la violence en Rhodésie. La base de ce mouvement est la doctrine non violente de Martin Luther King et de Gandhi.